prod. Thirza Cuthand
FOCUS THIRZA CUTHAND
Thirza Cuthand | Canada | 1995-2020 | 62 minutes | FIFA expérimental
En 1995, à 16 ans, Thirza Cuthand présente son premier court métrage, Lessons In Baby Dyke Theory, au Virtuous Reality, un petit festival de films queer de Saskatoon. Armée d’un camcorder et de sa franchise adolescente, elle s’amuse avec l’esthétique cheap de la vidéo pour nous raconter ce que c’est que d’être la seule lesbienne de son école. Le focus proposé par le FIFA revient sur plusieurs œuvres de la cinéaste réalisées entre 1996 et 2020. Sans détour, l’artiste aborde dans ces huit courts métrages sa santé mentale, la prise de médicaments, l’incompréhension qui l’entoure, sa sexualité, son identité queer et autochtone, sa vision du colonialisme et la violence qui en découle. Elle exploite ses territoires intimes pour en faire un lieu de lutte. Elle déterre l’Histoire pour la réécrire au Sharpie.
Le programme s’ouvre avec My Sister (1996), où la douceur rassurante d’une discussion entre deux amies enveloppe des ralentis saccadés. À travers des anecdotes, tantôt attendrissantes, tantôt brutales, elles témoignent de l’amour qu’elles portent pour leurs sœurs, deux jeunes femmes qui présentent des déficiences intellectuelles. En l’espace de cinq minutes, Thirza Cuthand impose un autre rythme de lecture, elle déploie un temps où les sœurs échappent aux discriminations et violences qu’elles vivent au quotidien. Des sourires figés et tordus se déplacent lentement le long des lignes de balayage vidéo. S’ensuit un peu moins d’une heure de paroles rythmées, récits de soi et sincérité crue.
Sight (2012) me reste en tête. Des lignes de feutres de couleur dansent sur les images Super 8 tremblantes, mais ce sont surtout les mots déclamés avec force et assurance qui lacèrent et maculent le film. L’artiste y raconte les épisodes de cécité temporaires que lui infligent ses migraines. Elle nous confie aussi l’histoire de son cousin schizophrène qui se taillade les yeux à coups de couteau, puis sa peur, en tant que cinéaste, de devenir aveugle.
Cuthand se raconte à travers des images vidéo vibrantes de parasites visuels, des plans instables et sans artifices qui tournoient et caressent tantôt son corps, tantôt le ciel, tantôt les arbres ou l’herbe à ses pieds, laissant entrevoir des morceaux de son paysage mental et des luttes qui l’animent. Souvent avec une pointe d’humour qui contraste avec le sérieux des sujets qu’elle aborde. Dans Just Dandy (2013), quand elle récite sa fable du pissenlit et de la Méchante Reine, c’est devant un fond vert et des images kitsch qu’elle interroge ses racines cries et écossaises, devant un public invisible que l’on ne peut qu’imaginer aujourd’hui.
Pandémie oblige, je suis dans mon salon, face à l’écran trop petit de mon ordinateur, avec pour seule compagnie la voix de Cuthand qui coule à flots et semble ne vouloir s’arrêter que pour reprendre son souffle entre chaque court métrage. Je me rappelle alors la fin de Lessons In Baby Dyke Theory, les crédits plus exactement, où, sous le nom de la cinéaste, une phrase écrite à la main clame « I did everything myself !!! » (Doriane Biot)
prod. IB3 Televisio / Oberon Cinematografica
DRAWING MAX
Max et Cesc Mulet | Espagne | 2020 | 67 minutes | Sélection officielle long métrage
Dans une théorie de comptoir au sujet du film sur l’art, on pourrait écrire que cette forme, pleine de surprises mais souvent ingrate, se décline en deux catégories principales : les films sur les artistes morts et les films sur les artistes vivants.
Or deux règles immuables du film sur l’art portant sur des artistes vivants et filmés me semblent cruciales lorsqu’on souhaite considérer ces œuvres au-delà ou par-delà leur sujet créateur, puisque dès que l’on regarde ces films en dehors de leur contexte déjà peu compétitif (les sélections de films sur l’art sont polyvalentes et favorisent une interdisciplinarité entre le cinéma et tous les autres arts où le cinéma perd au change), en dehors de notre intérêt propre envers l’artiste consacré, en dehors aussi des considérations informatives (qui pullulent car ces films ont tendance à être pensés pour une diffusion télévisuelle), on réalise que l’originalité tacite, parfois naïve, de ces films classés en démarches, en médias et en techniques, est d’ignorer parfois que le cinéma n’est jamais bien loin, toujours plus prêt qu’on ne l’imagine à infiltrer les cadrages un peu paresseux, les concepts de démiurgie magique et d’impact culturel qui gardent la route dans une déclaration d’intention satisfaisante pour les subventionnaires, mais pas dans l’œil, qui peut bien souhaiter plonger dans l’art qu’on lui tend dans un plan, mais à condition seulement que le cinéma ne nous rappelle pas trop sa présence qui se mesure de plus en plus par son absence.
La première des deux règles consisterait donc à se demander : et si la mise en scène n’avait capté que l’artiste au travail, filmé une heure durant, disons au beau milieu de la journée, à nous raconter sa matinée tout en esquissant son après-midi entre chaque coup de pinceaux ou de feutre, est-ce que le film, maintenant film de création plutôt que film sur l’art, aurait été meilleur ? La deuxième règle : est-ce que l’artiste a lui-même réalisé un film sur son propre travail, voire en compagnie d’un cinéaste ramassé comme on ramasse les co-auteur.rices d’une biographie politicienne ?
On aura compris que Drawing Max, co-réalisé par Max lui-même et Cesc Mulet, est coupable d’enfreindre ces deux règles et qu’elles reviennent punir les quelques bons moments de ces 67 minutes de cinéma un peu pénibles, surtout lorsqu’on les compare au travail autrement plus éclatant, vivant, du bédéiste catalan et dont il faut lire les Peter Pank et Le Rêve prolongé de Monsieur T. En dehors des détails biographiques plus généreux ici que sur une quatrième de couverture, Drawing Max brosse le portrait de cet infatigable bédéiste (actif depuis 1973, alors qu’il faisait ses débuts dans le premier fanzine d’Espagne, le El Rrollo enmascarado) tout en laissant bien peu de place à autre chose qu’à l’esprit du principal intéressé (quelques thèmes, quelques personnages récurrents, comme une sorte de psychanalyse picturale sans risques ni révélations). La ferveur engagée de Max envers la nature et la culture qui forme l’angle supposé du film manque ainsi de relief, d’ouverture en dehors d’un portfolio trop dirigé, alors que le contexte, pourtant formidablement riche, de la BD espagnole des années 1970, est passé sous silence, ainsi que ses nombreux artistes qui entretenaient une amitié collégiale pendant cette période de production sous surveillance de l’Espagne franquiste. Au lieu de cela, le film présente Max comme un roc isolé, créateur sans centre, sans influences, sans relation avec tout ce qui fait de la bande dessinée un inimitable vecteur de tensions sociales et de schizophrénies imagières. On retiendra une poignée de moments forts, puis la beauté ponctuelle de voir un maître dessiner aisément en affirmant quelques slogans qui font plaisir à entendre, comme « la solennité est inacceptable en bande dessinée », à laquelle, non sans mesquinerie, on sera tenté de dire que le nombrilisme est inacceptable dans un film sur l’art qui ne sache se satisfaire d’être un film sur la création. (Mathieu Li-Goyette)
prod. Wapikoni
TROIS COURTS MÉTRAGES, TROIS POINTS DE VUE SUR L'ORALITÉ
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INUIT LANGUAGES IN THE 21ST CENTURY
Ulivia Uviluk | Canada | 2020 | 10 minutes | Sélection officielle court métrage
Film de confinement fabriqué avec une idée et un ordinateur, Inuit Languages in the 21st Century sonde le rapport qu’entretiennent des personnes nées Inuits, peu ou prou familières avec la langue de leur origine. En une économie de moyens qui va droit au but, il situe d’abord, en quelques balises historiques, un enjeu crucial : comment l’essence foncièrement orale d’une langue ayant fleuri à travers divers dialectes s’est frottée à des médiums qui en changèrent la nature. Médium imposé de l’écrit lorsque vers la fin du 19e siècle, les efforts colonisateurs de christianisation inventèrent l’inuktitut syllabique ; médiums de la télévision, du téléphone et de la radio qui donnèrent cette fois lieu à une prise en charge interne, lorsque fut fondé l’organisme Taqramiut Niginpat Inc, en 1975, avec pour objectif d’offrir aux communautés du nord de l’information en Inuktitut. S’inscrivant dans cette perspective brossée en quelques clics, la jeune réalisatrice Ulivia Uviluk use à son tour des médiums de l’heure pour interroger, lors d’appels-vidéos adressés à deux jeunes femmes, le rapport à une langue, à la fois proche et lointaine. L’oralité de l’échange et la multiplicité de langues qu’il implique (l’inuktitut, l’anglais, le français, le danois) renvoient au sujet débattu, faisant apparaître les moyens virtuels par lesquels la survivance s’organise, en trouvant son petit point de conclusion lorsque nous sont montrés les outils didactiques « en ligne » d’apprentissage de l’inuktitut.
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prod. Sunjha Kim
GUJIGA
Sunjha Kim | Allemagne/Corée du Sud | 2019 | 18 minutes | Sélection officielle court métrage
En un même retour vers l’oralité et les origines depuis un ailleurs de proximité, Gujiga de Sunjha Kim, cinéaste coréenne vivant en Allemagne, se penche sur une chanson ancienne (42 av. J. C.) — Gujiga — laquelle érige la tortue en figure symbolique tutélaire. Le film intrigue d’emblée étant donné la pauvreté de l’imaginaire occidental lié à cet animal à la physionomie métaphorique, en premier lieu perçu à travers la modernité domestique des enfants et de quelques adultes (l’on pensera à Éric Chevillard et à L’explosion de [s]a tortue). Sur fond musical de voix de Minhee Parly qui reprend dans ses paroles les aspects de l’animal et dans sa musique une ambiance chamanique, le film consiste en un montage d’images soignées, qu’il en aille de la photographie ou de la composition, entremêlant de très gros plans sur des éléments tels un œuf éclos ou une carapace, de moyens plans de textures, d’eau ou de feuillage, et puis, de très grands plans d’ensemble de paysage. Exempt d’êtres humains, le film plonge et puise dans l’oralité ancienne du chant et dans la création d’images, afin de renouer une liaison disparue entre micro- et macrocosmes et ainsi re-former ce que l’intelligence symbolique fomente.
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prod. INSAS / Lodz Film School
AUTOUR D'EUX, LA NUIT
Vassili Schémann | Belgique/Pologne | 2020 | 20 minutes | Sélection officielle court métrage
Autour d’eux, la nuit de Vassili Schémann, se saisit également de l’angle de l’oralité, en l’ouvrant cette fois tout à fait vers le chant et le son. En Pologne, dans la ville de Rudna, des mineurs ont fondé une chorale afin, comprend-on au fil des images sous terre et des pudiques témoignages, de ré-enchanter une vie de labeur, passée dans la cacophonie des machineries lourdes et les ténébreux tunnels du cuivre. Au quatrième étage de l’édifice où les mineurs s’exercent, règnent le calme, la concentration, la clarté. Les chants vibrent des riches tessitures masculines, les poitrines s’ouvrent pour atteindre le juste souffle, selon le conseil du maître de choral. Et nous passons alors de la dureté d’un travail journalier à de fines questions d’interprétation, de la tragédie d’un jeune ouvrier mort à la possibilité de la beauté commémorative. En ce sens, Auteur d’eux, la nuit, est absolument un film « sur » l’art, qui nous donne à comprendre, de façon posée et éloquente, comment l’insertion de l’art dans nos vies fatiguées permet d’en déplacer le point de vue et peut se révéler être exercices ponctuels de transfiguration. (Maude Trottier)
prod. Gedeon Programmes
prod. Accentus Music
prod. Naia Productions
SAUVER NOTRE-DAME
Q. Domart, C. Gravel et M. Hollander | France | 2020 | 93 minutes | Sélection officielle long métrage
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BEETHOVEN RELOADED
Andy Sommer | Allemagne | 2020 | 84 minutes | Sélection officielle long métrage
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MAY B
David Mambouch | France | 2020 | 94 minutes | Sélection officielle long métrage
Dans les débats qui font actuellement rage autour des inégalités raciales et sexuelles, un des arguments phares du camp « on-ne-peut-plus-rien-dire » affirme que les propos choquants ou les célébrations de personnages historiques problématiques ne font que raconter une réalité, aussi désagréable que celle-ci puisse être. « N’effaçons pas le passé, même si l’évoquer peut heurter des sensibilités », clament ces personnes qui se croient de braves défenseurs de la liberté — d’expression, du travail universitaire, de l’insulte même. Le film Sauver Notre-Dame nous offre une occasion de réfléchir sur la question de la réalité et de sa représentation et nous montre à quel point ces arguments sont douteux, voire de mauvaise foi.
La réalité que raconte ce film — le travail de sauvetage de la cathédrale de Paris après son incendie — présente, du point de vue des questions sociales mentionnées plus haut, des éléments fort dérangeants. On savait que la société française était encore très marquée par l’héritage colonial des inégalités ethniques et raciales et qu’elle demeurait aussi, malgré des décennies de luttes féministes, extrêmement sexiste ; on se doutait que dans le milieu de la construction ce dernier fléau serait particulièrement présent. Il est choquant tout de même de découvrir que les femmes sont pratiquement absentes du chantier, à tous les niveaux, des cordistes aux architectes, sans parler bien sûr des prêtres (quelques silhouettes féminines traversent l’écran furtivement, et à un moment donné on apprend que deux femmes ont dû quitter temporairement le travail pour cause d’une infection au plomb – le seuil maximal défini pour elles étant bien plus bas que celui des hommes). Il est tout aussi frappant — quoique prévisible — de voir à quel point les hiérarchies de race s’enchevêtrent avec l’échelle des classes pour créer un univers où quelques hommes blancs prennent toutes les décisions alors que d’autres, bien plus divers par leur couleur de peau, risquent leur vie tous les jours sur les échafaudages et, on peut le supposer sans grand risque, se contentent de conditions de travail (financièrement, mais pas seulement) très inférieures à celles des « cadres ».
Tout cela n’est évidemment aucunement de la faute des réalisateur.trices du film, et montrer cette réalité sans fard serait important même si certain.es spectateur.trices pourraient en être désagréablement bousculé.es. Mais quel genre de représentation nous en offrent les cinéastes ? Certes, on ne peut pas les accuser de racisme ni de sexisme explicites. Mais là où le film aurait pu, par l’exposition de la situation, devenir un document social important, le choix a été plutôt de normaliser la situation, de la « naturaliser », voire parfois, avec une pompe de mauvais goût copiée des pires produits d’Hollywood, de la célébrer. Comme si les cinéastes étaient complètement aveugles aux aspects presque grotesques de ce qu’iels filment, sans que l’on puisse savoir si cette cécité est volontaire ou alors si profondément inculquée qu’elle devient insurmontable.
Tout cela est plus complexe encore de par la nature du chantier, qui n’est pas, après tout, un projet de construction comme les autres. Notre-Dame, le symbole par excellence de la France « fille aînée de l’Église », est sans aucun doute un édifice magnifique, et son incendie fut un véritable drame. Sa reconstruction a suscité des débats houleux et fascinants, qu’on espérait voir au cœur du film (spoiler alert : il n’en est rien). Or, le rôle de ce monument dans l’histoire de la France est fortement lié aux problèmes sociaux graves qui affectent aujourd’hui ce pays : la revendication d’une identité chrétienne cohabitant inconfortablement avec un discours laïciste visant surtout les autres religions, celles des colonisé.es ; le masculinisme éhonté de l’Église catholique qui a structuré une société encore fortement machiste ; la croyance en la valeur unique et supérieure de la culture et de l’art français, bien ancrée dans l’identité nationale (et souvent dans les mentalités des non-Français également). Richissime matière pour un film documentaire critique, engagé même, qui aurait montré comment ce qui semble anodin — un chantier où collaborent ouvriers, architectes et hommes d’église — est en fait une métaphore puissante de la France, de Paris, de Notre-Dame, et de ce qu’elles pourraient un jour devenir.
Sauver Notre-Dame n’a pas cette ambition, ni aucune autre qui vaille la peine, surtout pour un festival comme le FIFA. Le film se concentre sur l’aspect technique de la construction (d’un intérêt certain mais limité quand même), mêlé avec tous les clichés possibles et imaginables sur cette unique cathédrale, joyau de l’humanité, patrimoine universel bla bla bla, et aussi sur la collaboration harmonieuse entre tous les participants, pourtant d’un statut social si différent entre eux, qui a seule rendu possible la réussite du sauvetage. C’est non seulement une occasion ratée, mais aussi un documentaire agaçant, puisqu’au lieu d’éveiller le sens critique des personnes qui le regardent, il les berce par un discours qui mérite d’être déconstruit et qui l’est bien trop rarement dans la France d’aujourd’hui.
Un traitement aussi simpliste de « l’universel », même si le propos y est plus naïf et moins néfaste, mine aussi Beethoven Reloaded. Les clichés coulent à flots sur ce « grand génie » dont on vient de célébrer le 250e anniversaire. Sans mettre en doute la véritable immensité du compositeur, on aurait aimé que le film creuse un peu plus ces lieux communs qui collent à Beethoven peut-être plus qu’à aucun autre artiste du passé (à l’exception possible de Michel-Ange). Une tentative intéressante de parler de l’universalité et de l’actualité de cet Allemand mort depuis deux siècles est pourtant proposée : le film suit un groupe d’adolescent.es sud-africain.es, pour la plupart noir.es, qui préparent un spectacle incluant des Lieder de Beethoven. Mais là aussi, déception : le discours, des adolescent.es et de leurs deux musiciens-mentors, ne dépasse guère les phrases mille fois entendues sur le génie qui touche l’humanité sans distinction de culture, de couleur ou de genre. Qu’est-ce qui rend la musique de Beethoven si « universelle » ? Est-ce que ces jeunes l’aiment de la même manière qu’iels aiment la musique traditionnelle de leur propre culture ? Beethoven les touche exactement comme le feraient les chansons populaires d’aujourd’hui, notamment celles des musicien.nes noir.es ? Ou s’agit-il d’un autre registre d’identification ? Et le rapport compliqué du compositeur avec les femmes (que le film raconte avec une avidité un peu gossip), rend-il Beethoven un peu moins universel dans une société, la nôtre, qui cherche à valoriser l’expérience de vie de tous les genres ? Beethoven Reloaded, aussi divertissant et instructif qu’il l’est, ne va pas jusqu’à aborder ces questions.
Un traitement bien plus intéressant de ces aspects est proposé de manière inattendue par Maguy Marin dans son spectacle May B, dont la captation filmée est également présentée cette année au FIFA. C’est le génial contemporain de Beethoven à lisière du classicisme viennois et du romantisme naissant, Franz Schubert, qui accompagne par sa musique tragique plusieurs scènes de cette danse à la fois grotesque, dérisoire et déchirante. Sans mots, cette juxtaposition nous dit tant sur le jeu subtil, dans la musique qu’on appelle, faute de mieux, « classique », entre spécificité culturelle et universalité d’émotion, entre élitisme sophistiqué et humanité accessible à quiconque. Tout ce que Beethoven Reloaded effleure à peine, May B l’exprime avec puissance, alors que ce n’est même pas son « sujet » principal. (Itay Sapir)
PARTIE 2
(Focus Thirza Cuthand, Drawing Max,
Inuit Languages in the 21st Century, Gujiga,
Autour d'eux, la nuit, Sauver Notre-Dame,
Beethoven Reloaded, May B)
Biographie des collaborateurs
Doriane Biot est responsable des expositions à la Cinémathèque québécoise. Elle écrit des critiques et essais sur le cinéma dans les revues Blink Blank, 24 images, Hors Champ et contribue en 2020 à l’ouvrage collectif XPQ : traversée du cinéma expérimental québécois (Éditions Somme Toute).
Itay Sapir est professeur d’histoire de l’art à l’Université du Québec à Montréal (UQÀM), spécialiste de l’art européen du XVe au XVIIe siècle.
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