Quelle est la différence entre ce FCLM et Festivalissimo (Festival de cinéma ibéro-latino-américain qui s’est terminé il y a moins d’un mois)? Ce n’est pas de la mauvaise foi, car la question vaut la peine d’être posée. Pourquoi deux festivals cousins à un mois d’intervalle, mais surtout pourquoi deux festivals compétitifs sur le cinéma latino-américain en si peu de temps?
D’abord, le FCLM accueille aussi dans ses rangs des films venus d’Espagne et du Portugal. Ensuite, il faut dire que ce festival s’inscrit dans une série tout à fait louable de programmations annuelles et ponctuelles organisées par le cinéma du Parc (les cinémas japonais, roumains, brésiliens et bien d’autres y ont tous été représentés à un moment ou à un autre). C’est donc par souci de rigueur que le FCLM existe en dépit de l’existence de Festivalissimo. Cela dit, le festival qui vient à peine de commencer n'a pas à rougir et a pour sa part dans ses coffres une programmation qui est pour le moins impressionnante. Venu des quatre coins de la planète où l’on parle espagnol, portugais et catalan, voilà une ode à leur culture, une édition qui en profite pour remettre au goût du jour le chef-d’œuvre du cinéma cubain, Mémoires d’un sous-développement (à voir absolument en ces temps si durs pour la culture et l’épanouissement du droit citoyen au Canada).
Vient ensuite la sélection officielle composée de films prestigieux sélectionnés à Cannes et aux Oscars (El Estudiante, Chico Y Rita, Bonsai et d’autres) sans compter le gagnant du World Cinema Award de Sundance en 2012, Joven Y Alocada de Marialy Rivas. Souhaitant se pencher sur les grands succès populaires, le FCLM couvre aussi dans sa section Box-office des films rivalisant avec les productions hollywoodiennes lorsqu’elles sont diffusées à l’intérieur de leurs frontières. Mi primera Boda, par exemple, attira plus de spectateurs que n’importe quel autre film l’an dernier en Argentine. Acorazado a accompli le même exploit au Mexique et Prometeo Deportado en Équateur; plus que l’occasion de se confronter à un cinéma populaire qui nous est étranger, ce sera le temps de saisir le pouls de ces cinématographies rarement diffusées à l’extérieur de leur pays (le cinéma commercial ayant la vie dure lors des festivals, on regrettera toujours que Fantasia soit l’un des seuls événements à nous faire goûter ce qui se fait à la surface, soit au-dessus du cinéma d’auteur). C’est dans cette même section qu’on pourra revoir La peau que j’habite d’Almodóvar ou le A Better Life de Chris Weitz.
En parlant de Fantasia, c’est avec ce festival que le FCLM présentera le très attendu We Are What We Are en compétition officielle, un film de cannibales comme nous n’en voyons plus (le film de cannibales étant une tendance ô combien sous-exploitée depuis ses gloires des années 70 et 80). Parmi les documentaires projetés, notons José y pilar, un documentaire qui ayant représenté le Portugal lors des derniers Oscars portant sur la vie de l’immense auteur José Saramago. Enfin, la section Novo Cinema mettra en vedette des propositions de cinéma un peu plus novatrices, des morceaux de bravoure mêlant les esthétiques et résistant à la case « cinémas nationaux » dans laquelle la critique tente de faire entrer docilement tant d'oeuvres étrangères. On y remarque la présence de Aita, film de maisons hantées et gagnant du prix de la meilleure direction photo au festival de San Sebastian.
Tout cela se déroulera donc au cinéma du Parc jusqu’au 22 avril prochain où on pourra assister au film de clôture, L’incrédule (une première mondiale), tourné à Montréal par le cinéaste québécois d’origine argentine Federico Hidalgo. En attendant cette dernière projection, nous souhaitons au FCLM sa meilleure des éditions, lui qui, sans remplacer son principal concurrent, coupe l’herbe sous le pied à un Festival des Films du Monde au fond du baril, mais réitère surtout l’importance capitale du cinéma Du Parc dans le paysage de la diversité cinématographique et culturelle à Montréal.
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