ÉDITORIAL : À l'ombre de La Métropolitaine
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Espionner l'espion

Par Sylvain Lavallée
Prolégomènes
 


 
Comment différencier un espion d’un autre espion? Qu’il soit de l’Est ou de l’Ouest, l’espion emploie les mêmes moyens fourbes qu’un autre espion (la trahison, la tromperie,  le meurtre…) Les jugements de culpabilité ou d’innocence ne lui appartiennent pas, d’abord parce que l’espion sur le terrain exécute docilement des directives qui viennent de plus haut, mais aussi parce qu’il travaille au nom d’une cause qui dépasse l’individu – qui est plus grande que lui, l’exécutant, et plus grande que celui qu’il exécute. L’espion doit s’oublier pour se dédier à cette cause, cette idéologie à laquelle (idéalement) il croit, à cette nation qu’il veut défendre. La fin justifie les moyens, mais même si les fins de l’un et de l’autre sont radicalement opposés, les moyens pour y parvenir sont pour l’essentiel les même, alors un espion pose les mêmes gestes peu ou prou qu’un autre espion (d’où toute la difficulté de repérer la taupe, l’espion infiltré parmi les espions ennemis). Pour différencier un espion d’un autre, il faudrait donc savoir pour qui et pourquoi ils agissent. 
 
Du moins, c’est ce que nous dit la littérature occidentale sur l’espion, elle qui fait souvent de cette figure une tragédie existentielle, intimement liée à l’individualisme intrinsèque à l’idéologie capitaliste : l’individu se réalise à travers son travail, le succès financier et/ou la reconnaissance sociale qui en découle, mais tant qu’il reste dans l’ombre l’espion ne peut jamais jouir d’une quelconque forme de reconnaissance. En outre, en renonçant à son individualité, l’espion se met à l’écart de notre société, ce n’est pas sa propre volonté qu’il réalise à travers son travail, mais celle de l’État. Parfois sa volonté peut correspondre à celle de l’État, s’il croit suffisamment en sa cause, mais ce n’est pas toujours garanti et en réalité il est préférable que l’espion ne se pose pas du tout la question. L’espion est donc seul parce qu’il doit entretenir une paranoïa nécessaire à sa survie, mais aussi parce que la nature de son travail le rend étranger à sa société ; en fait, l’espion correspond pratiquement au bon citoyen communiste de notre imagerie populaire, le non-individu indistinct de la masse (quoique dans le cas de l’espion il s’agit d’une feinte), tout entier dédié à son État. Mais alors, si la solitude de l’espion capitaliste découle du fait qu’il doit devenir communiste, qu’en est-il de l’espion communiste?
 

1. La mission
 
Il n’y a pas milles manières de répondre à cette question : il faut aller voir ce que nous dit le cinéma soviétique. Mais y a-t-il du cinéma d’espionnage soviétique? Sûrement – intuition vite confirmée par une recherche sur le meilleur outil d’espionnage moderne, Google (bien sûr, c’est surtout Google qui nous espionne). Quelques clics plus tard, voilà une poignée de titres, dont un rapidement attire l’attention, Myortvyy Sezon (ou Dead Season), réalisé par Savva Kulish en 1968, en pleine Guerre Froide, avec Donatas Banionis, un grand acteur russe que le cinéphile reconnaîtra aussitôt pour son rôle de Kris, l’astronaute aux prises avec le fantôme de sa femme dans le Solaris d’Andreï Tarkovski. Bien, mais comment le dénicher, ce film? Rien de plus facile selon google, il appert qu’il est disponible en entier sur Youtube (en deux parties; partie 1, partie 2)… mais cela ne nous avance guère, à moins d’apprendre le russe à toute vitesse afin de livrer cet article avant la fin du numéro en cours. Il faut donc des sous-titres! Trouver une copie sous-titrée relève sans doute de la chimère (il y a un DVD, mais la mention « Subtitles : unknown » sur sa fiche technique ne nous encourage guère à courir après), alors il faut retourner sur Google, où le cinéphile 2.0 saura bien comment trouver une piste de sous-titre – en hongrois, en italien… en anglais!

 


 
Étonnant tout de même que le tout soit accessible si facilement : peut-être que le film a connu un succès d’estime? Peu de détails étant disponibles en français ou en anglais, il faut chercher en russe (Мёртвый сезон) et faire confiance, encore une fois, à google pour traduire quelques pages, et l’on découvre que le film a effectivement gagné des prix à l’époque dans des festivals soviétiques, à Minsk et Sofia. Quelques commentaires d’internautes russes font preuve d’enthousiasme, on parle d’un film réaliste, basé sur des événements réels, le personnage de Banionis s’inspirant d’un espion soviétique célèbre, Conon Molodyi, qui a aussi supervisé la production du film. Et,fait plus intrigant, la page IMDB de Banionis nous apprend que son interprétation dans Dead Season aurait inspiré Vladimir Putin à rejoindre les rangs du KGB – voilà qui nous laisse espérer une bonne dose de propagande d’État, propice à répondre à notre interrogation. Il est temps de jeter nos yeux occidentaux sur cette œuvre.
 

2. Message codé
 
Ça ne pouvait pas être si facile : il semblerait que notre sous-titreur anonyme aussi a abusé de google pour traduire le film, à moins qu’il ignorait tout de la syntaxe anglaise, ce qui donne des dialogues qui vont du surréalisme (la récurrence du mot fucking, employé comme un nom – on comprendra plus tard que cela fait référence à un personnage, mais aucune idée de ce que ce mot est supposé traduire) à l’étrangement lumineux (you are me, de dire un espion à un autre, comme pour résumer ce thème de l’espion interchangeable, ou we all are deceivers, but true, pour décrire la nature de l’espion) en passant par la pure obscurité. Il faudra donc décoder le texte, lire entre les lignes, boucher les trous pour tenter de cerner ce qui ressemble de plus en plus à un document secret, déterré des archives de l’autre côté…
 
Ce qui n’aide pas à la confusion : tout le monde parle russe, et si nous sommes habitués à ce que tout le monde parle anglais dans un film hollywoodien, aussi cosmopolite soit-il, le contraire est moins vrai, alors il faut un moment pour comprendre que l’action principale se déroule dans un petit village anglais, ce qui, pour nos espions soviétiques, est passablement plus dangereux que s’il s’agissait d’un petit village polonais ou hongrois par exemple. Ils sont de l’autre côté, notre côté, mais il est difficile de se reconnaître dans une langue que nous ne connaissons pas (et tout d’un coup, moment d’empathie pour tous ceux, ils sont légion, qui se sont trouvés dans la même position face à un film anglophone).
 
Notre interprétation, forcément, sera lacunaire, mais vu le sujet, cela ne constitue peut-être pas un obstacle ; notre lecture s’abreuvera à même cette insuffisance.

 
3. Secret d’État
 
Premier plan, un homme s’avance vers la caméra pour s’adresser aux spectateurs : « Dans ma profession… moi et mes camarades sommes enthousiasmés par ce film… » Mais quelle profession? Et quels camarades? Peut-être que les intertitres qui précédaient son entrée en scène nous présentaient cet homme, mais nos sous-titres négligent de les traduire, une nouvelle interrogation qui nous ramène sur google, où décidément se trouvent toutes les réponses à nos questions. Et quelle réponse surprenante : il s’agirait de nul autre que Rudolf Abel, espion qui nous a été présenté il y a de cela trois mois par Steven Spielberg dans son très beau Bridge of Spies, à travers l’interprétation sublime de Mark Rylance. Est-ce que Spielberg a vu Dead Season?   

 


 
La suite nous le dira peut-être, mais pour l’instant, grâce à Spielberg et Rylance, cinquante ans plus tard, nous avons envie de faire confiance à ce Rudolf Abel lorsqu’il nous assure de la véracité des événements qui suivent. Ce type de prologue, d’ailleurs, sert à attiser la curiosité du spectateur, une manière de le mettre dans sa poche en lui faisant croire qu’il est digne de confiance, qu’il est prêt à entendre ces secrets d’État que l’on s’apprête à révéler. Alors aujourd’hui, pour le spectateur occidental, cette introduction est d’autant plus intrigante, l’impression d’outrepasser un interdit d’autant plus tenace, comme si Abel s’apprêtait à nous livrer ces informations qu’il gardait courageusement pour lui dans Bridge of Spies
 
Le film proprement dit commence : nous sommes à Londres. Rien de bien dépaysant pour nous, mais qu’en était-il pour le spectateur soviétique en 1968? Avait-il l’impression d’espionner l’autre côté, comme aujourd’hui nous avons un peu cette impression en regardant ce film? Peut-être : un espion rentre dans une chambre d’hôtel, il est aussitôt agressé par un sourire éclatant, tiré d’une publicité pour dentifrice. Le film s’attarde sur cet écran de télévision, la ritournelle joyeuse de la réclame contrastant avec la paranoïa de l’espion (il détient un secret qui pourrait lui coûter la vie), un truc de mise en scène très simple, efficace, qui prend ici toute une ampleur idéologique (le drame vrai de l’espion soviétique qui risque sa vie pour son État vs la fausseté du consumérisme occidental vendant le bonheur personnel autant que des belles dents). Tout au long de Dead Season, la caméra se montrera d’ailleurs fort curieuse envers la télévision occidentale, la (longue) publicité sera présentée dans son intégralité, plus tard une course de chiens sera aussi montrée en entier, puis vers la fin c’est un groupe de rockabilly comportant un pianiste qui joue avec son pied : faudrait-il déceler dans cette attention démesurée par rapport aux besoins du drame une forme de fascination amusée? Et qu’en est-il de la scène dans un salon de quilles et de celle dans un concours de beauté canine? Y avait-il des salons de quilles ou des concours de beauté canine en URSS?
 
Trèves de spéculations, dès que le récit commence, nous remarquons une constante (inattendue, même si une fois connue elle tient de l’évidence) : que l’on soit à l’Est ou à l’Ouest, le Grand Méchant, c’est toujours l’Allemagne hitlérienne. Dans Dead Season, les Nazis auraient développé dans les camps de concentration une arme bactériologique, alors il faut empêcher qu’elle tombe entre les mauvaises mains, pas tout à fait les nôtres, mais celles de l’Allemagne de l’Ouest. Pour retrouver un scientifique nazi travaillant incognito dans un village fictif de la campagne anglaise, les soviétiques engagent un acteur de théâtre, survivant des camps, afin d’identifier notre homme ; sur les lieux, il doit retrouver un espion professionnel, Ladeinikov (Donatas Banionis), qui mène déjà l’enquête depuis quelque temps, déguisé en vendeur de juke-box (c’était apparemment la couverture véridique de Conon Molodyi). La CIA aussi s’en mêle, aidée par la police locale.

 


 
Dead Season nous est familier : il y a des filatures, des espions qui tentent de se fondre au quotidien, des espions qui se font photographier à leur insu, des espions qui parlent en secret dans une voiture, terrés au creux d’une forêt, la CIA qui soupçonne la présence du KGB et vice versa, des espions qui scrutent la foule pour identifier un individu, un espion qui s’acoquine avec l’ennemi pour se rapprocher de sa cible, une scène de torture, une bagarre à coups de poings étonnamment brutale (et aussi un peu ridicule), un discours fasciste de la part du vilain d’usage, une poursuite en voiture… Il y a quelque chose de paresseux dans la mise en scène, peut-être parce qu’elle recherche un certain réalisme brut, ce qui ressemble un peu trop, parfois, à un simple enregistrement de l’action, surtout lors des discussions (le sous-titrage ne l’aide pas en cela), mais elle prend vie lorsque vient le temps de présenter la paranoïa, avec ces regards furtifs traduits par une caméra subitement mobile, parcourant les visages à coups de zooms et de panoramiques. En somme, il s’agit d’un bon film d’espionnage, comportant deux ou trois moments très réussis, mais qui n’aurait qu’un intérêt très limité si ce n’était de son origine.
    
Ce qui nous amènerait à avancer que peut-être, en effet, qu’ils proviennent de l’Est ou de l’Ouest, les films d’espionnage se ressemblent : à partir de la même prémisse, il suffirait de transporter l’action un plus à l’Est, d’inverser les allégeances des personnages et Dead Season pourrait bien avoir été tourné de ce côté du rideau de fer. Même le long sermon de notre salaud de scientifique nazi pourrait bien servir autant dans un James Bond que dans un Fritz Lang : « Hitler avait beaucoup d’intuition, mais il était aussi franchement ignorant », dit-il à peu près, «  Nous allons créer une nouvelle société, éliminer les riches et les pauvres, il n’y aura plus qu’une élite vivant dans son Eden, des races inférieures effectueront le travail, elles seront toujours heureuses parce que sans mémoire, coupées du monde extérieur, toujours au travail, comme des robots, ils seront multiples mais toujours le même, etc. » Difficile de ne pas voir l’ironie : si ce discours nous est si connu, c’est parce qu’il pourrait (presque) être confondu avec un idéal stalinien, tel que celui-ci a été conçu dans notre imaginaire culturel, tel qu’il a été proféré bien souvent dans nos films par des scientifiques soviétiques tentant de dominer le monde.

 


 
Mais si Dead Season nous est familier par ces figures clichées qu’on y retrouve, il faut noter aussi celle qui ne s’y trouve pas, c’est-à-dire, entre autres, la vie personnelle des espions, à peine abordée, leur solitude provenant avant tout du fait qu’ils sont en territoire ennemi et non de leur obligation à renoncer à toute forme de liaison amoureuse par exemple, souvent un aspect fondamental de la tragédie existentielle de l’espion de l’Ouest (sans oublier que le couple, la famille surtout, est souvent garant à Hollywood de la santé de la communauté entière). En conséquent, il n’y a aucune ambiguïté, à la fin de Dead Season, sur le statut héroïque de l’espion, ni sur l’utilité de ses actions : vivre dans l’ombre peut mener au désespoir, certes, mais cela est nécessaire à la survie de l’État. Le fait qu’il soit sans famille n’est pas l’indice d’un trouble dans la communauté, la vie personnelle de l’espion importe peu dans le discours du film. De plus, il n’y a aucun dilemme moral du type « est-ce que la fin justifie les moyens? » pour tempérer le sentiment de victoire en conclusion. Dans la dernière scène, magnifique, Ladeinikov revient au pays en avion avec une équipe d’athlètes : alors que ceux-ci sont accueillis par une presse enthousiaste, l’espion se faufile difficilement parmi eux pour rejoindre une poignée d’amis qui l’attendent, loin de cette foule, au centre d’une piste d’atterrissage quasi-désert, Dead Season s’offrant ainsi comme une célébration de l’espion, de ses sacrifices, là où la société ne le peut pas. 
 

4. Le pont des espions
 
Il serait douteux de conclure quoique ce soit à partir de cette comparaison entre un seul film soviétique et l’ensemble du film d’espionnage occidental, un corpus par ailleurs des plus variés. Toutefois, une scène de Dead Season rime de manière si éloquente avec un de « nos » films qu’il est difficile de ne pas en tirer une allégorie fort à propos. Il s’agit, encore une fois, du Bridge of Spies de Spielberg, qui se termine sur ce pont du titre, le temps d’un échange d’espions, un soviétique contre un américain (et un touriste). Or, dans Dead Season, après avoir accompli sa mission, Ladeinikov est capturé par la CIA et gardé prisonnier plusieurs années. Refusant de collaborer, de retourner au pays en jouant à la taupe pour l’Amérique, les autorités décident finalement de l’échanger contre un des leurs, un espion prisonnier du KGB… Cette symétrie entre les deux scènes de troc, celle de Dead Season et celle de Bridge of Spies, est renforcée par une mise en scène qui, dans les deux cas, jouent justement sur des cadrages symétriques, séparant les deux nations par un grand vide au centre de l’image, tout en les renvoyant symboliquement l’une à l’autre, par la disposition régulière des éléments aux extrémités du cadre. Il est bien tentant, alors, d’en faire de même avec les deux films, de les rabattre l’un sur l’autre en un fondu enchaîné qui superposerait les images de ces deux scènes d’échange. Puis, nous arrêterions leur mouvement à un point précis, lorsque les espions se croisent au centre de l’image, sur ce pont liant implicitement l’Est à l’Ouest ; nous l’arrêterions à ce moment, donc, où les deux images n’en formeraient qu’une (pour ceux qui veulent faire l’exercice en imagination, la scène de Dead Season, remarquable, se trouve ici, à partir de 55 :53).

 




 
Cela ne dure qu’un instant : l’espion, en tant qu’individu sans individualité, est interchangeable, you are me se disent-ils probablement du coin des lèvres en se croisant sur le pont, sur le terrain, mais une fois atteintes leurs rives respectives, une fois de retour au pays, l’image se dédouble à nouveau. Tom Hanks, dans Bridge of Spies, va retrouver sa famille, comme il se doit, la communauté est saine et sauve, le père (toujours le père) a accompli son devoir (il a ramené ses fils symboliques à la maison) ; Ladeinikov, dans Dead Season, est accueilli par ce qui semble être des représentants du KGB,  des personnages anonymes, vus de loin. À la fin d’un Spielberg, un tel accueil serait l’indice d’une tragédie à venir, comme on le pressent quand Rudolf Abel se fait engouffrer dans une voiture après l’échange, poussés par des non-individus semblables à ceux à la fin de Dead Season, mais il s’agit bel et bien ici d’un happy ending, comme à la fin de Bridge of Spies, d’un retour à la normale pour la communauté. Hanks retourne donc à sa famille, le regard approbateur de sa femme qui lui ouvre la porte de sa maison servant à authentifier qu’il est bel et bien ce père héroïque qu’il a appris à devenir à travers sa mission de sauvetage à l’Est ; Ladeinikov aussi est présenté comme un héros, le film reconnaît son statut d’exception par le gros plan sur son visage qui clôt le film par exemple, mais en même temps, il retourne auprès de ses collègues de travail, leur regard authentifiant seulement ses qualités d’espion, il est un héros parce qu’il s’acquitte bien de sa tâche.
 
Il faut dire qu’Hanks ne joue pas tout à fait un espion dans Bridge of Spies, ce n’est pas lui qui traverse le pont et par conséquent il n’est jamais amené à renier son individualité, mais la comparaison demeure éloquente : Spielberg insiste sur l’individu Hanks, sur ses qualités de père, car c’est d’abord en étant un bon père (auprès de sa famille, d’Abel ou des Américains prisonniers) qu’il peut servir l’État ou plus exactement qu’il peut faire mouvoir l’État, qui autrement, sans la volonté d’un individu exceptionnel, serait inerte ; Ladeinikov, lui, est bel et bien un espion, alors il ne se réalise pas lui-même en accomplissant son travail, il n’a pas d’apprentissage personnel à faire, et contrairement à Hanks il n’a pas de volonté propre, c’est-à-dire qu’il ne fait que poursuivre la volonté de l’État qui n’a pas besoin de lui, en particulier, pour bouger (le film montre bien d’ailleurs l’effort collectif du service d’intelligence soviétique, alors que les collègues d’Hanks ne sont toujours que des obstacles). En cela, Ladeinikov n’est pas différent de nos espions, mais en retournant à la maison, le regard qui l’accueille ne reconnaît toujours pas son individualité (même le film le prive de sa voix dans la dernière scène, le son est coupé lorsqu’il prononce ce qui semble être des remerciements), il n’y a pas de transition entre sa vie d’espion et sa vie en société (un de nos films montrerait la difficile réadaptation au quotidien, ou les retrouvailles avec tout ce qu’il a renoncé pour devenir espion). Alors d’espion à citoyen communiste, il semble effectivement qu’il n’y a qu’un pas.
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Article publié le 11 janvier 2016.
 

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