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La langue dansante : le cinéma d'Abdellatif Kechiche

Par Nicolas Krief
L’arrivée d’un nouveau film d’Abdellatif Kechiche à la Mostra de Venise en septembre dernier a déclenché chez l’auteur de ces lignes des frétillements au niveau de l’estomac. Quelques mois plus tard, dans le cadre de la sortie du film au Canada, distribué par Métropole Films, ladite compagnie de distribution annonce en grandes pompes la venue du cinéaste en ville pour donner une leçon de cinéma à l’Université de Montréal et quelques entrevues. Cette fois, c’est le coeur qui a fait quelques bonds.

C’est que l’auteur d’origine tunisienne a su, en quatre films, s’imposer comme l’une des plus importantes figures cinématographiques de la scène internationale. Kechiche propose en 2000 son premier long métrage, La faute à Voltaire, film, certes, d’une grande sincérité, mais c’est en 2004, avec une bombe nommée L’esquive et sa victoire écrasante à la cérémonie des Césars, que le cinéma français a découvert son nouveau prodige. Ode à un langage métissé, L’esquive marqua la cinématographie française en redonnant ses lettres de noblesse à un cinéma social de petite envergure technique, mais aux innombrables finesses.

Abdellatif Kechiche (Photo : Nathan Nardin)

La grande année cinéma qu’était 2007 fut marquée par une poignée de films gigantesques, dont un en particulier. Le troisième long métrage de Kechiche, La graine et le mulet, conte tragique coloré d’accents et de sensations maghrébines constitua une nouvelle pierre blanche dans le septième art français. Le cinéaste obtint une autre victoire aux Césars, mais créa surtout une onde de choc, un retentissement mondial. Sous une couche sensuelle et aguichante, La graine et le mulet est d’abord une histoire dure et intransigeante sur la filiation, l’héritage et la dignité. Révélant l’exquise Hafisa Herzi, ce film fleuve obtenu bon nombre de récompenses, autant critiques que publiques et festivalières, et même une édition Criterion!

Digne héritier des grands de l’Hexagone, de Renoir à Pagnol en passant par Pialat ou Guédigian, il semble aussi tirer ses énergies d’un cinéma social ayant particulièrement marqué l’Angleterre, comme celui de Mike Leigh, de Ken Loach ou de Lindsay Anderson. Son quatrième film, Vénus noire, sorti sur les écrans québécois le 1er avril dernier, marque une nouvelle étape dans sa filmographie, passant à un « grand sujet », mais abordé encore une fois avec une implacable humanité.

FILMS CONCERNÉS

LA FAUTE À VOLTAIRE d'Abdellatif Kechiche (2000)
L'ESQUIVE d'Abdellatif Kechiche (2003)
LA GRAINE ET LE MULET d'Abdellatif Kechiche (2007)
VÉNUS NOIRE d'Abdellatif Kechiche (2010)

ARTICLE CONCERNÉ

ENTREVUE AVEC ABDELLATIF KECHICHE
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Article publié le 18 avril 2011.
 

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