WALK THE LINE (2005)
James Mangold
Par Frédéric Rochefort-Allie
« Hello, i'm Johnny Cash! »
Depuis quelques années, les drames biographiques ont connu une
popularité assez soudaine. On se souviendra qu'en 2004, Ray
aboutit sur nos écrans pour remporter une très grande
visibilité aux oscars. Son succès fut si retentissant,
qu'on prévoit déjà un film sur Joy Division, et
bien d'autres musiciens suivront cette mode au cours des 5 prochaines
années...du moins jusqu'à un écoeurement total
du public qui serait à prévoir d'ici peu! L'histoire du
« Man In Black » au grand écran, prévue depuis
son vivant, fut donc soulevée par un vent très favorable.
Le public est avide du prochain Ray.
Or, contrairement à ce que s'entête à nous répéter
tout bêtement une bonne part des médias américains,
Ray et Walk the Line ne partagent que quelques points
en communs. Mis à part un flashback sur une enfance douloureuse,
l'amour inconditionnel pour la musique de son personnage principal aux
prises avec quelques problèmes de toxicomanie - quelle légende
de la musique n'en a pas eu? -, ce sont deux films tout à fait
singuliers. C'est surtout au niveau de l'approche qu'on remarque la
différence, puisqu'alors que Ray s'efforce à
retracer l'ensemble des grands événements qui ont marqué
la vie de Monsieur Charles, l'oeuvre de James Mangold se focalise sur
la mythique dégringolade auto-destructrice du moral de Johnny
Cash. Malheureusement, l'insomnie combinée à un cocktail
de médicaments dans une bière ne font pas bon ménage.
Tout comme la chanson éponyme, Walk the Line est une
oeuvre sur l'amour et la volonté de rester fidèle à
soi-même. Même si elle fut écrite pour sa première
épouse à l'époque, la célèbre mélodie
devient ici le thème de sa relation d'amitié amoureuse
avec June, sa muse. C'est elle qui le sauvera de l'enfer de la drogue
et de sa solitude. quand il sera au bout du rouleau. Si dans les faits
les grands moments de leur rencontre se sont bel et bien passés
tel qu'on nous les présente, alors Johnny Cash et June Carter
sont deux scénaristes incroyables. Leur idylle semble née
pour être portée au grand écran. Personne ou presque
n'oserait imaginer une romance de la sorte, de peur de faire trop cliché.
On raconte que, de leur vivant, Johnny et June ont choisis eux-mêmes
Joaquin Pheonix et Resse Witherspoon pour incarner leurs vies respectives.
Étonnamment, leur intuition fut bonne car les deux acteurs ont
une chimie tout à fait parfaite pour leurs personnages. Quand
Pheonix s'avance sur scène, on jurerait y voir le chanteur dans
sa jeunesse. Pourtant, la physionomie du visage de l'acteur est différente,
mais comme pour De Niro dans Raging Bull ou Dicaprio dans Aviator,
c'est la qualité de la performance de l'acteur qui fait ressusciter
la légende sous nos yeux. De plus, dans ce cas-ci, elle ne s'arrête
pas qu'à l'aspect physique du personnage, puisque l'acteur interprète
lui-même chaque chanson avec une voix fortement similaire. Il
s'est même tellement dévoué à rendre justice
à Cash qu'il prit des cours de chants intensifs et devint alcoolique
- par accident tout de même -, tout comme lui.
Seule la réalisation vient faire fausse note, étant d'une
banalité absolue. Walk the Line manque de rythme, probablement
parce que son cinéaste était trop amoureux de son propre
scénario. Il et n'a osé se départir que de quelques
scènes, trop satisfait des performances de ses deux têtes
d'affiche qu'il était. James Mangold semble avoir laissé
ses acteurs mener la barque, tandis qu'il fonctionnait sur le pilote
automatique. C'est ce qui donne à son film un ton parfois incroyablement
près du roman savon. Même s'il est la plupart du temps
excellent, le manque de contrôle de Joaquin Pheonix affecte légèrement
sa performance qui tend parfois vers l'exagération.
Enfin, si Johnny Cash avait pu voir son film biographique, il en aurait
probablement été fier, malgré ses imperfections.
De nombreux nouveaux fans sont apparus suite à la popularité
du film, ce qui l'aidera à traverser les époques. Néanmoins,
il reste le danger que certains préfèrent les versions
de Joaquin Pheonix aux chansons originales, par simple attachement.
Dans ce cas-ci, le film n'aura servi à rien, et la tendance se
dessine déjà.
Version française :
Walk the Line
Scénario :
James Mangold, Gill Dennis
Distribution :
Joaquin Phoenix, Reese Witherspoon, Ginnifer Goodwin,
Robert Patrick
Durée :
136 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
14 Mars 2006