VIDOCQ (2001)
Pitof
Par Frédéric Rochefort-Allie
Quand on nous annonce un thriller fantastique français qui se
déroule au 19ième siècle, on ne peut qu'être
intrigué. Vidocq est une adaptation non-officielle de
la série du même nom, inspirée d'un vrai personnage.
Est-ce une idée bien originale de la part de Pitof? Pas du tout.
C'est une commande de la maison de production Rigolo films 2000, un
projet qui trainait sur les tablettes depuis un bon bout de temps et
qu'une autre maison de production, Mandarin Films, pensait pouvoir adapter
elle aussi. Finalement, les deux films se sont joints pour le meilleur
et surtout pour le pire.
Donc, Vidocq (Gérard Depardieu), ce célèbre policier,
est tué au tout début du film par une mystérieuse
créature au masque miroir. Des gens importants sont foudroyés
et Vidocq décide de mener l'enquête afin de démasquer
l'étrange criminel. Une fois mort, un jeune journaliste (Guillaume
Canet) chargé d'écrire la biographie de son idole, prend
la relève et navigue entre les flashbacks des proches du défunt
tandis que la créature continue de faire des ravages.
Pour répondre à l'exigeante commande que représente
Vidocq, Pitof est allé choisir l'écrivain des
Rivières Pourpes, Monsieur Jean-Christophe Grangé.
Ce scénariste avoue sans honte avoir pris la même structure
que Citizen Kane, question de se donner un style. Le problème
est que sa fameuse histoire se ridiculise au fur et à mesure
que le film avance. On entre donc dans une histoire de trafique de vierges
par des hommes importants de Paris. Les clichés ne sont pas non
plus mis de côtés ici, s'inspirant à droite et à
gauche de différents thrillers populaires. On nous offre donc
du réchauffé, ou devrais-je plutôt dire du surchauffé.
Les dialogues manquent d'originalité. Ils sont écrits
sous une formule répétitive. On nous sert au moins quatre
fois: «T'est pas de taille petit!». Ici c'est le pif de
Depardieu qui mène l'enquête. Si cet acteur livrait autrefois
des performances dignes de sa réputation, on lui excusera d'avoir
été dirigé par Pitof et de donc nous offrir beaucoup
moins qu'on attend de lui. Même chose pour Canet qui est à
un niveau zéro de charisme, incapable de soutenir le rôle
principal. On se serait bien contenté que Pitof invente un logiciel
pour améliorer les performances d'acteurs. Les effets spéciaux,
pilliers du film, sont parfois bien réussis, mais souvent dans
le même plan on remarque une texture bien trop artificielle, un
mouvement saccadé, un manque assez grossier de réalisme,
un flou absent. Tout pour nuire à la qualité de «l'œuvre».
Mais ce qui horrifie au plus haut point, c'est la réalisation
de Pitof. Probablement l'un des pires réalisateurs français
depuis longtemps. Rien ne se tient dans Vidocq. On nous fout
des gros plans inutiles un peu partout sans présenter les lieux.
Les mouvements de caméra sont secs, créés par ordinateur.
Puis, le tout est extraordinairement mal cadré, ne voir que le
nez, plein écran, de Gérard Depardieu ça apporte
quoi comme valeur artistique au film? On sent que le réalisateur
veut nous faire frissonner, mais il échoue lamentablement en
transformant des scènes d'horreur en excellentes scènes
de comédie. La musique, oh horreur, soutient bien le film étant
vraiment pompeuse et instable. On passe d'un thème fortement
inspiré de Batman à du métal anglais.
Triste coïncidence que le compositeur Bruno Coulais ait aussi travaillé
sur Belphegor, un autre flop au box-office mettant en vedette
une créature masquée.
Finalement, tout ce qu'on pourrait dire de positif sur Vidocq,
c'est qu'il à marqué l'histoire. Non pas parce qu'il est
exécrablement mauvais, mais parce que c'est le premier film tourné
entièrement en numérique, doublant George Lucas avec Star
Wars. Voilà donc un étrange paradoxe : un pas en
avant pour le cinéma et un pas en arrière pour une France
qui s'américanise de plus en plus.
Donc, si vous aimez le numérique français, je vous conseille
vivement Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain qui en
contient lui aussi.
Version française : -
Scénario :
Jean-Christophe Grangé, Pitof
Distribution :
Gérard Depardieu, Guillaume Canet, Inés
Sastre, André Dussolier
Durée :
100 minutes
Origine :
France
Publiée le :
14 Juillet 2003