UNDERWORLD (2003)
Len Wiseman
Par Louis-Jérôme Cloutier
Chaque année amène son flot de films que l’on a
vite oubliés quelques mois plus tard. Étant dans une époque
où la mode du junk règne en maitre dans la société,
cette façon de vivre transpire dans nos productions cinématographiques.
Le vidéo clip de 120 minutes a souvent permis d’amasser
d’énormes sommes; est-il utile de rappeler qu’on
ne change pas une formule gagnante? Et nous voilà reparti avec
un nouveau produit de consommation. Underworld se présente
comme un mélange de The Matrix et de Blade.
Rien de mieux que de capitaliser sur des films ayant une recette éprouvée
n'est-ce pas? Si un trou noir est la chose la plus vide que l’on
peut rencontrer dans l’univers, le parallèle avec Underworld
est tout à fait sensé. On suit avec ennui une histoire
sans intérêt en espérant tant bien que mal que les
120 minutes s’achèvent.
Bien entendu, Underworld a tout pour plaire au grand public.
Belle héroïne, histoire d’amour entre deux personnages
issus de mondes différents, de la bonne violence, des effets
spéciaux, des scènes de fusillades. Bref, certains ne
peuvent espérer mieux. Qu’en est-il de celui qui recherche
un produit pouvant le divertir d’une façon originale? Il
sera profondément ennuyé par Underworld. C’est
ce qui est arrivé à votre humble auteur. Dès les
premières minutes, on sent que l’on va devoir visionner
un film que l’on déteste déjà. Mais en fait,
le film lui-même n’est pas si mauvais, c’est qu’il
a été précédé d’au moins 500
autres lui ressemblant. Qui en veut encore? Pas moi, j’ai eu ma
dose depuis fort longtemps. On tente d’exploiter des clichés
avec de l’énergie et rendre le tout percutant, mais le
réalisateur traite son film de manière si superficielle
qu’il oublie de susciter l’intérêt. Mélangé
avec un mauvais montage, on se sent un peu perdu. Les oreilles bourdonnent
au son de la musique heavy métal qui hurle et des balles tirées.
Vide, vide, vide, vide. Tout dans ce produit est vide. Il se compare
facilement à un animal mort que l’on observe sur le bord
de la rue. Il y en a toujours pour apprécier ce genre de spectacle,
d’autres auront vite fait de passer leur chemin, imaginez devoir
endurer le tout durant deux heures.
C’est le compagnon de vie de Kate Beckinsale, Len Wiseman qui
signe ici sa première réalisation qui ne restera sûrement
pas dans les annales. Il devrait néanmoins avoir de bonnes chances
de se dénicher un emploi chez Jerry Bruckheimer. Au moins, on
peut féliciter ceux qui se sont chargés des aspects plus
artistiques du film. L’ambiance constamment sombre conjuguée
avec des couleurs oscillant toujours dans le bleu et le noir donne un
cachet assez intéressant. Dark City semble avoir réussi
à influencer les artisans de cette production. Concernant les
trucages, ils sont bien réussis dans la plupart des cas, dont
la transformation homme-lycan qui mérite une main d’applaudissement.
Le contraire s’applique au jeu des acteurs qui amène nécessairement
un questionnement sur la façon dont Wiseman les a dirigées.
Est-ce que le mot «nuance» a été évoqué
durant le tournage? Difficile à dire. Mais si Kate Beckinsale
a durant tout le film la même expression faciale, il y a nécessairement
anguille sous roche. Remarquez que ce genre de spectacle se préoccupe
rarement de la performance des comédiens qui sont surtout des
pantins. Kate Beckinsale est une belle femme qui arrive à donner
un look particulier à son personnage, sa performance est donc
principalement physique. Le reste des acteurs ne mérite aucune
attention due à leur développement inexistant. Il y a
bien un niveau dramatique qui essaie vainement d’éveiller
notre attention et apporter un attachement envers les protagonistes,
mais comment ouvrir les yeux sur un aspect dont on a deviné les
moindres aboutissements 15 minutes plus tôt?
Évitez d’aller voir Underworld, ou plutôt,
allez le voir pour ensuite venir soit m’approuver ou me détester.
Je ne peux tout simplement plus accepter ce genre de film quand on sait
que Hollywood peut aisémement servir des blockbusters très
intéressants. McDonald commence à décliner dans
le monde, en sera-t-il de même pour son penchant cinématographique?
L’été 2003 a démontré pour une première
fois que le public en avait peut-être assez de voir sans arrêt
la même chose en boucle. Y a-t-il quelqu’un dans les têtes
dirigeantes qui a entendu le message ? Peut-être que oui, peut-être
que non. Seul le temps pourra nous fournir la réponse. En attendant
de le savoir, oublions Underworld et penchons-nous sur ce que les États-Unis
peuvent faire de mieux en matière de cinéma.
Version française :
Monde infernal
Scénario :
Kevin Grevioux, Len Wiseman
Distribution :
Kate Beckinsale, Scott Speedman, Michael Sheen,
Shane Brolly
Durée :
121 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
22 Septembre 2003