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THE TROPICS OF LOVE (2004)
Pall Jenkins
Matthew Hoyt

Par Jean-François Vandeuren

Un long-métrage basé sur le quatrième album du groupe américain The Black Heart Procession n’est pas ce que l’on pourrait appeler l’initiative la plus inattendue ayant émané du tandem artistique alliant cinéma et musique. Il faut dire que depuis leur troisième effort simplement intitulé Three, la formation originaire de San Diego s’est enivrée d’une formule musicale manipulée avec aisance aux abords d’allures souvent cinématographiques. Sur Amore Del Tropico, le groupe s’est permis de pousser l’audace un peu plus loin en y développant une mise en scène suivant un fil conducteur, nous racontant cette étrange histoire d’amour et de meurtre en y dévoilant les attraits d’un film noir dirigé par une musique suivant un style influencé de rythmiques de cabaret et d’un rock macabre rappelant parfois certaines sonorités de Pink Floyd. Même s’il ne faut tout de même pas s’attendre à une œuvre aussi sensationnelle que The Wall d’Alan Parker, The Tropics of Love propose néanmoins une mise en images qui tient compte de l’esprit d’un vidéo clip tout en conservant des bases propres au cinéma.

C’est donc au fil des quelques quinze pistes de l’album Amore Del Tropico et entre lesquelles viennent se placer une série d’intermèdes muets que The Tropics of Love nous dévoile ses mystères sans faire appel à l’ombre d’un dialogue. De ce point de vue, il s’agit d’une réussite assez admirable alors que le film parvient à utiliser à bon escient le potentiel d’une narration imagée et chantée afin de construire sous nos yeux un récit qui se tient debout. S’y dévoile du même coup un hommage de bon gout aux vieux films policiers des années quarante par le biais notamment des décors et des costumes, en plus de plusieurs influences tirées du cinéma de David Lynch et des films de série B, et même de quelques brefs clins d’œil à une scène de Pulp Fiction.

Au cœur du projet, on retrouve l’une des figures de proues du groupe, le chanteur et multi-instrumentaliste Pall Jenkins, qui assure les commandes de la plupart des enjeux de cette production faisant part autant d’idées bien entamées que de certains accrochages plutôt agaçants. Le problème majeur dans la première partie de The Tropics of Love est que l’arrière-plan musicale détonne beaucoup trop des évènements se déroulant à l’écran, défaut surtout attribuable à une réalisation et un montage manquant de dynamisme. Par ailleurs, l’idée d’insérer le groupe, et particulièrement le chanteur, à certains moments du film n’est pas vraiment mauvaise plus qu’elle est mal introduite au départ. Mais le plus étrange dans tout cela, c’est que tous les ratés de la première moitié de l'essai, qui connait tout de même sa part de bons moments, semblent se régler d’un seul coup dès le début de la deuxième où tout se déroule enfin correctement. Comme si les chaines retenant la production de véritablement prendre son envol venait tout juste de se briser. Le film de Pall Jenkins et Matthew Hoyt offre par la suite une assurance que l’on espérait plus, le mélange musical se fondant alors parfaitement aux différents segments et un rythme peut donc enfin s’installer.

En définitive, The Black Heart Procession nous offre un film qui en soi fait plutôt amateur visuellement parlant. Disons que l'essai aurait bénéficié grandement d’une photographie plus soignée. L’effort est néanmoins alimenté de divers concepts fort intéressants, mais introduit de manière inégale ou tardive. Il n’aurait fallu en fait que la première demi soit aussi bien agencée que la deuxième pour en faire un film totalement convaincant. The Tropics of Love mérite malgré tout qu’on y jette un coup d’œil, et ce particulièrement pour n’importe quel fan du groupe et de l’album Amore Del Tropico. Un film qui ne possède malheureusement pas la stature d’une œuvre culte, mais qui demeure tout de même un ajout sympathique fait sans prétention à cette expérience symbiotique entre la musique et du cinéma.




Version française : -
Scénario : Pall Jenkins, Matthew Hoyt
Distribution : Roman Dmitri Dziensuwski, Traci Woolley, Matthew Hoyt
Durée : 70 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 15 Février 2005