THE TEXAS CHAINSAW MASSACRE (1974)
Tobe Hooper
Par Jean-François Vandeuren
Les années 1970 seront surement associées à un
tournant assez drastique au cinéma en ce qui concerne le genre
horreur. En à peine dix ans, les artisans auront laissé
de côté les films de monstres classiques et de série
Z pour aller vers quelque chose de beaucoup plus représentatif,
réaliste et par la même occasion, de beaucoup plus troublant.
Un an plutôt, on avait droit à un des premiers élan
à l’avant-scène de ce changement avec le classique
The Exorcist. Et en 1974, le réalisateur Tobe Hooper
lançait sa carrière en amenant une autre histoire étrange
basée sur des faits véridiques dans ce qui deviendrait
l’un des films les plus perturbant de l’histoire. Bienvenue
au milieu de nul part dans le cauchemar fatal d’un groupe d’amis.
Basé sur ce qui est considéré comme l’un
des crimes les plus étranges de l’histoire des États-Unis,
The Texas Chainsaw Massacre relate une adaptation fictive tournant
autour d’un groupe d’adolescents se rendant dans un coin
isolé du Texas, dans un cimetière vandalisé pour
vérifier si la tombe du grand-père d’une des jeunes
filles n’aurait pas été profanée. Rencontrant
personnages étranges et tombant en panne d’essence, ils
s’aventureront un à un bien malgré eux vers une
étrange maison susceptible de pouvoir les dépanner. L’horreur
commence ici.
Tout le monde a déjà entendu parler du film ou simplement
entendu les mots «massacre à la tronçonneuse»
au moins une fois dans sa vie. Film mythique pas toujours disponible
dans les clubs vidéo normaux, du moins pour ce qui est de l’original,
et qui ne jouit pas nécessairement d’une bonne réputation.
Pourtant, cela devrait être tout le contraire. On est bien loin
de Jason Voorhees et de la caricature pitoyable des films d'horreur
des années 80. Il s’agit ici au contraire d’un long-métrage
qui ne tombe pas dans l’utilisation des litres de sang, mais qui
s'aventure plutôt avec brio dans l'exploitation de la suggestion
et du symbolisme détraqué qui a de quoi de beaucoup plus
inquiétant et effrayant. Car il faut bien l’avouer, la
plupart du temps, les films d’horreur, particulièrement
les slashers, ne sont réellement bon qu’à
nous faire rire un bon coup tellement on tombe rapidement dans l’excès
et la stupidité. Pas dans ce cas-ci. Hooper a réussi à
créer un opus vraiment dérangeant. Une des scènes
les plus percutantes du film nous confronte tout simplement à
un Leatherface visiblement songeur totalement passif assis sur une chaise
faisant face à la caméra. On ne peut que se demander à
quoi et comment un tel fou peut bien penser. Une scène tout simplement
remarquable. Malgré le fait qu'il s'agisse d'un film où
le récit est raconté en deux temps, il était primordial
que la démonstration de la psychologie de cette famille cannibale
ne soit pas mise de côté. Encore une fois, mission accomplie.
Hooper y est allé avec un humour d'une noirceur ahurissante pour
arriver à un résultat des plus convaincants. S’en
suit du même coup un affrontement significatif pour l’époque
entre une famille traditionnelle où les fondements se transmettent
de père en fils et une jeunesse prenant plaisir à s’écarter
des traditions.
En son genre, la technique de Hooper se veut un véritable tour
de force dans la façon dont il organise avec justesse l’ensemble
de ses éléments. Son approche de type documentaire s’avère
être des plus appropriées et le réalisateur maitrise
celle-ci avec ingéniosité tout en réussissant à
maintenir un pont avec le surréalisme. Mais l’élément
le plus mémorable du film demeure le son. Côté musique,
on a droit à une panoplie d’échantillonnages de
distorsions qui créent d’une manière sophistiquée
et extrêmement bien soutenue une ambiance macabre à faire
rêver, ou frissonner. Impossible de passer sous silence le son
unique au film du flash de l'appareil photo durant l'introduction. On
utilise également cet élément à des fins
suggestives car il faut aussi dire qu’en ce qui concerne la tronçonneuse,
on l’entend beaucoup plus qu’on la voit. Un travail colossal
au niveau du montage sonore.
Probablement un des films les plus bizarres et prenant du genre qu’il
est possible de voir. Il s’agit du type de spectacle par rapport
auquel en bout de ligne il est intéressant de s’asseoir,
reprendre son souffle et d’en discuter. Il ne faut pas se le cacher:
il est loin d’être impossible que dans des villes perdues
au milieu de nul part où la vie est d'une monotonie déconcertante,
on puisse tomber sur des pratiques plutôt douteuses pouvant mener
à des histoires aussi horrifiantes. Reste à voir si la
nouvelle version saura rendre justice à un film faisant l’objet
d’un véritable culte. Marquant.
Version française :
Massacre à la tronçonneuse
Scénario :
Kim Henkel, Tobe Hooper
Distribution :
Marilyn Burns, Allen Danziger, Paul A. Partain,
William Vail
Durée :
83 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
19 Octobre 2003