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THE TERMINAL (2004)
Steven Spielberg

Par Alexandre Fontaine Rousseau

Alors qu'un nouveau film de Steven Spielberg était jusqu'à tout récemment à tout le moins un évènement populaire imposant, son étoile semble faiblir d'année en année dans le firmament hollywoodien. Le temps des Close Encounter of the Third Kind, Jaws et Raiders of the Lost Ark est bel et bien révolu. L'Américain semblait tout de même avoir repris le contrôle de sa carrière, suite à cette anomalie sympathique que fut A.I. au sein de sa filmographie, grâce à la sortie de divertissements grand public fort bien ficelés tels que Catch Me If You Can et Minority Report. The Terminal, cependant, sera un choc pour quiconque croyait en l'existence d'un certain standard de qualité Spielberg. Il s'agit ici d'un film plus que fade, une sorte de grosse bouillie indigeste réunissant en un même plat tous ces défauts que le réalisateur arrive habituellement à tenir en marge de ses projets. À la manière du pire des repas d'avion, le Spielberg nouveau ne goutte rien et finit par tomber sur le coeur, tant et si bien que l'on finit même par regretter à mi-chemin d'avoir accepté de le consommer.

Si le réalisateur disait explorer avec Minority Report la face obscure de sa personnalité, il plonge à pieds joints dans les différents tons de rose bonbon avec The Terminal. Médiocre comédie romantique ciblée pour le marché des 40 à 45 ans, le film se démarque surtout par le manque terrible de subtilité dont fait preuve Spielberg en ce qui a trait à l'intégration de la publicité à l'évolution même de son récit. Le placement de produits Burger King et Hugo Boss est si vulgaire et évident que c'en est presque insultant. Le réalisateur se serait-il trouvé une nouvelle vocation depuis son dernier thriller de science-fiction qui abusait lui aussi de ce genre de techniques? Cela dit, c'est surtout le manque total d'intérêt que provoque chez le spectateur cette histoire d'immigration internationale ainsi que cette sauce infecte dont Spielberg nappe le tout, un mélange écoeurant de sentimentalisme niais et de patriotisme naïf, qui font de The Terminal un si mauvais film.

C'est à peine si on arrive à combattre le sommeil durant les deux heures que durent celui-ci tant il semble ne rien s'y passer. Une fois le pauvre Viktor Navorski (Tom Hanks) immobilisé dans un aéroport de New York suite à un changement de régime dans son pays, le calme plat s'instaure pour deux longues heures où Spielberg tente de nous vendre les merveilles du melting-pot américain en donnant à des Indiens et à des hispanophones des emplois mal payés d'éboueurs et de concierges. Alors qu'un Tom Hanks à son moins subtil, ce qui dit absolument tout, joue avec un chef de la sécurité incapable de sentiments (Stanley Tucci), voici que l'on s'évertue à nous dire, mot pour mot dans le texte, que l'Amérique est fondée sur la compassion. C'est on ne peut plus lourd et maladroit.

Or, Spielberg réussit à intégrer à cette morne comédie non pas une mais deux histoires d'amour d'une crédibilité si déficiente que l'on en vient à se demander comment des scénaristes professionnels ont pu les laisser passer. Le seul dont le travail demeure irréprochable est le directeur de la photographie Janusz Kaminski, aussi appliqué qu'à l'habitude. Cela dit, son apport à l'ensemble n'est jamais assez inspiré pour sauver le spectateur de la léthargie totale. Il faut dire qu'il n'y a rien d'inspirant à éclairer des panneaux publicitaires et de petits commerces d'aéroport durant tout un film. Tout, du décor sans intérêt dont nous sommes prisonniers durant deux heures jusqu'aux personnages paresseusement esquissés, trahit la terrible banalité du projet.

Si la subtilité n'a jamais été le fort de Spielberg, son cinéma en est un, règle générale, d'une efficacité remarquable. The Terminal n'est pas même digne de cette mention tant son rythme lassant et son manque total de rebondissements l'empêchent de stimuler le spectateur au moindre des niveaux. Jouant la carte de la mièvrerie inoffensive pour nous servir une vision de l'Amérique aussi idéalisée qu'elle est mensongère, The Terminal s'avère peut-être le pire film de Steven Spielberg à ce jour. C'est du moins tout sauf un bon petit divertissement léger.




Version française : Le Terminal
Scénario : Sacha Gervasi, Jeff Nathanson
Distribution : Tom Hanks, Catherine Zeta-Jones, Stanley Tucci, Chi McBride
Durée : 128 minutes
Origine : États-Unis

Publiée le : 7 Février 2005