THE SHAPE OF THINGS (2003)
Neil LaBute
Par Louis-Jérôme Cloutier
Neil LaBute a toujours aimé traiter les relations hommes/femmes
cruellement. Son exposé de ce phénomène naturel
se poursuit de plus belle dans cette adaptation de sa propre pièce
de théâtre. L’amour y est traité de façon
corrosive et aucune chanson joyeuse ne joue à la fin du film.
LaBute semble avoir un malin plaisir a montrer les plus mauvais côtés
de la romance et ne peut s’empêcher d’exposer ses
idées directement et froidement au spectateur. The Shape
Of Things est donc déconseillé à tous les
amoureux désirant regarder un film ensemble, votre vision du
couple pourrait en être affectée.
Un jour, dans un musée, Adam rencontre Evelyne et c’est
le début d’une relation houleuse entre eux à laquelle
se mêlent les amitiés. Le titre du film est bien choisi
pour signifier que malgré tout ce que l’on peut dire, la
forme des choses reste ce qui accroche et intéresse le plus l’oeil
humain. On peut faire des parallèles avec d’autres éléments
que l’amour. On choisit toujours ce qu’il y a de plus beau
et la recherche de la perfection est devenue une base fondamentale de
nos sociétés occidentales. LaBute nous le démontre
dans la relation entre une femme et un homme. Ce qui risque de dérouter
les spectateurs, c’est que malgré la morale qui nous amène
a tenter de rejeter la recherche de la perfection, on ne peut s’empêcher
de vouloir y accéder. C’est peut-être là le
but de LaBute. Dans le film, ce qui semble être à première
vue une histoire romantique, tourne assez rapidement en un jeu de manipulation
psychologique qui vient même jouer avec les convictions du spectateur.
En plus, bien que la femme soit ici la tentatrice et la cause du mal,
toutes les personnes possèdent leurs défauts, y compris
celui qui pourrait être considéré comme le héros.
Il se laisse aisément influencer et manipuler par sa nouvelle
compagne qui devient sa raison de vivre. C’est un phénomène
qui se déroule souvent dans notre entourage : une personne laisse
tomber ce qu’elle est et son identité pour plaire à
quelqu’un. Si des réticences apparaissent au début,
la personne devient elle-même convaincue que les changements sont
pour le mieux. Et c’est ce que le spectateur peut se dire avant
que l’on ne découvre la fin qui, malheureusement, est très
prévisible si l’on a vu la bande-annonce.
Évidemment, comme le film est tiré d’une pièce
de théâtre, il faut s’habituer à beaucoup
de répétitions dans les décors peu nombreux. Les
personnages ne bougent pas d’un endroit à l’autre.
On n’a qu’à penser à Glengarry Glen Ross
ou Le Dîner de Cons pour se donner une idée de
l’effet. Heureusement, LaBute conserve l’intérêt
grâce à son talent de scénariste. Même s’il
y a peut-être certaines répétitions, l’histoire
se développe aussi bien que les personnages. LaBute est un réalisateur
de talent et j’ai beaucoup apprécié une scène
en particulier qui montrait de façon simple la dualité
du personnage principal. Le réalisateur intègre une morale
dans son histoire, ou plutôt, une réflexion tournant autour
des relations amoureuses, bien sûr, mais aussi de l’art,
qui occupe une place prédominante dans le récit. Les acteurs
sont bien habitués à jouer leur rôle et le reprennent
à la perfection. Mention spéciale à Rachel Weisz
qui arrive même à berner les auditeurs par son jeu.
Il est bon de voir parfois un film qui pourrait paraitre au départ
romantique se transformer en une vision cynique et cruelle des relations
humaines. Il fait également plaisir de voir LaBute terminer froidement
son film de façon directe et solide. Le happy ending
aurait certainement gâché tout l’exercice et le but
de l’ouvrage. The Shape Of Things est donc une belle
surprise à découvrir.
Version française :
La Forme des choses
Scénario :
Neil LaBute
Distribution :
Gretchen Mol, Paul Rudd, Rachel Weisz, Fred Weller
Durée :
96 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
10 Janvier 2004