SCHINDLER'S LIST (1993)
Steven Spielberg
Par Louis-Jérôme Cloutier
Si Steven Spielberg n’a jamais été un réalisateur
ayant une seule fois véritablement bouleversé le septième
art, reste que c’est un maitre incontournable du divertissement
intelligent. On pense à Indiana Jones, on pense à
Jaws ou encore à Jurassic Park. Mais Spielberg
s’est attaqué, au début des années 90, à
son projet le plus ambitieux, le plus sérieux, celui qui pouvait
démontrer sa capacité à aller au-dessus de ses
propres limites. Que ce film soit Schindler's List est tout
à fait logique, étant lui-même Juif, Spielberg à
toujours accordé de l’importance à la Seconde Guerre
mondiale, et l’holocauste est un sujet qui a engendré de
grandes œuvres vu la richesse de son potentiel dramatique. Entouré
de ses plus proches collaborateurs, dont John Williams, Janusz Kaminski
et Micheal Kahn, et d’une solide distribution comprenant Liam
Neeson, Ben Kingsley et Ralph Fiennes, Spielberg a réalisé
un film qui trône en 6e positions parmi les 250 meilleurs films
jamais faits selon le site IMDB et qui a remporté 7 Oscars. Qu’en
est-il vraiment?
Il est difficile de parler de Schindler's List sans parler
du fait qu’il s’agit d’un film très surévalué
par à peu près toutes les sphères de la société.
S’il s’agit d’un très bon film, on est extrêmement
loin d’être en face d’une œuvre aussi magistrale
que l’on pourrait être porté à croire. Bien
évidemment, on comprend aisément que Speilberg ait pu
récolter autant de sympathie parmi l’Academy of Motion
Picture Arts and Sciences, ne serait-ce que par le sujet traité.
Mais laissons de côté ces considérations et traitons
donc plus directement du film. Tourné presque entièrement
en noir et blanc, Schindler's List bénéficie
du travail toujours aussi solide du directeur photo Janusz Kaminski.
Visuellement, Spielberg n’a aucune difficulté à
offrir un film esthétiquement réussi et offre une réalisation
tout à fait correct, mais sans plus. En plus, grâce à
une distribution de grande qualité, l’interprétation
est réussie même si le scénario limite passablement
la possibilité des acteurs d’offrir un jeu dramatique véritablement
touchant.
Plus précisément, un aspect un peu décevant se
retrouve dans la présentation du personnage d’Oskar Schindler,
cet homme qui, ayant d’abord trouvé une excellente opportunité
d’affaires, s’est transformé en un humaniste sauvant
la vie de milliers de personnes. En fait, le scénario de Stevne
Zaillian ne laisse que peu de place à son développement
malgré l’importance capitale qu’il possède
dans le cœur du récit. Ainsi donc, on ressent une certaine
difficulté à saisir ses pensées et ses actions.
Heureusement, Liam Neeson offre une performance en finesse et fait progresser
son personnage de façon bien maitrisée. Du même
coup, la scène la plus dramatique du film est lorsque Schindler,
rongé de remords, songe à ce qu’il aurait pu faire
de plus pour sauver d’autres vies, une scène qui bénéficie
du talent de Neeson. Mais il est évident que Schindler's
List est avant tout un portrait très réaliste de
l’holocauste, et c’est ce qui le rend aussi touchant. D’une
violence assez marquée pour un film de Spielberg, on a droit
à une leçon d’histoire qui permet de bien comprendre
la dynamique de l’holocauste, et surtout toute sa folie. Celle-ci
est souvent exprimée par le personnage de Ralph Fiennes qui tout
en étant bien interprété, manque cruellement de
profondeur pour devenir un symbole vraiment marquant de la dualité
de l’homme, de son penchant pour le mal.
Bref, sans être aussi magistral que sa réputation l’affirme,
Schindler's List s’inscrit dans les meilleurs films de
Steven Speilberg et se veut un portrait très réussi de
l’holocauste et de l’horreur qui en découle. En laissant
tomber le développement des personnages et en mettant l’accent
sur une reconstitution d’évènements, le film ne
parvient malheureusement pas à s’élever suffisamment
pour être un véritable chef-d’œuvre. Une excellente
leçon d’histoire aux aspects techniques très réussis,
mais au caractère plutôt anecdotique.
Version française :
La Liste de Schindler
Scénario :
Steven Zaillian, Thomas Keneally (livre)
Distribution :
Liam Neeson, Ralph Fiennes, Ben Kingsley
Durée :
197 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
17 Novembre 2004