SAVING PRIVATE RYAN (1998)
Steven Spielberg
Par Louis-Jérôme Cloutier
Le débarquement de Normandie fut sans doute l’une des plus
imposantes opérations militaires jamais tentées. Des millions
de soldats envahirent les plages sous le feu nourri de l’ennemi.
Même si le D-Day a fait l’objet de plusieurs films dont
le célèbre The Longest Day, aucun n’avait
réussi à le reconstruire de façon réaliste.
Steven Spielberg s’est donc mis à la tâche accompagnée
d’un scénario qui évoque la quête d’une
dizaine de soldats qui doivent tout risquer pour en retrouver un seul.
Acclamé comme un des meilleurs films de guerre jamais tournée,
il convient de remettre les pendules à l’heure même
s’il demeure un film de grande qualité.
Saving Private Ryan débute par une des séquences
les plus impressionnantes jamais vues dans un film de guerre : le débarquement
de Normandie. Beaucoup d’encre a coulé à propos
de cette scène, et ce, pour diverses raisons. D’abord,
elle contient une violence terriblement réaliste qui nous fait
bien voir toute l’horreur de la guerre. De plus, Steven Spielberg
a donné tout son talent afin de livrer une reconstitution quasi
parfaite. Ainsi, la caméra est bousculée dans chaque direction
et va même sous l’eau en suivant les soldats, les balles
sifflent dans tous les sens, des corps explosent sur les mines. Bref,
il s’agit ni plus ni moins d’un concentré de 15 minutes
de Black Hawk Down. Comme pour Full Metal Jacket,
l’introduction de Saving Private Ryan constitue la meilleure
partie du film. Le reste, tout en étant moins réussi,
reste admirable. D’abord, possédant un bon budget, Spielberg
s’est assuré de créer un film sans tache d’un
point de vue esthétique. Son travail de réalisateur est
excellent même s’il ne peut rivaliser avec les Coppola et
Kubrick et la direction photo de Kaminski est tout simplement superbe.
L’idée de donner un aspect plus ancien au film en accentuant
les grains donne un très bon résultat et le format d’image
permet d’accentuer le réalisme en donnant un aspect un
peu documentaire. Le travail des acteurs avec Tom Hawks en tête
est tout à fait correct. Mention honorable à Jeremy Davis
pour sa composition rappelant la plupart de ses autres rôles,
mais qui permet quand même de le détacher du lot.
Mais si Saving Private Ryan ne peut se permettre d’être
dans la même catégorie qu’Apocalypse Now,
le scénario est la principale raison. En fait, l’histoire
est loin d’être des plus passionnantes; la quête dans
le but de retrouver un seul soldat laisse plutôt indifférent.
L’histoire se compose donc de plusieurs évènements
anecdotiques tout de même très réussis. Il est seulement
dommage que la trame principale soit si peu originale. De plus, même
si Saving Private Ryan traite de la folie de la guerre, ne
serait-ce que par la qualité de sa reconstitution, il reste que
l’on n’explore pas avec suffisamment de profondeur la psychologie
des combattants. Le film fait pâle figure face à The
Thin Red Line. Spielberg n’a donc pu que transmettre certaines
idées à travers les images laissant des manques dans le
scénario.
Ne reste pas moins que Saving Private Ryan est un très
bon film de guerre avec une impressionnante séquence d’ouverture.
La reconstitution historique est parfaite et les acteurs jouent avec
convictions. Il n’est que dommage que le scénario manque
d’originalité et qu’il n’explore pas plus profondément
toutes les possibilités au niveau philosophique et psychologique
qu’amène le sujet. De plus, le tout est légèrement
trop porté vers le patriotisme, la caméra fixée
sur le drapeau américain risque de vous faire lever les yeux
vers le ciel. Spielberg semble oublier le mot mondial dans l’expression
Seconde Guerre mondiale. Ainsi, les soldats d’autres nationalités
sont presque entièrement mis de côté. Ne reste qu’un
propos très édifiant sur le courage des soldats américains
face à un ennemi nécessairement mauvais, est-il nécessaire
de mentionner que Robert Rodat a également signé The
Patriot? Un très bon film de guerre, mais à quelques
échelons des meilleurs du genre.
Version française :
Il faut sauver le soldat Ryan
Scénario :
Robert Rodat
Distribution :
Tom Hanks, Edward Burns, Tom Sizemore, Matt Damon
Durée :
170 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
26 Juillet 2004