RUN FATBOY RUN (2007)
David Schwimmer
Par Jean-François Vandeuren
Le jour de son mariage, Dennis (Simon Pegg) quitta brusquement la cérémonie
pour ne pas avoir à faire face à ses nouvelles responsabilités,
laissant en plan sa fiancée Libby (Thandie Newton), alors enceinte
de leur premier enfant. Cinq ans plus tard, Dennis est toujours célibataire
et entretient comme il peut son petit traintrain quotidien à
titre de gardien de sécurité dans une boutique de lingerie
féminine. De son côté, Libby fréquente depuis
peu un homme d’affaire américain (Hank Azaria) qui semble
bien déterminé à faire sa place dans la vie de
la jeune mère et de son garçon. Le grand gaillard a évidemment
tout du parfait prétendant : gentil, attentionné, athlétique
et plein aux as. Apprenant que ce dernier prendra bientôt part
au marathon de Londres pour le bénéfice d’une oeuvre
caritative, Dennis décidera d’imiter son nouveau rival
afin de prouver à Libby qu’il est encore capable de se
prendre en main et de mener ses projets à terme. Se trouvant
dans une forme physique pour le moins pitoyable, l’aspirant coureur
recevra heureusement l’aide de son bon ami Gordon (Dylan Moran)
qui, après avoir parié une importante somme d’argent
sur la réussite de Dennis, soumettra ce dernier à une
diète et un entrainement des plus rigoureux. Bien entendu, notre
héros assoiffé de changement devra également passer
à travers une série d’épreuves personnelles
qui l’amèneront à remettre en question les motifs
mêmes de sa participation à un tel événement.
Si les rouages de la comédie romantique n’ont plus vraiment
de secret pour personne, quelques rares bijoux réussissent tout
de même à s’illustrer chaque année parmi le
nombre effarant de productions anonymes aboutissant sur les écrans
grâce à l’inventivité de leur scénario
et/ou l’intelligence de leur mise en scène. Il était
donc intéressant de voir ce que le Britannique Simon Pegg et
son coscénariste Michael Ian Black allaient bien pouvoir concocter
à partir d’une formule à laquelle une quantité
incalculable de cinéastes s’étaient si témérairement
attaqués au cours des dernières années. Surtout
que le comédien pouvait jusqu’alors se vanter d’avoir
participé à la création de deux des comédies
les plus jouissives de la présente décennie. Malheureusement,
plutôt que de s’amuser à nouveau aux dépends
des nombreuses règles et conventions du genre, le comédien
et son acolyte ne se contentent ici que de les suivre à la lettre.
Nous ne retrouvons ainsi dans le présent effort qu’une
infime partie de l’ingéniosité et du mordant d’un
Simon Pegg qui a visiblement voulu arpenter un terrain beaucoup moins
sinueux sans avoir l’inspiration nécessaire pour en sortir
une oeuvre de marque comme il avait su le faire précédemment
pour la comédie d’horreur et le film policier avec son
compatriote Edgar Wright. Et ce n’est pourtant pas parce que le
scénario somme toute simplet de ce Run Fatboy Run ne
semble pas vouloir déroger au départ de cette prémisse
tout ce qu'il y a de plus bancale et de ses raccourcis narratifs souvent
peu crédibles pour laisser la place à un récit
un peu plus lucide et réaliste. Bien au contraire.
D’une part, les méthodes employées par le personnage
de Pegg pour arriver à ses fins n’ont en soi rien pour
véritablement changer la mentalité de qui que ce soit,
sinon la sienne. Il serait évidemment insensé que ce grand
gamin qui a toujours préféré fuir plutôt
que de faire face à ses responsabilités puisse reconquérir
le coeur de sa belle en ne participant qu’à un simple marathon.
Dans le même ordre d’idées, les deux scénaristes
semblaient également vouloir épargner la réputation
déjà peu enviable de l’inévitable personnage
du nouveau petit ami en caractérisant ce dernier d’un bel
humanisme plutôt que de chercher à le faire passer pour
le pire des salauds. Malheureusement toutes ces belles intentions sont
soudainement anéanties lors d’un dernier tiers au cours
duquel le duo tombe dans pratiquement tous les pièges qu’il
avait su si habilement éviter jusque-là. Mais même
si Run Fatboy Run finit par se transformer en un ramassis de
clichés on ne peut plus éculés, le parcours édifié
par David Schwimmer jusqu’à cet instant fatidique demeure
une expérience cinématographique certes inoffensive et
peu enrichissante, mais tout de même fort agréable en son
genre. L’enthousiasme et l’étonnant savoir-faire
dont fait preuve l’ancienne vedette de Friends pour son
second tour sur la chaise du réalisateur compense d’ailleurs
largement pour tout ce que les deux scénaristes ne parvinrent
jamais à accomplir sur papier. Le cinéaste n’a ainsi
aucune difficulté à insuffler suffisamment d’entrain
et d’énergie aux écrits de Simon Pegg et Michael
Ian Black pour proposer un tout efficace, à défaut d’être
réellement marquant.
Il faut dire que le réalisateur américain est aussi grandement
appuyé par le jeu extrêmement enjoué de ses comédiens
qui semblent tous avoir pris un réel plaisir à participer
au projet. Ainsi, si Simon Pegg ne s’illustre guère derrière
les touches de sa machine à écrire, la sincérité
et la candeur qu’il apporte à l’écran lui
permettent fort heureusement de sauver la mise à plus d’une
reprise. L’excellent duo comique qu’il forme avec Dylan
Moran, avec qui il partageait la vedette dans le génial Shaun
of the Dead, nous réserve d’ailleurs certains des
moments les plus savoureux du présent effort. Autrement, le film
de David Schwimmer ne se contente que de remâcher d’une
manière un peu trop mécanique cette bonne vieille histoire
du passage tardif à l’âge adulte d’un individus
pris de court par les événements avec tout ce que cela
implique en terme de prises de conscience et de bons sentiments. Et
si le présent récit nous est parfois raconté d’une
manière quelque peu naïve, le tout ne parait toutefois jamais
trop forcé, faisant de Run Fatboy Run une production
sympathique et facilement recommandable, même si son espérance
de vie auprès du spectateur ne risque pas de s’étendre
au-delà d’un simple visionnement. Le film de David Schwimmer
n’offre ainsi rien pour révolutionner le genre d’une
quelconque façon que ce soit ou pour nous faire constamment rire
aux éclats, mais il présente tout de même assez
de bonnes intentions pour justifier son existence, et nous faire passer
un bon moment.
Version française : -
Scénario : Simon Pegg, Michael Ian Black
Distribution : Simon Pegg, Thandie Newton, Hank Azaria, Dylan
Moran
Durée : 100 minutes
Origine : Royaume-Uni, États-Unis
Publiée le : 15 Avril 2008
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