RAMBO (2008)
Sylvester Stallone
Par Nicolas Krief
À son âge, Sylvester Stallone n’a plus rien à
perdre. Sa carrière, qui s’étend sur plus de 35
ans, est passée des plus hauts sommets hollywoodiens aux fossés
les plus creux du cinéma « straight to video ».
Il y a un an, l’Étalon italien revenait en force avec le
sixième volet de la grande saga du boxeur le plus populaire de
l’histoire du cinéma. Rocky Balboa était
un film simple, honnête et très efficace, à l’image
du premier de la série. Cette année, c’est son autre
personnage fétiche qui revient sur les écrans, John Rambo,
ex-militaire devenu dingue après un séjour au Viêt-Nam.
Après avoir affronté les autorités américaines
dans First Blood, ré-affronté les Vietnamiens
dans First Blood, Part II et combattu les Russes dans Rambo
III, c’est cette fois sur son nouveau territoire, l'Asie,
qu’il massacre ses ennemis. Rambo, gonflé au botox, vit
paisiblement en Thaïlande où il chasse le cobra […]
et pratique le très viril métier de forgeron. Après
avoir accompagné sur sa péniche (ou son kayak) un groupe
de missionnaires venus faire un peu de tourisme humanitaire dans un
village birman, il se joint à un groupe de mercenaires pour aller
secourir lesdits missionnaires, qui ont entretemps été
pris en otage par l’armée birmane.
Dans le dernier Rocky, qu’on peut presque considérer
comme un film autobiographique, Stallone combattait ses démons
intérieurs dans un ring et faisait un Clint Eastwood de lui-même
en nous montrant que même s’il est vieux, il est encore
tout à fait capable de quelques exploits. Dans son nouveau Rambo,
il fait exactement la même chose, remplaçant le charme
ravageur de Rocky par la brutalité meurtrière de John.
Sly fait preuve d’un savoir faire étonnant avec sa mise
en scène; malgré les séquences d’une violence
inouïe, qui frôlent parfois le désagréable,
l’efficacité de sa réalisation arrive à nous
faire oublier la piètre qualité des deux Rambo
précédents. La direction photo, le bruitage, le montage
et le sens de «l’action» du réalisateur font
de Rambo 4 un film brutal qui n’a rien à envier
à un Saving Private Ryan, autant sur le plan formel
qu’idéologique. Combattre le feu par le feu, c’est
la pensée habituelle de Rambo; mais dans celui-ci, c’est
tellement gros et gras qu’on a du mal à prendre le tout
au sérieux. Il ne reste qu’à apprécier le
spectacle.
On pourrait facilement accuser Sly de jouer avec la nostalgie du bon
public nord-américain pour s’en mettre plein les poches,
ce qui n’est pas tout à fait faux. Alors que les studios
doivent négocier avec Bruce pour un nouveau Die Hard
ou Arnold pour un nouveau Terminator, Stallone a entrepris
cette démarche seul. Ne profitant que d’un appui partiel
de certains producteurs, il a tout de même réussi à
réunir l’argent nécessaire pour réaliser
un projet qui lui tenait à cœur. Réaliser, scénariser,
produire et jouer; on ne pourrait pas en demander autant à ce
vieux Arnold. Stallone le fait avec plus de fougue et de dynamisme que
n’importe quel autre homme de plus de 60 ans. Derrière
tous les coups de feu et le sang qui gicle, on sent chez ce vieux bonhomme
une certaine conscience humanitaire et un peu de compassion pour les
peuples opprimés.
Le héros national reprend du service avec force et conviction,
non pas sans quelques modifications corporelles, mais rempli d’un
désir de perfection peu commun chez les has-beens. Avec
en tout à peu près huit lignes de dialogues et 78 grognements,
on ne peut pas dire qu’il y a du Laurence Olivier dans notre Sly,
mais on lui accorde volontiers la palme du héros barbare et meurtrier
le plus sympathique. S’il devait choisir un moment pour se retirer
du show-business, aujourd’hui serait le bon temps, car il est
toujours préférable qu'un comeback ne s'étire
pas trop longtemps. Si, par contre, il y en a qui sont toujours intéressés,
sachez que son prochain projet est un film sur (attention tenez-vous
bien) Edgar Allan Poe, lequel devrait paraître vers la fin de
la décennie.
Version française :
Rambo
Scénario :
Art Monterastelli, Sylvester Stallone
Distribution :
Sylvester Stallone, Julie Benz, Matthew Marsden,
Graham McTavish
Durée :
91 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
13 Février 2008