LA PEAU BLANCHE (2004)
Daniel Roby
Par Alexandre Fontaine Rousseau
Si vous saviez comme ça me crève le coeur. L'idée
de devoir déconseiller fortement un film québécois
me frustre profondément. Mais qui aime bien châtie bien.
Si l'on commence à encenser n'importe quel sous-produit médiocre
du cinéma commercial américain sous prétexte qu'il
vient d'ici, notre cinéma national ne pourra jamais se développer
correctement. Il faut donc punir avant que la maladie ne se propage
et n'en vienne à corrompre l'ensemble de notre production. Thriller
surnaturel terriblement convenu et surtout ennuyeux empruntant la plupart
de ses trucs aux grosses productions américaines du genre sans
en avoir les moyens, La Peau blanche construit à partir
de l'éternelle combinaison de base jeunesse/sexe/sang une intrigue
vampirique de bas étage qui n'arrive jamais à lever.
Cette Peau blanche que l'on a réussi à vendre
dans plusieurs pays n'est pas coupable d'être pire que sa compétition,
mais tout bonnement d'exploiter une formule éculée dont
même le grand public commence à se lasser pour se tourner
vers des produits japonais qui s'avèrent être la fine pointe
de la mode dans ce domaine particulier. Le soir de la fête de
Thierry (Marc Paquet), son meilleur ami Henri (Frédéric
Pierre) décide de lui payer une virée dans un bordel question
de lui changer les idées. C'est que Thierry n'a pas eu de copine
dans les six derniers mois. Or, la soirée se termine mal lorsque
l'une des prostituées attaque sauvagement Henri avec l'intention
de le tuer. Quelque temps après ce drame, Thierry rencontre Claire
(Marianne Farley), une belle rousse dont il tombe éperdument
amoureux. Jusqu'au jour où il rencontre sa peu sympathique belle-famille
et y reconnaisse parmi les soeurs de Claire l'assaillante d'Henri (Jessica
Malka).
Malheureusement, cette histoire banale ne lève jamais même
lorsque le réalisateur révèle en fin de parcours
le secret de polichinelle qui sert de pivot central à son film.
On peut certes affirmer à juste titre qu'il est préférable
d'écouter La Peau blanche plutôt que de se farcir
l'un de ses pénibles équivalents produits dans le royaume
du Big Mac, et avancer selon une logique implacable que le seul cinéma
régional qui puisse entrer en compétition avec la production
de masse américaine doit en exploiter les archétypes.
Mais c'est là une logique qui risque à long terme de transformer
la production québécoise en vulgaire cinéma canadien.
Si nous nous distinguons de cette industrie fondée autour du
fac-similé estampillé d'une feuille d'érable, c'est
en partie parce que nous arrivons par un miracle d'identification culturelle
à consommer notre propre cinéma d'auteur.
Commencer à niveler vers le bas comme le font ici Daniel Roby
et son équipe, c'est s'avouer vaincus au moment même où
le cinéma américain commence à être victime
de sa propre redondance. Il n'est pas à notre avantage de commencer
à jouer leurs cartes alors même que leur jeu devient prévisible
au point que plus personne ne tombe dans le panneau. Si vous désirez
par une morne soirée de semaine regarder un suspense fantastique
sans âme, La Peau blanche fera tout aussi bien l'affaire
qu'un autre film se trouvant dans la section horreur de votre club vidéo
et aura à tout le moins l'avantage éthique d'avoir donner
du travail à des techniciens d'ici. Mais de là à
en vanter les mérites d'un point de vue cinématographique,
il y a une ligne que je refuse de traverser.
Version française : -
Scénario :
Joël Champetier, Daniel Roby
Distribution :
Marc Paquet, Marianne Therien, Frédéric
Pierre, Jessica Malka
Durée :
92 minutes
Origine :
Québec
Publiée le :
21 Avril 2005