MONICA LA MITRAILLE (2004)
Pierre Houle
Par Frédéric Rochefort-Allie
Qui a dit que le crime ne paie pas? Avec ses 7 millions, budget monstre
au Québec, Monica La Mitraille sort son arsenal de producteurs.
Ainsi, les mêmes nous ayant replongés dans le terroir avec
Séraphin ont décidé de faire ressusciter une légende
montréalaise du crime. Monique Proietti était l'une des
criminelles les plus importantes dans l'histoire des vols de banques,
mieux connue chez les anglophones sous le nom de Machine Gun Molly.
Quoi de mieux pour suivre la vague des films québécois
exportés ?
Monique (Céline Bonnier), une jeune femme du redlight
de Montréal, s'immisce peu à peu dans le monde du crime.
Elle prendra goût aux fusils et au risque, puis s'aventurera dans
l'univers des braqueurs de banques.
Monica ne serait pas Monica sans la présence de Céline
Bonnier. C'est d'une évidence même. Ce film, à tout
le moins, confirme que l'actrice ne méritait pas d'être
dans l'ombre pendant tout ce temps. Elle captive par son interprétation
d'un personnage mythique et lui fait d'ailleurs honneur sur ce point
en incarnant une femme attachante et avec énormément de
mordant. Malgré un jeu parfois théâtral durant quelques
scènes, direction d'acteurs excuse, Bonnier fait oublier bon
nombres de lacunes de l'ensemble du film. Il en va de même pour
le casting, quoiqu'un peu stéréotypé par sa sélection
d'acteurs. Il ne manquait plus qu'un Pierre Curzi ou une Ginette Reno
pour compléter cette belle brochette d'acteurs omniprésents,
quoique talentueux pour la plupart. Bien que le milieux artistique soit
solidaire, n'y a-t-il pas moyen d'éviter une distribution comprenant
deux humoristes ? De belles surprises chez Isabelle Blais, qui cette
fois change carrément d'archétype en démontrant
qu'elle sait jouer plus d'un type de personnage. Notons aussi un duo
efficace entre Roy Dupuis et sa compagne Céline Bonnier.
Ce qui tue Monica, ce ne sont pas des balles de fusils, mais un scénario
mal développé par le créateur d'Omerta.
Bien sur, certaines scènes sont magiques et captivantes, mais
généralement, elles échouent sur plus d'un point.
Le film ne se concentre pas toujours sur des personnages importants,
privilégiant ainsi les plus sympathiques et unidimensionnels.
Le film s'étire sur de nombreuses longueurs qui font débarquer
le spectateur. D'ailleurs, Monica adopte un nouveau genre vers son troisième
acte et le changement de rythme est drastique. On ne sait plus sur quel
pied danser. Les dialogues sont aussi parfois plutôt pauvres,
se limitant qu'à transcrire des informations clefs, manquant
de naturel. Le scénario aurait donc bénéficié
d'être réécrit. Le scénariste demeure talentueux
dans l'ensemble de sa carrière, mais comparativement au passé,
cette fois-ci, il échoue. Nous sommes loin du cynisme de Bunker
le cirque.
Il en va de même pour la réalisation. Décidément,
Monsieur Houle a une fascination pour les gros plans. Serait-ce pour
éviter des coûts de production élevés ou
la cruelle influence du médium de la télévision
? Nous offrant tout de même une composition d'images intéressante,
le réalisateur nous présente parfois des moments mélodramatiques
qui ruinent le ton qu'il cherche à obtenir. Bien que l'adrénaline
soit présente, la scène finale nous présente un
excès d'images nerveuses. Le recyclage de ce type d'images, exploré
entre autres par Ridley Scott dans Gladiator, est certes intéressant
mais son abus en fait un manque criant d'originalité. Comparativement
aux différents hold-ups parcemés parmis l'intrigue, le
résultat distencie le spectateur des évènements.
Espérons que dans un futur pas si éloigné, Monsieur
Houle soigne les défauts de sa réalisation. Car dans Monica
La Mitraille, un grand potentiel n'est pas correctement développé.
Idem pour Michel Cusson, le compositeur de musique. Une musique chaude
et mélancolique, toutefois pas mémorable.
Céline Bonnier peut nous fusiller de son regard le plus haineux,
le film ne remplit pas ses attentes. Les longueurs et le scénario
mal structuré auront raison du spectateur ennuyé. Monica
manque de munitions pour séduire comme elle le désire.
En fin de compte, on ne retiendra que les décors superbes et
l'attachante interprétation de Machine Gun Molly. Dommage car
la réussite n'était pas loin. Peut-être que le cinéma
québécois croît un peu trop rapidement. On attend
toujours le «criss de grand coup»...promis.
Version française : -
Scénario :
Luc Dionne, Georges-Hébert Germain
Distribution :
Céline Bonnier, Roy Dupuis, Patrick Huard,
Marc Labrèche
Durée :
122 minutes
Origine :
Québec
Publiée le :
3 Mai 2004