JAY AND SILENT BOB STRIKE BACK (2001)
Kevin Smith
Par Alexandre Fontaine Rousseau
Depuis leur apparition dans Clerks, Jay (Jason Mewes) et Silent
Bob (Kevin Smith) sont devenus de véritables personnages cultes
pour les multiples convertis à l'univers de Kevin Smith, les
transformant en sorte de Cheech et Chong d'une nouvelle génération.
Cependant, aucun film ne leur avait à ce jour été
consacré. Certes, les deux «poteux» du New Jersey
avaient eu un rôle important dans l'épopée religieuse
controversée de Smith, Dogma, mais Jay and Silent
Bob Strike Back braque les projecteurs sur eux sans interruption
durant une heure et demie, pour le meilleur et pour le pire. Jay
and Silent Bob Strikes Back est une inside joke aux proportions
épiques entre Kevin Smith et les fervents de son univers. Rarement
a-t-on vu un réalisateur truffer son film de références
aussi évidentes à sa propre filmographie. Ceux n'ayant
pas vu Clerks, Mallrats, Chasing Amy et Dogma
ne saisiront pas la moitié des événements du film.
Pour les non-initiés, le film se limitera à une série
de gags stupides et vulgaires tournant autour d'une prémisse
intrigante: les deux comparses apprennent par l'entremise de Brodie
(Jason Lee, reprenant son rôle de Mallrats) que Miramax
a acheter les droits pour tourner une adaptation cinématographique
de la bande dessinée Bluntman and Chronic (voir Chasing
Amy), qu'ils ont inspiré. Ils découvrent bien vite
qu'ils sont la risée d'une horde d'internautes cinéphiles
qui s'amusent à prédire l'échec du film et décident
de se rendre à Hollywood pour en empêcher le tournage.
Leur voyage, bien entendu, ne se déroulera pas comme prévu,
et l'hilarité s'ensuit... dépendamment de votre définition
de celle-ci. Si Smith a grandement évolué en tant que
réalisateur, son scénario n'est pas à la hauteur
de ceux qu'il nous avait pondu auparavant.
L'imbécillité la plus totale règne tout au long
de Jay and Silent Bob Strike Back, et les farces sur les homosexuels
et les flatulences s'enchainent à un rythme délirant.
Kevin Smith n'a jamais visé aussi bas qu'il ne le fait ici. Pourtant,
il est facile de lui pardonner la stupidité de son scénario
car Smith s'assure de nous prouver qu'il en est bien conscient par l'entremise
d'un humour auto-dérisoire bien exploité. Les mêmes
remords qui, dans Chasing Amy, tenaillaient Holden McNeil à
l'écriture d'un projet purement commercial tel que Bluntman
and Chronic semblent dévorer Smith ici. Il sait qu'il est
en mesure de faire mieux, mais semble malgré tout tirer un certain
plaisir d'un tel projet. D'ailleurs, l'ensemble de la distribution semble
s'amuser follement, tout particulièrement Gus Van Sant, Matt
Damon et Ben Affleck, merveilleusement amusants lors du tournage fictif
de Good Will Hunting 2: Hunting Season. Jason Mewes et Kevin
Smith, quant à eux, forment un duo comique toujours aussi efficace.
Toutefois, il est un peu dommage de voir Smith dire adieu à l'univers
de ses premiers films avec une farce aussi grosse que celle-ci. On peut
tenter de lire le film au deuxième niveau, mais Jay et Silent
Bob Strike Back fait trop de compromis à la machine commerciale
pour être aussi satisfaisant qu'il n'aurait pu l'être. Le
film de Smith tombe trop souvent dans la stupidité pure et simple
et prend l'allure d'un film pour adolescents attardés. Par contre,
Jay and Silent Bob Strike Back déborde de détails
savoureux nous rappelant l'intelligence de Kevin Smith. De toute façon,
ceux à qui s'adresse le film seront content de voir Silent Bob
s'offrir un duel au sabre laser contre Mark Hamill en personne. Les
autres devraient passer. Jay and Silent Bob Strike Back est
la conclusion d'une longue histoire d'amour dont ils ont été
exclus de toute façon.
Version française :
Jay et Bob contre-attaquent
Scénario :
Kevin Smith
Distribution :
Jason Mewes, Kevin Smith, Ben Affleck, Shannon
Elizabeth
Durée :
104 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
2 Août 2004