JACKIE BROWN (1997)
Quentin Tarantino
Par Frédéric Rochefort-Allie
Trois années c'est long. Des empires se sont écroulés
en moins de temps qu'il en a fallu pour que premièrement l'Amérique
se remette de Pulp Fiction et que Tarantino signe son troisième
film en tant que réalisateur avec Jackie Brown. Les
attentes étaient si grandes, les fans furent déçus
de ne pas y retrouver les dialogues mémorables ou l'ambiance
de Pulp Fiction. Mais avec du recul, est-ce que ce film mérite
ses critiques?
Dans ce film, Jackie Brown (Pam Grier) est une hôtesse de l'air
qui travaille étroitement avec un trafiquant d'armes (Samuel
L. Jackson). Un jour, lorsque le trafiquant paye sa caution, ils décident
de monter un coup pour faire passer beaucoup d'argent aux douanes sans
que le policier (Micheal Keaton) ne le remarque.
Dès le départ, on remarque que le style de Tarantino a
fait un bond dans son évolution. L'introduction, composée
d'un travelling fantastique, est un véritable tour de force.
Tarantino, dirigeant son actrice culte, lui rend hommage à travers
son scénario, comme par exemple le nom qui rappelle étrangement
Foxie Brown. D'ailleurs, cette fois ce n'est pas l'acteur qui devient
le personnage, mais plutôt l'inverse. Jackie Brown est Pam Grier.
Son jeu est plutôt convaincant, elle ne tombe pas dans l'exagération.
Pam Grier et Robert De Niro sont présents ici à titre
d'icônes des années 1970. De Niro incarne bien l'ex-détenu
blasé par la société. Bien sûr on l'apprécie,
tout comme Grier, mais ce ne sont pas eux qui percent l'écran.
C'est un certain Robert Foster, acteur sorti des boules à mites,
qui détourne notre attention par un jeu tout à fait ahurissant.
On sent une sagesse chez son personnage, un vécu. Samuel L. Jackson
ne s'en tire pas mal du tout non plus, quoiqu’un peu proche de
son personnage de Pulp Fiction. On reste surpris d'apprendre
que le film se déroule en 1995 parce que tout, de la musique
aux costumes, réfère aux années 1970. C'est probablement
l'un des aspects les plus réussis du film, faire croire à
une époque qui n'existe plus. Comme si Tarantino avait trouvé
en ces années une période d'utopie. D'ailleurs, le nouveau
Tarantino semble avoir acquis de la maturité et de la finesse.
Les plans, le montage, tout confirme que le créateur n'est pas
qu'un simple cinéphile, mais bien un réalisateur à
part entière, capable d'adapter un livre en gardant l'essence
du style de l'auteur tout en conservant le sien. Par contre, c'est justement
au niveau de l'histoire que le film s'affaiblit. L'intrigue manque de
clarté ce qui en vient à perdre le spectateur. Les dialogues
ne sont plus aussi «tarantinesques», plus aussi crus et
mémorables qu'avant. Étrange quand on sait qu'Elmore Leonard
est l'auteur par excellence pour ce cher Quentin.
Donc, si Jackie Brown en déçoit plusieurs, il
reste que ce film offre une histoire d'amour plutôt intéressante.
Ce n'est certes pas du niveau de Reservoir Dogs ou de Pulp
Fiction, mais l'affection que porte Tarantino pour les années
1970 dépeint sur son oeuvre et celle-ci devient un très
bel hommage, bien réalisé et qui nous révèle
des acteurs sous un second regard. Bref, un bon film à voir si
vous êtes un habitué du cinéaste ou un fan de Pam
Grier.
Version française :
Jackie Brown
Scénario :
Quentin Tarantino, Elmore Leonard (roman)
Distribution :
Pam Grier, Samuel L. Jackson, Robert De Niro, Bridget
Fonda
Durée :
151 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
11 Octobre 2003