IN BETWEEN DAYS (2006)
So Yong Kim
Par Jean-François Vandeuren
C’est l’hiver. Le paysage urbain est paralysé par
la neige et le froid. Les journées sont courtes et l’année
scolaire bat son plein. Au milieu de tout ça, Aimie, une jeune
fille d’origine coréenne tente simplement de passer à
travers les différents obstacles d’un quotidien trop souvent
empreint de mélancolie. Son père décida de rester
dans son pays natal, elle ne s’entend pas particulièrement
bien avec sa mère, et elle cherche tant bien que mal à
développer une relation amoureuse avec son meilleur ami qui,
pour sa part, semble plus ou moins intéressé. In Between
Days ne dresse pas un autre portrait de l’adolescence dominé
par les débauches à n’en plus finir dans l’immense
piaule de parents bien nantis, les gags sexuels douteux et les personnages
bêtes et caricaturaux au possible. Ce premier long-métrage
de So Yong Kim nous présente plutôt des gens ordinaires
aux prises avec des problèmes que nous sommes tous susceptibles
de rencontrer dans la vie de tous les jours. « Où est l’intérêt,
alors? », rétorquerait assurément Robert McKee.
L’intérêt d’une part est dans la façon
dont So Yong Kim cerne les thèmes forts de son récit en
restant aussi fidèle que possible à la réalité
et ce, sans chercher à tirer profit d’un quelconque effet
de style sur le plan narratif. Une initiative qui ne l’empêche
toutefois pas de développer son intrigue à partir d’un
moule assez classique qui, sans faire énormément de vagues,
capte et conserve l’intérêt du public du début
à la fin. La réalisatrice illustre ainsi sans artifice
ni même de trame sonore une série d'épreuves tout
ce qu’il y a de plus banales qu’elle rend prenantes en nous
imprégnant avec une foudroyante véracité du quotidien
et des désirs de sa protagoniste tout comme de sa constante hésitation
à foncer et aller de l’avant. Comme toute adolescente de
son âge, Aimie tente d’afficher ses couleurs sans les rendre
trop évidentes. Un comportement typique de cette période
de l'existence que la cinéaste souligne de façon modeste
et naturelle en ne forçant jamais la dose au niveau de la tension
dramatique. Cette dernière cherche plutôt à obtenir
la sympathie du spectateur en le faisant passer à travers une
série de situations dans lesquelles il peut facilement se reconnaître.
So Yong Kim effectue pourtant un portrait assez serré de sa protagoniste,
favorisant notamment l’emploi de plans rapprochés et quelque
peu brouillons pour mettre en images un scénario principalement
composé de fragments du quotidien de cette dernière s’échelonnant
sur une période de temps bien définie. La réalisatrice
souligne ainsi le réalisme et le caractère singulier de
son entreprise par une utilisation fort judicieuse de la caméra
à l’épaule. So Yong Kim exploite tout aussi habilement
le contexte hivernal de son premier opus pour enrichir celui-ci d'une
atmosphère glaciale où règne la solitude et ainsi
mettre en évidence les difficultés d’Aimie à
tisser des liens durables avec son entourage. Les efforts de la réalisatrice
sont également appuyés par le jeu tout ce qu’il
y a de plus crédible de l’ensemble de sa distribution.
La jeune Ji-seon Kim se démarque particulièrement du lot
de par la vulnérabilité désarmante qu’elle
confère à un personnage avec lequel nous sympathisons
dès les premières minutes du film. Conjugués aux
élans scénaristiques de So Yong Kim et Bradley Rust Gray,
l’interprétation on ne peut plus précise de la jeune
comédienne fait d’Aimie une protagoniste peu expressive
à travers laquelle on parvient malgré tout à lire
comme dans un livre.
Comme son titre l’indique, In Between Days se veut un
film à caractère épisodique par lequel So Yong
Kim évoque l’état d’errance et d’insécurité
de sa protagoniste avec une réelle compréhension des enjeux
de son histoire. Un point qui lui permit d’accoucher d’un
effort captivant et, surtout, libéré de toute forme d’idées
préfabriquées ou simplement criardes. La cinéaste
tint également en ligne de compte qu’elle ne pourrait sceller
d’une quelconque façon le destin d’Aimie à
la fin de son film. Nous l’aurons ainsi accompagnée pendant
une courte période de sa vie au cours de laquelle elle aura connu
sa part d’erreurs de parcours, de déceptions, mais aussi
de petites victoires personnelles. Mais pour chaque décision,
elle aura aussi appris qu’il y a toujours des conséquences
positives et négatives qui se résulteront tôt ou
tard en de nouvelles sources de conflits. Comme quoi peu importe la
tournure des événements, la vie continue!
Version française : -
Scénario : Bradley Rust Gray, So Yong Kim
Distribution : Ji-seon Kim, Kate Clancy, Jamie Hebert, Taegu Andy
Kang
Durée : 83 minutes
Origine : Canada, États-Unis, Corée du Sud
Publiée le : 10 Novembre 2006
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