HOUSE OF SAND AND FOG (2003)
Vadim Perelman
Par Jean-François Vandeuren
La chance d’un premier long-métrage pour le cinéaste
d’origine russe Vadim Perelman nous donne une lourde esquisse
d’un affrontement opposant cultures, tempéraments et fiertés
pour une maison devenant dans la mêlée le but à
atteindre d’une poursuite traditionnelle du rêve américain.
Cependant, Hollywood ramène ici à la fois personnages
et spectateurs sur la terre ferme.
Suite à une erreur administrative, une jeune femme (Jennifer
Connelly) est mise à la porte de sa demeure, laquelle sera rachetée
par un colonel iranien déchu (Ben Kingsley) qui veut ensuite
revendre la propriété pour redonner à sa famille
un peu de la gloire d’antan. Mais la situation n’en restera
pas là et un policier bien intentionné, mais quelque peu
désorienté dans le conflit, développera des liens
avec le personnage de Connelly et tentera alors de rendre à la
jeune femme ce qu'il considère être son dû.
Il s’agit ici d’un film se classant dans la catégorie
des «choisis au hasard» où il y a de fortes chances
que le spectateur se présente tout bonnement à la porte
d’un cinéma, ne sachant pas trop quoi aller voir, et décide
finalement de choisir un film dont il a vaguement eu des échos
plutôt positifs. Mauvais choix dans le cas présent? Oui
et non. Tout dépendant de la façon dont vous aimez qu’un
drame soit construit. Si vous êtes moindrement ouvert d’esprit,
le tout devrait bien passé avec House of Sand and Fog.
Mais attention, il s’agit tout de même d’un drame
psychosocial assez lourd. Les événements positifs sont
plutôt rares pour ne pas dire carrément absents du récit
de Perelman. L'élément permettant au long métrage
de ce dernier de sortir un peu de l’anonymat se situe dans la
manière dont le cinéaste a su construire son scénario,
développant sa problématique en gardant bien en tête
de rester dans la neutralité. Les événements ne
nous permettent pas de vraiment prendre position par rapport à
l’un ou l’autre des deux camps. On est plutôt témoin
de la démonstration d’un choc culturel où les deux
parties ont une façon bien différente d’entreprendre
la poursuite de leur idéal. Situation qui nous démontre
efficacement la distinction entre les deux tempéraments sans
avoir à dénigrer l'un pour valoriser l'autre. Ce qu’il
y a de bien également dans l’approche de Perelman, c’est
qu’elle ne dévoile pas trop d’airs moralistes. Cependant,
le film tombe tout de même dans quelques pièges un peu
malhabiles. Une de ces failles se situe au niveau du développement
des personnages. Si la psychologie du personnage de Kingsley nous est
extrêmement bien introduite, en ce qui concerne celle des personnages
de Connelly et du policier, c’est plutôt nébuleux.
On ne cherche pas toujours à aller plus loin qu''une façade
antérieure et c'est un peu dommage.
D’autre part, certaines idées ne sont pas menées
à bon terme, l’approche peut paraitre quelque peu mal formulée
ou hésitante, ou le dénouement de celles-ci semblent même
avoir été carrément oubliées en chemin pour
laisser place à quelques scènes insistant d'une façon
plus mélodramatique durant la deuxième moitié du
film. Ces dérapages font en sorte que, sans que l’intérêt
ne s’évapore nécessairement, le film semble s’essouffler.
Heureusement, Perelman se dévoile comme étant un excellent
directeur dramatique et dans cet ordre d’idées, Ben Kingsley
offre encore une fois une prestation phénoménale. Idem
pour l'ensemble du casting d’ailleurs. D’autre part, le
réalisateur se débrouille assez bien derrière la
caméra en offrant un effort visuel fort appréciable et
en réussissant à contrôler une atmosphère
qui peut devenir véritablement absorbante, ce qui permet de ramener
une oeuvre qui aurait pu dramatiquement tomber à plat vers un
certain équilibre, et un peu plus haut encore.
Bref pour un premier effort, Perelman prouve son talent pour ce qui
est de la direction des acteurs ainsi qu’une certaine habileté
dans la maitrise de sa caméra. Peut-être pas le meilleur
moyen de vous remonter le moral, mais House of Sand and Fog
demeure un des bons choix parmi la vague de films de fin d’année
postés à l’Académie. Un long métrage
qui manque un peu d’habileté à quelques endroits,
mais parions que le cinéaste saura comment acquérir une
certaine maturité au cours de ses prochains projets. Tout de
même fort intéressant.
Version française :
Maison de sable et de brume
Scénario :
Vadim Perelman, Andre Dubus III (roman)
Distribution :
Jennifer Connelly, Ben Kingsley, Ron Eldard, Frances
Fisher
Durée :
126 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
9 Février 2004