HOUSE OF 1000 CORPSES (2003)
Rob Zombie
Par Jean-François Vandeuren
Rob Zombie a toujours alimenté son univers musical de sa grande
fascination pour le macabre et le profondément dérangé.
L’artiste garnit ainsi son mélange fort divertissant de
métal et de sonorités industrielles d’histoires
sordides traitant de morts-vivants, de créatures monstrueuses
et de la grande faucheuse en personne. Le passage de Zombie du studio
d’enregistrement aux plateaux de tournage n’était
en soi qu’une simple question de temps et promettait de donner
lieu à un spectacle pour le moins inhabituel. Extravagant, il
faut bien reconnaître que ce House of 1000 Corpses l’est
à souhait. Zombie pige de manière gourmande dans à
peu près tous les sous-genres que le cinéma d’horreur
a vus naître au cours du siècle dernier. Le réalisateur
cite abondamment, mais ne parvient jamais à donner un sens à
ses élans qui finissent par s’éparpiller dans un
fourre-tout incohérent et anormalement tapageur.
Dans un récit s’inspirant fortement du Texas Chainsaw
Massacre de Tobe Hooper, quatre jeunes adultes sillonnant les routes
isolées des États-Unis recueillent par une nuit particulièrement
orageuse une étrange auto-stoppeuse. Quelques kilomètres
plus loin, la voiture du groupe tombe en panne. La jeune femme convainc
alors le quatuor de l’accompagner jusque chez elle où son
frère pourra leur donner un coup de main. Nos voyageurs plutôt
téméraires feront alors la connaissance d’une famille
on ne peut plus dysfonctionnelle pour laquelle la fête d’Halloween
est un rituel sacré. L’escapade se transformera évidemment
en un délire sanglant au cours duquel défileront de manière
douteuse tueurs en série, zombies, monstres sortis tout droit
d’un jeu vidéo et autres bizarreries que les amateurs des
spectacles les plus tordus du cinéma asiatique accueilleront
sans doute à bras ouverts pendant un certain temps.
C’est d’ailleurs cet éparpillement qui finit par
jouer de mauvais tours à Zombie de même qu’à
son public. Il faut dire que le réalisateur ne laisse jamais
paraître le moindre désir de concentrer ses énergies
sur un sous-genre en particulier et préfère plutôt
édifier un hommage personnel célébrant une forme
d’art dont il semble pourtant connaître les rudiments sur
le bout des doigts. Toutefois, House of 1000 Corpses oscille
dangereusement entre la célébration et le vulgaire plagiat.
Le cinéaste américain enterre ainsi son oeuvre sous une
abondance de séquences barbares et complètement détraquées
exposant un contenu en marge de toute logique narrative, en particulier
durant la deuxième moitié du film. Le résultat
final donne d’ailleurs l’impression que Rob Zombie a imaginé
une scène bien précise pour une dizaine de longs-métrages,
mais qu’il n’est pas parvenu à situer ses idées
sommes toute peu banales dans un contexte plus large et se contenta
plutôt de les rassembler en un seul ensemble chaotique alimenté
par l’une des prémisses les plus usées du genre.
Le pire dans tout cela est que la facture visuelle érigée
par Rob Zombie détonne complètement des événements
débiles qu’il fait défiler sans aucun sens de la
répartie. Le cinéaste nous sert du coup une réalisation
des plus académiques qui tient considérablement ses distances
avec l’essence même du récit. Il faut dire que l’ensemble
est également ruiné par la minable direction photo de
Tom Richmond et Alex Poppas qui ne fait que créer un obstacle
de plus quant à l’adhésion au spectacle macabre
que Zombie tente par tous les moyens de nous faire avaler. Ce dernier
cherche alors à sauver la mise comme il peut en garnissant son
film de quelques séquences hyperactives volontairement vieillies,
mais celles-ci ne font au final qu’ajouter à cet étrange
sentiment de déjà-vu dont House of 1000 Corpses
ne parvient jamais à se défaire.
Pour son premier effort derrière la caméra, Rob Zombie
sembla beaucoup plus intéressé à faire une étude
de marché que de signer un film d’horreur réellement
novateur. Le cinéaste utilise ainsi le spectateur comme cobaye
de la manière la plus excessive qui soit en soumettant sa pauvre
cervelle sans défense à un déluge de tentatives
monstrueusement ratées. Sa distribution l’accompagne dans
son délire sans poser de question et joue sans nuance ni profondeur
les psychopathes bon marché et les victimes au QI peu élevé.
Comprenant bien que le cinéma d’horreur aux États-Unis
est aussi en mouvement présentement qu’un cadavre abandonné
sur le bord de la route, Zombie voulut réaliser un film d’horreur
plus théâtrale, agressif et dérangeant sans nécessairement
savoir comment aller de l’avant. Ses intentions somme toute nobles
s’effondrent alors sous le poids d’un genre qui a de moins
en moins d’idées nouvelles à partager. Le cinéaste
se cherche sans relâche durant se périple valsant la plupart
du temps avec le n’importe quoi sans jamais réussir à
se trouver.
Version française :
La Maison aux mille cadavres
Scénario :
Rob Zombie
Distribution :
Sid Haig, Bill Moseley, Sheri Moon, Karen Black
Durée :
89 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
8 Juin 2007