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HORLOGE BIOLOGIQUE (2005)
Ricardo Trogi

Par Jean-François Vandeuren

Sans être en soi la suite de Québec-Montréal, Horloge biologique reprend néanmoins sensiblement là ou le premier film de Ricardo Trogi nous avait laissés, continuant de traiter des relations homme/femme avec une force d’impact qui s’en retrouve cette fois-ci décuplée, alors que ce dernier nous amène au stade où un couple décide de passer aux choses sérieuses et fonder une famille. L’introduction d’Horloge biologique nous place rapidement en contexte, alors que le réalisateur nous introduit à une meute d’hommes des cavernes s’apprêtant à aller chasser joyeusement une horde de mammouths. Cependant, l’un d’entre eux ne pourra accompagner ses chums à cette petite partie de chasse, devant plutôt s’occuper de son rejeton. Effectuant un bond en avant de plusieurs milliers d’années après la crise existentielle de ce dernier, les scénaristes Jean-Philippe Pearson, Patrice Robitaille et Ricardo Trogi s’attaquent par la suite aux instincts primitifs des hommes de leur génération et à leur appréhension face à la paternité et leur tendance à ne pas nécessairement placer leurs priorités dans le bon ordre.

Pour ce faire, Horloge biologique nous présente trois personnages incarnant les différents stades de ce changement de vie. Sébastien, un père de famille qui aimerait bien renouer avec ces amis de longue date et mettre ses obligations familiales de côté de temps à autre. Paul, qui attend un premier enfant, mais qui est retissent à l’idée d’abandonner les 5 à 7 du bureau où il a parfois tendance à un peu trop jouer avec le feu. Et finalement, Fred, qui lui ne veut tout simplement rien savoir et tente de retarder la date butoir face à sa blonde qui se montre de plus en plus insistante. Dans la peau de ses personnages, nous retrouvons les trois vétérans de Québec-Montréal qui reprennent ici sensiblement les mêmes rôles. Mais Horloge biologique fait cependant part d’une qualité d’écriture plus assurée, ce qui est déjà assez remarquable en soi. Nous entraînant dans un tourbillon de répliques comiques aussi corrosives et savoureuses qu’auparavant, là où le film frappe fort par contre est étonnamment lors des scènes plus sérieuses, révélant un côté dramatique qu’on ne pouvait qu’espérer et qui ne déçoit aucunement.

Le film utilise également à très bon escient un ton caricatural qui ne gêne jamais le récit par un quelconque signe d’artificialité, mais qui se forme plutôt autour d’observations parfois grinçantes du quotidien et de l’attitude de ces futurs parents. Horloge Biologique fait également part d’une distribution tout simplement époustouflante dans ses affrontements entre des acteurs jouant la comédie sans bémol, et des actrices dans des rôles plus craintifs qui tentent de ramener leurs hommes débordant de testostérone les deux pieds sur Terre. Mais il n’y a pas que la qualité du scénario qui se soit étoffée par rapport à Québec-Montréal. Si le film précédent s’exprimait en majeure partie par les dialogues, Trogi se montre ici beaucoup plus démonstratif visuellement. Sa réalisation se veut de ce fait un peu plus convenue que celle du contexte fermé de son premier long métrage, mais le cinéaste québécois nous propose tout de même une approche beaucoup plus professionnelle, arpentant avec un plaisir palpable cette nouvelle liberté offerte par des lieux de tournages plus nombreux et une mise en scène plus diversifiée, usant aussi d’effets de style qu’il intègre avec justesse et sobriété

Si Québec-Montréal obtint une réputation enviable grâce à l’intelligence de son approche et la force de ses dialogues, en faisant une drogue cinématographique dont on décroche difficilement, ce qui lui permit du même coup d’atteindre à bien des égards le statut de film culte en devenir, les choses risquent de se répéter à nouveau sans grandes difficultés pour ce deuxième long métrage de Ricardo Trogi. Ce dernier renoue en ce sens avec un humour tout aussi implacable et, le plus important, la sincérité avec laquelle il nous livre son discours. La formule s'est évidemment améliorée d'une manière considérable cette fois-ci, effectuant un pont entre les moments comiques et les scènes plus dramatiques d’une façon fort impressionnante et toujours balancée, révélant un soin particulier au niveau des répliques et des différentes mises en situation, lesquelles nous transportent vers une finale extraordinairement bien orchestrée qui en poussera plusieurs à une sérieuse remise en question. Le formidable trio formé des Robitaille, Pearson et Trogi solidifie donc sa signature, et on ne peut qu’espérer avoir de leurs nouvelles le plus tôt possible.




Version française : -
Scénario : Jean-Philippe Pearson, Patrice Robitaille, Ricardo Trogi
Distribution : Jean-Philippe Pearson, Patrice Robitaille, Pierre-François Legendre
Durée : 100 minutes
Origine : Québec

Publiée le : 10 Août 2005