HATCHET (2006)
Adam Green
Par Jean-François Vandeuren
Même si le nombre de slashers réellement pertinents ayant
vu le jour ces trente dernières années se comptent sur
les doigts de la main, ce sous-genre fort lucratif du cinéma
d’horreur en est un qui ne mourra vraisemblablement jamais. Ils
sont d’ailleurs toujours aussi nombreux à chaque année
à vouloir recopier les grandes lignes de cette formule bancale
à l’éthique fort douteuse sans nécessairement
chercher à apporter une dimension un peu plus substantielle à
cette histoire de vengeance au propos souvent beaucoup trop mince. Comme
bien des cinéastes avant lui, Adam Green s’attaqua au genre
à partir de sa forme la plus primaire, capitalisant sur les éléments
en ayant fait la renommée auprès des amateurs de gore
tout en tournant à son avantage les innombrables fautes responsables
de sa mauvaise réputation auprès du plus commun des mortels.
Mais contrairement à l’excellent Behind the Mask :
The Rise of Leslie Vernon de Scott Glosserman ou même du
Scream de Wes Craven, Hatchet ne joue pas de finesse
en cherchant à démystifier la logique souvent boiteuse
alimentant la majorité des essais du genre ; il s’en accommode
avec un plaisir coupable, et surtout contagieux. Bien conscient qu’une
prémisse aussi saugrenue ne peut être prise qu’avec
un énorme grain de sel, Green s’exécute en ne cherchant
qu’à rendre aussi jouissif que possible ce spectacle sanglant
dont le principal intérêt demeure le carnage granguignolesque
autour duquel tourne la quasi-totalité de son récit.
De toutes les prémisses dont le cinéaste américain
aurait pu s’inspirer pour arriver à ses fins, il fallait
que ce dernier choisisse celle de l’exécrable, et surtout
interminable, série Friday the 13th. Green nous présente
ainsi Victor Crowley, un tueur sanguinaire ressemblant étrangement
à Jason Voorhees, le sac de patates ou le masque de hockey en
moins. Tout comme son homologue de Crystal Lake, Crowley a lui aussi
cette vilaine habitude de ne jamais succomber aux multiples assauts
dont il est continuellement la cible. Né avec d’importantes
malformations partout sur le corps, Victor passera son enfance en compagnie
de son père au fin fond d’un marais de la Nouvelle-Orléans
jusqu’au jour où la demeure familiale sera complètement
ravagée par les flammes. Croyant avoir perdu son unique fils
dans l’incendie, le père de Victor se laissera lentement
mourir de chagrin. La légende veut toutefois que Victor ait survécu
à l’incident et qu’il assassinerait désormais
tous ceux qui s’aventureraient témérairement sur
son territoire. Pour notre plus grand plaisir, Adam Green mettra à
la disposition de son meurtrier une belle brochette d’individus
ayant tous les mots « future victime » joliment gravés
sur le front, que l’on pense au guide touristique sans scrupule
responsable de l’escapade nocturne les ayant tous rassemblés,
au jeune écervelé ne pensant qu’à la débauche,
au producteur de films pornographiques et ses deux nunuches, sans oublier
le couple de retraités en vacances, l’étudiant en
peine d’amour et cette mystérieuse jeune femme dont le
père et le frère disparurent dans les environs quelques
jours plus tôt.
Avec de tels personnages, la ligne directrice du présent effort
n’aurait évidemment pas pu être mieux définie.
En fait, il ne nous restait plus qu’à découvrir
dans quel ordre, et surtout dans quelles circonstances, ces derniers
allaient tomber au combat. Ainsi, plutôt que de vouloir constamment
déjouer nos attentes, Green élabora un scénario
d’une aberrante simplicité afin de les rencontrer le plus
souvent possible. Une initiative tout de même peu commune dans
un genre où même l’utilisation abusive d’hémoglobine
comme carburant empêche rarement celui-ci de tomber en panne sèche
plusieurs miles avant la ligne d’arrivée. Green s’amuse
ainsi aux dépens des nombreux clichés et stéréotypes
propres au slasher sans nécessairement chercher à les
sortir de leur contexte d’origine. Le réalisateur réussit
d’ailleurs à rendre étonnamment digestes tous ces
éléments qui auraient pu facilement ruiner l’expérience
en plaçant habilement tout le sadisme de son scénario
au service de la comédie beaucoup plus que de l’horreur.
Un tour de manège excessif dépourvu de tout temps mort
que le cinéaste américain appuie d’une démarche
visuelle des plus compétentes en son genre, laquelle tire merveilleusement
profit des effets spéciaux entièrement réalisés
avec les moyens du bord par la légende du genre John Carl Buechler
(From Beyond, Bride of the Re-Animator) et de la direction
photo aux airs de bande dessiné on ne peut plus appropriée
de Will Barratt.
Hatchet est donc un film fait par des fans pour des fans avec
tout ce que cela implique en termes d’effusions de sang et de
démembrements à n'en plus finir. Adam Green réduit
ainsi le genre à sa plus simple expression en le dépouillant
de tout mystère et de toute morale, préférant capitaliser
sur chacune des apparitions de sa machine à tuer pour alimenter
un climat de tension qu’il n'a aucune difficulté à
rendre palpable et ce, même si les bases de son récit demeurent
en soi fortement ancrées dans celles de la comédie. Le
tout est complété par une distribution extrêmement
énergique qui prit un plaisir évidant à participer
à ce spectacle d’une violence inouïe. Celle-ci est
d’ailleurs joliment complétée par quelques apparitions
de vétérans du genre tels Robert Englund, Tony Todd et
Kane Hodder, qui a bien voulu se soumettre à de longues séances
de maquillage pour jouer de nouveau les maniaques assoiffés de
sang. Hatchet prendra fin au terme d’une course
effrénée lors d’une finale on ne peut plus abrupte
que le réalisateur américain orchestrera d’une manière
absolument jouissive en ne nous laissant aucunement la chance de reprendre
notre souffle ou de remettre en question la logique déjà
très mince autour de laquelle s’articule son scénario.
Adam Green a ainsi le mérite d’avoir été
au bout de ses idées pour nous offrir un divertissement évidemment
quelque peu juvénile, capitalisant étrangement sur une
pléthore d’effets gore dégoulinants pour alimenter
le ton plus comique de l’effort qui ne sombre fort heureusement
jamais dans le ridicule.
Version française : -
Scénario :
Adam Green
Distribution :
Joel Moore, Tamara Feldman, Mercedes Mcnab, Kane
Hodder
Durée :
93 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
31 Juillet 2007