GUY X (2005)
Saul Metzstein
Par Frédéric Rochefort-Allie
Jeté en dehors d'un avion, le soldat Rudy Spruance (Jason Biggs)
envoyé en mission à Hawaïi, découvre bien
assez vite qu'en fait, on l'a abandonné... au Groenland! Spruance
se retrouve donc sur une base où il fait jour 24 heures sur 24,
et où la principale activité culturelle du coin consiste
à revoir de façon maladive Invasion of the Body Snatchers,
charmant non? Mais c'est alors que, pris pour un expert de la propagande,
Spruance et son "journal du soldat" découvriront un
secret bien gardé.
Si on avait savamment mélangé la critique de la bureaucratie
et de l'état de Brazil à la parodie de la vie
d'armée chez M*A*S*H* et Stripes, la descendance
logique en serait Guy X, film que le réalisateur décrit
lui même comme un "slacker war movie", un film
de guerre sans guerre. L'introduction fonctionne à merveille,
nous présentant la vie de soldats dont la présence sur
le terrain est des plus inutiles et où l'armée perd tout
son sens, car elle cherche à combattre un mal invisible. Une
critique qui demeure franchement d'actualité, même si le
film se déroule durant la fin des années 70. Mais il doit
bien vite de quitter sa phase d'introduction en embarquant dans sa théorie
de complot pour faire avancer cette intrigue qui va nul part. C'est
ainsi que Guy X se tire lui même dans les pieds car l'ambiance
contraste beaucoup trop, passant du film humoristique à tendance
parodique à un drame quasi sentimental, laissant le spectateur
se demander tout bêtement s'il doit rire ou considérer
avec sérieux les piètres scènes avec Michael Ironside.
Voilà donc une excellente idée de court-métrage
qu'on a peut-être un peu trop étiré pour en créer
un film dilué.
Même si l'image de Jason Biggs demeurera éternellement
associée aux tartes, l'acteur tente ici de démontrer qu'il
maîtrise aussi des teintes plus dramatiques et que son talent
ne se limite pas qu'à jouer dans les comédies pour adolescents.
C'est donc un risque qu'il prend en incarnant le personnage principal
de cette satire. Bien qu'il ne s'en tire pas si mal, Jason Biggs ne
colle pas. Il semble même plutôt coincé dans ses
scènes romantiques avec Natasha McElhone et trouve toujours difficilement
le bon dosage entre comédie et drame. Le rôle aurait mieux
fait de tomber entre les mains d'un acteur comme Jason Schwartzman,
qui de toute façon est un habitué des comédies
à humour noir. Mais comme le réalisateur l'a souligné,
l'acteur fut un choix commercial d'abord et avant tout.
On ne connaît d'ailleurs que très peu de choses sur Saul
Metzstein, sinon qu'il a débuté sa carrière sur
Trainspotting de Danny Boyle. Guy X, son second long
métrage, nous fait découvrir un réalisateur très
tendance qui fait un pont entre une réalisation semblable aux
vidéos clips à saveur du mois et au cinéma des
années 70. Visuellement, le réalisateur était l'un
des meilleurs en compétition au Festival International du Film
de Montréal. Son seul défaut cependant, c'est qu'il a
tout misé sur l'esthétisme, offrant des images très
léchées, mais qui manquent définitivement de profondeur.
Chapeau tout de même à François Dagenais, le directeur
photo, qui disposait d'un budget plutôt mince, et qui pourtant
s'est surpassé pour créer un look très particulier
et des plans très léchés, quoi que demeurant d'une
approche discrète.
En fin de compte, Guy X est un film boiteux tout à fait
fascinant qui avait le potentiel de devenir un film culte, mais qui
s'est embûché en cours de route par ses mauvaises idées.
L'équipe peut tout de même être fière pour
les risques et les résultats obtenus. Ce qui est regrettable,
c'est que le film de Saul Metzstein ne trouvera peut-être jamais
de distributeur nord-américain, vous empêchant de le découvrir.
Sans être MASH 2, Guy X demeure un film franchement
sympathique pour qui sait apprécier un tant soit peu l'humour
noir.
Version française : Guy X
Scénario : Steve Attridge, John Paul Chapple
Distribution : Jason Biggs, Natascha McElhone, Jeremy Northam,
Michael Ironside
Durée : 101 minutes
Origine : Canada, Islande, Royaume-Uni, Allemagne
Publiée le : 12 Octobre 2005
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