LA GUERRE DES TUQUES (1984)
André Melançon
Par Jean-François Vandeuren
«La guerre, la guerre... C’est pas une raison pour se faire
mal!» Voilà assurément la réplique la plus
célèbre de ce film culte d’André Melançon.
Cette dite guerre des tuques débute lorsque les enfants d’un
petit village québécois sont appelés à choisir
leur camp en vue d’une guerre qui doit prendre place pendant toute
la durée du congé des fêtes. Un devra construire
un château fort entièrement fait de neige, duquel tous
les enfants d’une génération ont dû rêver
de pouvoir bâtir suite à la plus grosse tempête de
l’hiver, alors que l’autre devra tenter de s’en emparer.
Le clan en possession du fort à la fin des vacances l’emporte.
On parle évidemment ici d’une histoire destinée
principalement aux enfants et qui a tous les attributs nécessaires
pour captiver son public. Des batailles épiques à en faire
rougir Braveheart, une romance à la Roméo
et Juliette, et une avalanche de répliques mémorables,
mais pas forcément pour les raisons qu’on pense.
La Guerre des tuques marquait également le départ
de la série des fameux Contes pour tous de Rock Demers. Une initiative
qui connut bien des hauts durant les années 80 et même
au début des années 90 et qui avait pour objectif de mettre
en image des récits ayant tous une certaine morale jamais très
subtile, mais pas trop forcée non plus. Un projet qui devint
malheureusement avec les années mal exploité et souvent
répétitif, n’arrivant plus à cerner comme
avant la jeunesse, qui semble aujourd’hui vouloir plus que tout
sortir prématurément de la période de l’enfance.
Nous sommes évidemment bien loin ici d’une grande leçon
de cinéma, et ce n’est de toute manière aucunement
la raison qui encouragera le désir de redécouvrir ce film
tout ce qu’il y a de plus sympathique. Mais étonnamment,
il s’agit d’un effort qui réussit, grâce entre
autre aux comédiens interprétant leur personnage respectif
de manière naturelle, à faire un portrait assez réaliste
de la jeunesse de l’époque, ce qui n’est pas toujours
évident à accomplir au cinéma et à la télévision.
Le scénario signé Danyèle Patenaude et Roger Cantin
propose également un récit somme toute honnête et
bien raconté, quoiqu’un peu redondant, élaborant
une morale pour enfant sur la guerre et ses effets qui est, on s’en
doute bien, jamais vraiment cachée et qui est d’ailleurs
constamment épaulée par un des personnages secondaires
refusant de se soumettre au jeu. Les intentions du film sont également
beaucoup plus nobles que celles de l’effort raté qui servit
de suite, ou plutôt de remake, La Forteresse suspendue,
qui apparut en 2001 et qui proposa pour sa part une lutte de classes
qui n’avait pas grand chose à dire en bout de ligne.
Mais La Guerre des tuques n’a malheureusement pas échappé
à la triste réalité du passage du temps. S’il
est tout de même possible de passer outre les effets sonores cocasses,
mais désuets, mélangeant bruits de laser, de fusils et
de dessins animés, et la bande originale agrémentée
de l’ô combien quétaine chanson thème
L’Amour a pris son temps de Nathalie Simard, la faute
d’un tel vieillissement serait plutôt attribuable aux exigences
de la jeunesse d’aujourd’hui qui ne risque tout simplement
pas d’y trouver son compte comme nous l’avions fait il y
a environ vingt ans. Le film d’André Melançon ne
possède donc désormais qu’une valeur symbolique
pour la génération à laquelle il a appartenu. Pour
ceux qui, comme moi, auront grandi avec ce film qui repassait inévitablement
à la télévision à tous les Noëls, La
Guerre des tuques n’aura pas perdu son charme d’antan
et réussira à rendre nostalgique quiconque s’ennuyant
de l’époque révolue des abondantes rafales de neige
de l’hiver.
Version française : -
Scénario :
Roger Cantin, Danyèle Patenaude
Distribution :
Cédric Jourde, Marie-Pierre A. D'Amour,
Julien Elie, Minh Vu Duc
Durée :
92 minutes
Origine :
Québec
Publiée le :
23 Juin 2005