THE GAME (1997)
David Fincher
Par Jean-François Vandeuren
Que voilà un suspense bien pensé! Ne jamais faire les
choses à moitié doit être la devise imposée
à lui-même par le réalisateur David Fincher, car
ce dernier réussit encore une fois à élargir ses
horizons, et du même coup son nombre d’adeptes, en nous
faisant entrer dans un puzzle où la manipulation des éléments
filmographiques tient encore du génie. Sans autant percuter et
révolutionner qu’un Se7en, le cinéaste
nous propose cette fois un film visant beaucoup plus un rôle principalement
axé sur le divertissement en nous offrant une production de haute
qualité terriblement accrocheuse.
L’élément déclencheur de ce casse-tête
se produit lorsqu’un richissime homme d’affaire visiblement
ennuyé par la vie se voit offrir par son frère cadet un
présent consistant en un jeu mis sur pied par une étrange
compagnie de divertissement. Dès lors, des événements
étranges commencent à se produire dans la vie jusque-là
si paisible et banale de Nicolas, un Michael Douglas interprétant
à nouveau son rôle traditionnel qui l'aura rendu célèbre
du businessman antipathique. Mais en bout de ligne, il faudra tout de
même découvrir s'il s'agit bien d'un simple jeu ou s'il
ne s'agit pas plutôt de manigances bien réelles.
Derrière ses allures évidentes d’énorme jeu
vidéo où le héros doit utiliser des objets et des
clés pour se sortir d'impasses, redoubler d'ardeur lors de situations
extrêmes, etc., on retrouve de façon significative dans
The Game un certain désir d'exprimer et donc de faire
resortir au niveau du contexte du personnage les instincts primaires
de l'être humain. Comme mentionné plus haut, un Michael
Douglas incarne par une prestation bien dosé le personnage de
cet homme d’une froideur incroyable au départ, riche à
souhait cela va de soit, et qui pourtant, se trouve branché à
un respirateur artificiel, métaphoriquement parlant bien entendu.
Ce qu’aborde donc David Fincher dans son troisième long
métrage se situe au niveau de l’instinct de survie de l’homme
dans le monde moderne. Qu’il s’agisse d’un énorme
canular ou non, le personnage principal se verra transporter dans des
situations qui l’amèneront à un stade quasi bestial,
peut-être pas le mot le plus approprié dans le cas présent,
mais c'est le premier qui vient à l'esprit, alors qu'il se retrouvera
dans une situation où il perdra tour à tour tout ce qui
croyait être la cause de son maintien en vie, ses illusions, son
avoir. L’exploitation de ce point est on ne peut plus satisfaisant.
On fait bien attention de ne pas tomber dans la facilité et de
ne pas avoir à passer au surligneur fluorescent des détails
qui n’ont pas besoin d’être mis en évidence
par le dialogue, comme c’est souvent le cas dans bien des productions
du genre, puisque le visuel réussi à remplir cette tâche
par elle-même. Et c’est un fait que j’ai particulièrement
aimé car pour une fois je dois dire que c’est un suspense
où le dosage d’explications et de pistes ne m’a aucunement
fait soupirer et même qu’au contraire, j’ai trouvé
que l’utilisation de celles-ci était bien imagé
du point de vue de la mise en scène.
Une des grandes richesses des réalisations de David Fincher a
toujours été de savoir captiver le spectateur d'un bout
à l'autre du spectacle, de la réflexion. Mission encore
une fois accomplie pour The Game où ce dernier réussi
sans trop de problème à nous offrir ce qui pourrait constituer
une des dernières définition en terme de nouveau cinéma
de ce que l'on veut vraiment insinuer quand on utilise l'expression
"être sur le bout de son siège". Rien à
dire de nouveau sur l’aspect esthétique du travail du cinéaste.
Il poursuit sur une lancée sans faille en continuant d’exploitée
une formule visuelle qui lui est authentique. Ce qui change par contre,
c’est le rythme. Ici le réalisateur utilise beaucoup moins
d’extravagance au niveau des plans pour offrir un travail beaucoup
plus calme et sobre et de nature théâtrale, ce qui n’est
aucunement un défaut car le tout suit en même temps la
dynamique du film et le résultat demeure bien fignolé.
Difficile de ne pas suivre avec attention les moindres recoins de ce
troisième long métrage du réalisateur au talent
maintenant beaucoup plus reconnu grâce à Se7en.
Un suspense accrocheur qui vous tiendra en haleine jusqu’à
la fin où dans ce simple fait réside une des forces principales
du film : la manipulation. Un doute persiste à planer dans l’esprit
du spectateur qui croira à mainte reprises avoir trouvé
une issue à ce casse-tête formidablement orchestré
en aillant cependant toujours cette vague idée penchant plutôt
vers une autre solution. Sans atteindre le niveau d’esthétisme
de Se7en, Fincher réussi tout de même à
poursuivre un parcours sans faille. Du point de vue de la filmographie
de ce dernier, on pourrait interpréter The Game comme
étant un certain retour au calme avant la tempête. Un divertissement
extraordinairement efficace.
Version française :
Jouer avec la mort
Scénario :
John D. Brancato, Michael Ferris
Distribution :
Michael Douglas, Sean Penn, Deborah Unger, James
Rebhorn
Durée :
128 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
24 Septembre 2003