FANTASTIC FOUR (2005)
Tim Story
Par Alexandre Fontaine Rousseau
L'avalanche durant les dernières années d'adaptations
de divers comic books ne semble qu'avoir attisé l'appétit
du grand public pour de nouvelles aventures tirées des pages
des bandes dessinées de Marvel et de DC, et ce malgré
l'abondance de produits tièdes ou carrément mal fichus
tels que The Punisher, Elektra, Catwoman
et Daredevil. Véritables mythes populaires de l'Amérique
du vingtième siècle, les super-héros de tous acabits
cachent souvent à même leurs origines, leur philosophie
particulière ou la nature de leur lutte les bases d'une réflexion
sur la société dont ils sont issus. Les X-Men ne sont-ils
pas après tout l'incarnation pompée aux stéroïdes
génétiques des afro-américains et de leur combat
pour obtenir l'égalité dans l'Amérique ségrégationniste,
le professeur X agissant à titre de Martin Luther King du mouvement
d'émancipation des mutants tandis que son éternel adversaire
Magneto demeure une sorte de Malcolm X aux méthodes expéditrices?
Mais tandis que Christopher Nolan prouvait avec son Batman Begins
qu'il y avait encore du neuf à soutirer de ce sous-genre surexploité
du cinéma fantastique, le réalisateur Tim Story n'offre
avec ces Fantastic Four peu ingénieux qu'un gros blockbuster
générique sans âme et sans imagination.
Il n'y a pas que cette cruelle absence de sous-texte qui soit responsable
de l'échec du petit dernier des productions Marvel. À
la limite, Fantastic Four aurait fonctionné au niveau
purement superficiel à titre de divertissement estival léger
que l'on aurait pu s'en satisfaire. C'est après tout ce que semble
viser sans gêne le film de Story, qui joue à fond la carte
du populisme convenu. Le problème est que très peu ne
semble avoir lieu durant les interminables cent-six minutes que durent
le film. Bien qu'il soit axé sur les origines de ses quatre héros
bien connus et de leur principal ennemi le Dr. Doom, Fantastic Four
éclipse rapidement cet élément clé du scénario
pour se concentrer sur une série de situations banales et de
conflits personnels ennuyeux qu'il pimente d'un humour facile et rarement
efficace.
En fait, on se demande même carrément si les scénaristes
étaient conscients de l'étendue tout de même remarquable
des pouvoirs de ces personnages tant l'ensemble du film avance sur le
pilotage automatique, sans que la moindre fascination ou le plus minime
iota d'intérêt pour le sort de ceux-ci ne transparaisse
à l'écran. Tandis que les états d'âme d'un
gros tas de roche occupent presque la moitié du film, l'histoire
d'amour misérable entre Mr. Fantastic et Invisible Girl s'assure
d'en ralentir la progression déjà mollassonne jusqu'au
point zéro. Où intérêt il n'y a plus... Comme
pour rendre les choses plus pénibles, Fantastic Four
baigne dans le kitsch inconscient en semblant miser sur ces moments
gênants de maladresse pour plaire à un public jeune et
dynamique.
Public qui, d'ailleurs, devrait retourner voir Batman Begins
une seconde fois plutôt que se farcir cet enchevêtrement
de clichés bons marchés servis sans aucune passion et
sans la moindre trace d'entrain. Même les effets spéciaux
surprennent par leur terrible manque d'originalité tandis que
l'esthétique du projet n'a franchement aucun panache. On arrive
difficilement à comprendre si Fantastic Four tentait
d'être une comédie ou si les concepteurs visaient à
déguiser une comédie romantique en drame fantastique.
Mais tout cela importe peu lorsque l'on considère que la durée
de vie de ce divertissement peu inspiré devrait être inversement
proportionnel au temps qu'il semble durer. Le gag est facile et paresseux,
mais mérite d'être fait tant ces deux qualificatifs résument
à merveille cette production médiocre: Fantastic Four
n'a absolument rien de fantastique. En fait, rarement un film de super-héros
aura-t-il aussi vainement baigné dans la banalité alors
que l'un de ses personnages a le pouvoir de détruire l'atmosphère
terrestre... L'ATMOSPHÈRE TERRESTRE!!!
Version française :
Les Quatre fantastiques
Scénario :
Michael France, Mark Frost
Distribution :
Ioan Gruffudd, Jessica Alba, Chris Evans, Michael
Chiklis
Durée :
106 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
14 Juillet 2005