EXISTENZ (1999)
David Cronenberg
Par Frédéric Rochefort-Allie
De plus en plus de jeux vidéos commencent à simuler la
vie. D'ailleurs, le jeu le plus populaire de tous les temps, The
Sims, propose lui-même d'échapper à sa vie
en en recréant une nouvelle. Le film de Cronenberg parait donc
d'avant-garde, car il traita du sujet avant même que le problème
n'apparaisse. Il faut spécifier que Cronenberg n'est pas non
plus ce qu'on pourrait qualifier de cinéaste «normal».
Ici, l'histoire gravite autour de deux personnages, soit une gourou
des jeux pirates (Jennifer Jason Leigh) et son garde du corps (Jude
Law). Lors de la conférence de lancement du jeu eXistenZ,
un terroriste vient tirer sur la créatrice du jeux. Son garde
du corps l'emmènera donc loin des lieux pour la protéger.
C'est alors qu'ils testeront le jeu pour voir s'il fonctionne toujours.
Mais le problème dans tout ça, c'est que tout le monde
cherche à tuer la mère d'eXistenZ et comment
savoir dans un univers au look si réaliste ce qui est vrai et
ce qui ne l'est pas.
Cronenberg nous propose un film presque parfait. On oublie la popularité
de Jude Law le temps d'un film et on pénètre à
fond dans ce film «pré-Matrix». Le port
du pod dans la colonne vertébrale rappelle d'ailleurs
des images de ce dernier. Ce que j'ai particulièrement aimé
d'eXistenZ est sa capacité de nous transporter dans
un autre univers quand à nos yeux, il reste fondamentalement
le même. Les acteurs incarnant des personnages du jeu vidéo
sont intentionnellement froids. J'ai eu la même impression de
détachement face au monde réel. J'ai particulièrement
aimé la performance de Willem Dafoe en tant que pompiste pirate
et celle de Jennifer Jason Leigh. La musique, signée Howard Shore,
m'a vaguement rappelée, par moment, ses plus récentes
compositions pour The Lord Of The Rings, mais elle reste toutefois
très près des images, donc très sombre dans le
cas présent. J'ai remarqué un souci inouï du détail
chez Cronenberg. Il va jusqu' à faire changer la coupe de cheveux
de ses acteurs pour qu'on puisse sentir le changement entre les univers.
L'effet est assez bien réussi. Parfois, on ne fait que sentir
le changement sans même l'apercevoir. Le seul problème
est qu'il y va peut-être un peu trop fort sur la symbolique des
objets. Par exemple, le pod (la console de jeu) ne se répare
que par une opération chirurgicale et il se branche par un cordon
ombilical. Le rapport mère-enfant entre la gourou et sa console
est donc un peu trop clair. Il y a aussi une scène vers la fin
qui tire un peu vers le ridicule car le son est légèrement
trop décalé face à l'action.
Il reste qu'eXistenZ procure de très beaux moments de
cinéma et que personnellement, je préfère ce film
à The Matrix. Cronenberg signe donc ici un film qui
va plaire aux grands amateurs de science-fiction comme à ceux
qui ne sont pas des supers adeptes du genre.
Je vous recommande donc Spider et The Fly de David
Cronenberg.
Version française : eXistenZ
Scénario : David Cronenberg
Distribution : Jennifer Jason Leigh, Jude Law, Ian Holm, Willem
Dafoe
Durée : 97 minutes
Origine : Canada, Royaume-Uni, France
Publiée le : 1er Juillet 2003
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