DON Q SON OF ZORRO (1925)
Donald Crisp
Par Frédéric Rochefort-Allie
Si ce film avait été fait au 21e siècle, il aurait
probablement porté le titre 2 Mask 2 Zorros ou tout
simplement Zorro 2: The Return. Heureusement, cinq ans plus
tard c'est Douglas Fairbanks Sr lui-même qui reprit le flambeau
et non des producteurs comme Jerry Bruckheimer ou Joel Silver. Suite
à la folie Zorro, l'auteur Johnston McCulley écrivit deux
autres romans relatant les aventures du héros masqué,
ce qui eut d'ailleurs pour effet de créer un grand intérêt
pour une suite au film Mark of Zorro. Comme la demande était
grande, Douglas Fairbanks créa Don Q. Ce qui paraissait
alors comme une simple suite se révéla bien plus songé
qu'on pensait, car Fairbanks décida de revisiter le personnage
sous un tout autre angle : le fils de Zorro. Bref, un Zorro sans Zorro.
Vous imagineriez le choc si c'était sorti à notre époque
de cinéma manufacturier ?
Don Cesar (Douglas Fairbanks Sr), fils de Don Diego (Douglas Fairbanks
Sr), suit la tradition familiale et va étudier en Espagne, non
loin des ruines du domaine ancestral. Jouant souvent avec son fouet,
Don Cesar offusque Don Sebastian (Donald Crisp), un membre de la garde
de la Reine. Suite à un geste héroïque, Don Cesar
se propulse dans les hautes sphères d'Espagne et se retrouve
au coeur d'un triangle amoureux impliquant la fille d'un ami de son
père (Mary Astor) et le redoutable Don Sebastian.
Douglas Fairbanks releva tout un défi. Non seulement ce n'est
plus l'histoire de Don Diego, mais il n'y a pratiquement aucune trace
de Zorro. C'est une des raisons qui fait que le scénario est
exemplaire dans le domaine des suites. Il démontre parfaitement
qu'elles ne sont pas obligées de reprendre des éléments
clefs à la lettre pour être fidèles à l'esprit
de leur original. On se demande alors ce que serait plusieurs suites
si, au lieu de répéter le même moule, elles se permettaient
comme chez Don Q d'innover. Don Q est probablement
le Zorro le plus shakespearien. Les personnages et le drame y sont beaucoup
plus travaillés qu'auparavant. La suite se rapproche beaucoup
plus de la tragédie que du film de cape et d'épée
traditionnel. Ici, le triangle amoureux ne sert plus de fil conducteur
aux cascades mais bien de pilier. L'humour est toujours au rendez-vous,
car après tout il s'agit bien d'un épisode de Zorro. Cependant,
ici l'héroïsme du personnage réside beaucoup plus
dans les décisions qu'il prendra afin de se tirer d'une situation
houleuse que dans la splendeur de ses combats.
Même si Don Q se concentre plus sur les relations entre
personnages, on y trouve encore une fois bon nombre de cascades de la
part de l'acteur, étant sa marque de commerce dans le métier.
Celles-ci, disposant d'un plus gros budget et bénéficiant
du progrès cinématographique, sont un peu plus réussies,
quoique les duels à l'épée étaient supérieurs
dans le premier. C'est avec joie qu'on aperçoit Douglas Fairbanks
incarner deux rôles à la fois, qu'on distingue parfaitement
d'ailleurs. Cette fois, les acteurs secondaires n'étant plus
dans l'ombre du héros, on remarque un peu plus l'ensemble de
la distribution. Donald Crisp ne tombe pas dans la caricature dans son
interprétation de Don Sebastian, un rival aux motivations on
ne peut plus classiques et un être perfide et froid. Il en va
de même chez Mary Astor qui incarne avec une candeur délectable
cette femme délicate et passionnée dont Don Cesar s'éprendra.
Bref, par sa différence, Don Q s'inscrit logiquement
comme une conclusion admirable d'une belle, bien que brève, série
de films, qui malheureusement verra naitre bon nombre de navets par
la suite portant le même nom. Cette suite ne surpasse pas Mark
Of Zorro, au contraire, elle l'égale en tant que référence.
Cette fois par contre, c'est beaucoup plus pour l'ingéniosité
du récit. Chapeau bas à cette grande réussite du
cinéma hollywoodien, qu'elle serve de leçon à quiconque
la découvrira.
Version française : -
Scénario :
Jack Cunningham, Kate Prichard & Hesketh
Prichard (roman)
Distribution :
Douglas Fairbanks, Mary Astor, Jack McDonald, Donald
Crisp
Durée :
111 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
25 Août 2004