DEMENTIA 13 (1963)
Francis Ford Coppola
Par Alexandre Fontaine Rousseau
Même les plus grands commencent au bas de l'échelle et,
en 1963, le ras des pâquerettes aux États-Unis est sans
l'ombre d'un doute l'empire du producteur de série b Roger Corman.
Il n'est donc pas surprenant de voir nicher dans les bas-fonds de la
filmographie de Francis Ford Coppola le médiocre Dementia
13, un sous-produit peu convaincant des balbutiements du cinéma
d'horreur que l'on peut sans remords glisser dans la belle famille des
enfants illégitimes de Psycho.
Tout débute beaucoup trop vite lorsque le mari de Louise, John,
meurt subitement d'un infarctus dans une barque. Désemparée,
notre veuve d'à peine cinq minutes décide de cacher la
mort de son mari à la famille de celui-ci dans l'espoir de pouvoir
collecter sa part de l'héritage substantiel inhérent à
toute histoire mettant en vedette une richissime dynastie irlandaise.
C'est donc avec ce mensonge gros comme le bras sur la conscience qu'elle
se rend seule au manoir ancestral des Haloran pour la cérémonie
rituelle commémorant la tragique mort de la plus jeune des filles
de Dame Haloran.
Le problème, c'est qu'un mystérieux maniaque appréciant
les plaisirs simples de la vie tels que le meurtre à la hache
se gambade dans la forêt encerclant la luxueuse demeure. Tout
comme dans le classique d'Hitchcock duquel il emprunte la plupart de
ses trucs, le personnage qui semblait mener Dementia 13 est
vite assassiné et l'histoire prend un virage inattendu. Enfin,
c'est probablement ce qu'avait prévu l'obscur scénario
de Coppola...
Mais Dementia 13 dilue son intrigue vraiment simple dans une
multitude de ramifications inutiles et devient rapidement une enquête
policière dans la plus pure tradition d'Agatha Christie. Tous
les personnages s'échangent des regards suspects gratuits alors
qu'un minimum d'expérience permet de deviner l'identité
du meurtrier avant même que celui-ci ne commette un crime. Dès
lors, il ne reste plus qu'à espérer une ambiance glauque
et inquiétante ou un quelconque plan mémorable à
se mettre sous la dent.
Malheureusement, c'est surtout de l'exécrable montage, à
la limite incohérent, des scènes de meurtre dont on se
souviendra. Dementia 13 est un ''whodunit'' classique
et peu inspiré tourné pour la modique somme de 30,000
dollars entre les prises d'une autre production de Corman nécessitant
un décor de château lugubre. Bien entendu, on ne s'attend
pas en l'écoutant à renouer avec l'ambition de la trilogie
des Godfather ou avec la profondeur d'Apocalypse Now.
Alors que des films tels que le surprenant Killer's Kiss de
Kubrick ou le très bon Who's That Knocking At My Door
de Scorcese présentent à l'état brut le talent
de leurs créateurs respectifs, Dementia 13 est aussi
générique qu'ennuyant. C'est une curiosité historique
d'un certain intérêt, entre autre parce que Patrick Magee
y anticipe à l'intonation près une de ses répliques
les plus marquantes dans A Clockwork Orange, mais ceux qui
espèrent découvrir un obscur petit classique seront sérieusement
déçus.
Version française : -
Scénario :
Francis Ford Coppola, Jack Hill
Distribution :
William Campbell, Luana Anders, Bart Patton, Mary
Mitchel
Durée :
75 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
17 Septembre 2006