DAY OF THE DEAD (1985)
George A. Romero
Par Alexandre Fontaine Rousseau
La situation de l'humanité est devenue franchement désespérée.
Quelques survivants dispersés, devenus la minorité sur
une Terre peuplée par les zombies dans une proportion de 400
000 pour un, perdent progressivement espoir et raison des suites de
leur combat quotidien pour survivre. Terrés dans un bunker, une
équipe de savants protégés par une poignée
de soldats s'affaire à trouver un moyen de renverser la vapeur.
Peut-on contrer les effets de cette étrange dégénérescence
ou même en contrôler les victimes? Alors que la foi du corps
militaire en la science se dégrade à vue d'oeil, les chercheurs
n'arrivent plus à s'entendre entre eux sur une direction dans
laquelle pousser leurs recherches. On commence à manquer de matériel
et de munitions, et le décès du colonel jusqu'alors en
charge des soldats place au pouvoir un capitaine impatient, violent
et assoiffé de pouvoir.
Le pari que tente de relever Georges A. Romero avec Day of the Dead
est aussi ambitieux qu'il est digne de mention. En effet, le vénéré
réalisateur s'applique avec le troisième chapitre de sa
série culte à axer un film de zombies sur les relations
humaines dans une situation catastrophique plutôt que sur leur
confrontation avec une horde de morts-vivants. C'est une piste que Dawn
of the Dead avait déjà défrichée mais
que cette suite pousse encore plus loin. Malheureusement, l'inspiration
n'est pas vraiment au rendez-vous et le produit fini demeure plus souvent
maladroit qu'intéressant. De bonnes idées sont lancées
dans toutes les directions mais aucune n'est exploitée sérieusement.
Day of the Dead avance une ébauche de critique sur la
dictature militaire et gratte la surface d'un commentaire sur l'éthique
scientifique pour finalement se perdre dans une suite de discussions
philosophiques ratées sur en fin de compte bien peu de choses.
Bien des éléments de cette intrigue diluée finissent
par sombrer dans le ridicule consommé, tout particulièrement
la relation entre le professeur Logan et un zombie apprivoisé.
En bout de ligne, l'absence d'une véritable ligne directrice
a des effets carrément catastrophiques sur le rythme et sur la
structure narrative du film. Day of the Dead est une masse
informe dont les nombreuses ramifications sont mal exploitées.
Le pire dans cette histoire demeure cette grossière direction
d'acteur qu'un Romero trop occupé à compléter le
film malgré un budget déficient semble avoir complètement
écarté de sa liste de priorités. Tous les comédiens
finissent par camper leur personnage à l'aide d'une livraison
terriblement clichée qu'ils appliquent à chaque réplique.
Logan est un illuminé et dit par conséquent chaque réplique
les yeux grands ouverts. Le très frustré capitaine Rhodes
est sur le point d'éclater à chaque heure de la journée.
Lorsqu'enfin les zombies réussissent à pénétrer
le périmètre de sécurité, on a déjà
depuis longtemps deviné qui mérite de survivre et qui
devra périr. Mais le problème est encore plus grave: Romero
nous a perdu et nous écoutons son film tels des zombies perdus
dans un centre d'achat. C'est par réflexe que l'on retourne dans
son univers en espérant y trouver quoi que ce soit à se
mettre sous la dent. Mais Day of the Dead, privé de
la dimension férocement satyrique de son prédécesseur,
erre sans raison d'une scène à l'autre et d'une idée
à l'autre sans motivation réelle. Ne restent plus que
les effets spéciaux gore de Tom Savini pour satisfaire les amateurs
de carnage sanglant.
On voudrait aimer Day of the Dead. On voudrait sincèrement
pouvoir dire qu'il s'agit d'une suite inventive et férocement
anticonformiste à Dawn of the Dead. Mais malgré
toutes ses bonnes intentions, et Dieu seul sait qu'il en a à
revendre, le film de Romero souffre d'une exécution déficiente
et d'un manque de ressources que rend cruellement évident une
finale bâclée et franchement mal foutue. Les fervents de
Romero voueront à jamais un culte aveugle à ce film décevant.
Reste que 28 Days Later, qui s'en est inspiré à
plusieurs niveaux, livre la marchandise avec beaucoup plus d'assurance
que cet exercice sympathique mais à la limite presque auto-parodique.
Version française :
Le Jour des morts
Scénario :
George A. Romero
Distribution :
Lori Cardille, Terry Alexander, Joseph Pilato,
Jarlath Conroy
Durée :
102 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
17 Août 2005