DAREDEVIL (2003)
Mark Steven Johnson
Par Louis-Jérôme Cloutier
Devant le succès remporté par X-Men et Spider-Man,
les producteurs hollywoodiens veulent tourner le maximum de film de
superhéros. Pas étonnant que Batman et Superman
reviendront sur grand écran. Également tiré d’une
bande dessinée de Marvel, Daredevil est cependant nettement
moins connu. C’est à Mark Steven Johnson que l’on
a donné la charge de scénariser et de réaliser
un film sur l’homme sans peur. Cependant, même si Johnson
est un grand fan de ce justicier, ça ne veut pas dire qu’il
est le plus apte à le transposer sur grand écran.
Matt Murdock est un avocat qui a perdu la vue dans sa jeunesse. Suite
à cet accident, ses autres sens tels que l’ouïe sont
maintenant beaucoup plus sensibles et il est doté d’une
sorte de sens radar. Se transformant en Daredevil, Murdock tente de
gagner la nuit les procès qu’il perd le jour. C’est
aussi un homme qui souffre et qui se questionne sur les choix qu’il
fait. C’est un aspect sur lequel le réalisateur s’arrête
un peu sans l’exploiter vraiment. Dommage, il est très
intéressant lorsque l’on s’intéresse davantage
à l’aspect psychologique du héros (Hulk)
qu’aux prouesses qu’il peut faire. Il n’y a pas que
cela de décevant dans Daredevil. Le film entier est
totalement raté. La raison principale se situe au niveau du scénario.
L’histoire est non originale, les dialogues sont stupides et les
situations sont mal amenées. Le meilleur exemple est la présentation
des divers personnages et plus précisément celle d’Elektra,
Kingpin et Bulleye. Chaque fois que l’on voit l’un d’eux
pour la première fois, une chanson différente commence
et il ne manque que dans le bas de l’écran le nom du personnage.
Si je compare à Spider-Man et X-Men, les personnages
sont bien introduits et viennent s’ajouter à l’histoire
et à l’action qui est en cours.
Mais il y a aussi d’autres mises en situation très mal
élaborées. Le meilleur exemple est le suivant. Matt Murdock
rencontre Elektra dans un café. Il l’a suit, tente de la
séduire et ils commencent à se battre dangereusement.
Une fois la bataille terminée, Elektra accepte enfin de marcher
et de parler avec lui. Certainement l’une des mises en scène
des plus ridicules que j’ai pu voir dans un film du genre. Ce
qu’il y a d’encore plus insignifiant c’est que lorsque
les deux se rencontrent à nouveau, on tente de nous émouvoir
en cinq minutes alors que les personnages tombent en amour. En ce qui
concerne l’ensemble du film, plusieurs moments sont du copié/collé
de Spider-Man dont on s’est trop largement inspiré.
Johnson a donc complètement raté son scénario qui
ne peut même pas offrir un nombre suffisant et intéressant
de séquences d’action. Côté réalisation,
les choses s’améliorent. Je ne peux pas dire que son travail
soit complètement mauvais. Certaines séquences d’actions
sont bien filmées alors que d'autres frôlent l’amateurisme
avec des choix de plans plutôt douteux. Un montage très
incohérent n’aide pas la cause. J’ajouterai que le
film souffre d’un rythme qui ne cesse de changer. Parfois, plusieurs
scènes s’enchainent très rapidement et par la suite,
une autre qui semble parfaitement inutile s’éternise. Le
pire est que le film ne dure que 95 minutes. Est-ce que plusieurs scènes
ont été coupées ou l’on manquait seulement
d’idées?
Pour ce qui est des acteurs, Ben Affleck s’en tire étonnamment
bien dans son rôle. Il répète encore les mêmes
mimiques qui en font un acteur moyen, mais je dois dire que Johnson
ne semble pas très bon pour diriger les acteurs. Jennifer Garner
semble être littéralement perdue et nous offre trois émotions:
joie, tristesse et colère. Micheal Clarke Duncan nous offre également
une prestation en trois émotions. Ne reste que Colin Farrell
qui arrive à tirer son épingle du jeu et à créer
un personnage assez mémorable. Évidemment, un film de
superhéros nécessite souvent des effets spéciaux.
Dans ce cas-ci, ils sont parfois bien réussis et d’autres
fois complètement manqués. L’effet le mieux fait
est certainement la vision radar de Murdock que l’on utilise assez
souvent avec une bonne efficacité. Cependant, la plus grande
utilisation des effets numériques sert à recréer
les personnages. Certaines séquences frisent le ridicule alors
que l’on voit clairement deux hommes animés par ordinateur
se battre.
Bref, Daredevil est un film mauvais et raté qui n’a
réussi à avoir autant d’attention que grâce
à la folie pour les films de superhéros. Il ne réussit
pas à créer un attachement envers les personnages, est
rempli de stupidités et n’est même pas agréable
pour l’action. Ajouter à tout cela une bande sonore fort
mal choisie et des séquences parfaitement inutiles dont on cherche
vainement la nécessité. Je suppose que ceux qui pourront
laisser leur cerveau de côté y trouveront un film très
léger qui arrive à faire passer le temps. Les plus grands
fans du film, eux, devraient sans aucun doute se procurer le DVD qui
est littéralement bourré de suppléments. Du cinéma
préfabriqué qui donne envie de revoir Hulk et
X2.
Version française :
Daredevil
Scénario :
Mark Steven Johnson
Distribution :
Ben Affleck, Jennifer Garner, Michael Clarke Duncan,
Colin Farrell
Durée :
103 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
2 Août 2003