CLOSER (2004)
Mike Nichols
Par Louis-Jérôme Cloutier
Plus les films d’amour suivent, plus ils se ressemblent. Pourquoi
toujours nous exposer les mêmes côtés de ces relations?
Le cinéma a parfois le défaut de réduire des sujets
extrêmement complexes à des questions de sentiments très
primaires qui sont ensuite systématiquement recrachés
sur chaque pellicule qui passe. Prenons donc un chemin différent,
explorons une face très peu explorée au cinéma.
Dévoilons des personnages dans toutes leurs imperfections qui
possèdent des sentiments complexes et parfois contradictoires.
Présentons des émotions reliées à l’amour
qui sont trop souvent oubliées dans la masse de films déferlant
dans les cinémas chaque année.
Closer relate un chassé-croisé amoureux entre
quatre habitants de Londres. Mais plutôt que de démontrer
un portrait complet de leur relation, le scénario s’efforce
plutôt de nous en dévoiler certains moments clés,
généralement des scènes de séduction ou
de rupture. Si ce n’était des différents indices
temporels dispensés par les personnages, il serait difficile
de saisir que ce film qui semble a priori se dérouler sur plusieurs
jours à lieu sur plusieurs années. Tout l’enjeu
réside à présenter des périodes de transitions
dans les relations, et ce sont plus souvent qu’autrement des scènes
fortes en tension psychologique. L’amour n’avait pas paru
aussi cynique depuis fort longtemps.
Cet exercice plutôt particulier ne vise apparemment aucun but
en particulier, mais il s’agit tout de même d’une
analyse fascinante de l’amour au 21e siècle. Une réflexion
ponctuée par des dialogues incisifs, mordants, abondants en ironie
et admirablement servis par quatre acteurs au meilleur de leur art.
Impossible de passer à côté de celle dont l’année
2004 fut celle de la consécration, Natalie Portman. Cette jeune
actrice talentueuse a enfin eu la chance de démontrer ses qualités
autrement que par des mégaproductions à la Star Wars.
Garden State à ouvert la voie au dévoilement
de son savoir-faire que tous connaissaient sans jamais l’avoir
véritablement vu. Closer ne fait que venir confirmer
le tout. On retrouve ensuite Clive Owen qui démontre de façon
claire par une prestation vivante et nuancée qu’il peut
jouer dans la cour des grands et qu’il possède les attributs
pour soutenir un film dans un rôle phare. Jude Law, égal
à lui-même, est toujours aussi savoureux, tout comme Julia
Roberts qui s’offre un rôle à sa mesure.
Et ces acteurs se glissent dans la peau de personnages très bien
conçus à la base, des constructions de chair et d’os
possédant des identités qui leur sont propres. Pour son
retour derrière la caméra après une brève,
mais fructueuse incursion à la télévision, Mike
Nichols offre une réalisation froide et clinique, mais élégante.
Les choix de plans sont des plus judicieux et le peu de mouvement de
caméra capte efficacement les divers échanges au travers
d’acteurs admirablement bien dirigés. Pourtant, Closer
aurait pu échouer lamentablement, ne serait-ce que parce qu’il
s’agit avant tout d’une pièce de théâtre
adapté pour le cinéma. Deux domaines qui partagent certaines
caractéristiques, mais dont les mécaniques sont foncièrement
différentes. Loin de la pièce de théâtre
filmée, Closer est une adaptation intelligente et en
tout point réussie.
Un exercice cinématographique du genre est parfois un pari risqué.
Un film se concentrant uniquement sur des échanges entre différents
personnages doit être admirable dans plusieurs de ses facettes
pour espérer mener à un résultat satisfaisant.
Nichols a parfaitement remporté son pari. Non seulement retrouve-t-on
la meilleure concentration de prestations de qualité en 2004,
mais en plus, les dialogues savent maintenir à eux seuls l’attention
du spectateur qui devient accrochée littéralement à
ce jeu de mensonges et de trahisons. Un exercice sans autre véritable
but que d’offrir une expérience cinématographique
hautement satisfaisante. Comme quoi on peut tout faire grâce à
des acteurs de qualités, un bon scénario et une maitrise
de sa caméra. Quand même, la plus grande qualité
de Closer demeure qu’il s’agit d’une production
parlant de l’amour sous un angle différent et en étant
présentée de manière distincte.
Version française :
Intime
Scénario :
Patrick Marber
Distribution :
Jude Law, Julia Roberts, Natalie Portman, Clive
Owen
Durée :
100 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
24 Février 2005