CARRIE (1976)
Brian De Palma
Par Frédéric Rochefort-Allie
Difficile, quand on entend le nom de Carrie, de ne pas s'imaginer la
célèbre scène du bal de graduation. Que vous ayez
vu le film ou non, l'image de l'adolescente ensanglantée devant
les flammes s'est gravée dans notre culture, comme la douche
de Psycho ou le «Heeeeere's Johnny !»
de Shining. Le film lui-même marque un point tournant
pour quatre carrières, celles de Sissy Spacek, de John Travolta,
Brian De Palma, mais plus important encore, le premier d'une longue
série d'adaptations de livres de Stephen King.
L'auteur lui-même n'est plus à présenter, considéré
comme étant l'un des meilleurs auteurs (mais surtout l'un des
plus prolifiques) du roman fantastique, une étrange malédiction
veut que très peu de ses romans aient été bien
adaptés. Carrie fait figure d'exception. Ce film se
penche sur la souffrance que peut ressentir une jeune adolescente (Sissy
Spacek) incomprise et malmenée par ses collègues de classe,
étant même la tête de turc de ses professeurs. Elle
se découvrira peu à peu des dons de télékinésie,
lesquels ne seront pas utilisés à de bonnes fins. Pour
une des rares fois dans le cinéma, ce n'est pas l'aspect fantastique
qui prédomine dans l'horreur, mais bien la nature même
des personnages. Carrie n'est pas une mauvaise personne, en fait, on
la prend facilement en pitié. C'est son entourage qui est horrible,
de la mère au fanatisme religieux au directeur d'école
qui ferme les yeux.
Les puristes pourront crier au massacre, mais chaque décision
qu'a pris le scénariste Lawrence D. Cohen, de l'élimination
de souvenirs d'enfance superflus au multiples points de vue des personnages,
restructure le film en le concentrant sur l'essentiel, la souffrance
de Carrie. L'histoire a aussi prouvée avec The Shining
que ce ne sont pas toujours les adaptations les plus fidèles
à Stephen King qui en font les meilleurs films.
Brian De Palma porte fantastiquement bien ce récit à l'écran,
le douant d'une ingéniosité visuelle d'une grande intensité.
Non seulement innove-t-il avec sa signature visuelle, qu'on reconnait
aisément au travers de ses split-screens légendaires,
mais il rend aussi hommage son maitre, le grand Hitchcock. Suivant un
peu le parcours de son héroïne, De Palma se déchaine
véritablement à la scène du bal, qui frappe un
très grand coup sur les autres films de son genre, et qui dépasse
de loin sa suite atroce.
Contrairement à ce que l'on pourrait s'imaginer, Sissy Spacek
était âgée de 27 ans lorsqu'elle incarna la jeune
et frêle Carrie. Elle relève donc un défi plus qu'admirable
à tenter de paraitre plus de 11 ans plus jeune qu'elle ne l'était
en réalité, une situation que beaucoup d'actrices règleraient
présentement avec quelques bonnes petites injections de botox,
donc chapeau!
Bref, Carrie est un incontournable du cinéma d'horreur
qui se doit d'être vu absolument et qui, mis à part les
modes vestimentaires et l'âge de ses acteurs vedettes, n'a pas
vieilli d'une ride. Voilà une autre preuve de la suprématie
du cinéma des années 70 au niveau de l'imagination et
de l'originalité qui entoure l'oeuvre en comparaison aux films
qu'on peut nous offrir présentement.
Version française :
Carrie
Scénario :
Lawrence D. Cohen, Stephen King (roman)
Distribution :
Sissy Spacek, Piper Laurie, Amy Irving, William
Katt
Durée :
98 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
31 Octobre 2005