CAPE FEAR (1991)
Martin Scorsese
Par Frédéric Rochefort-Allie
Bien avant que la folie actuelle des remakes ne débute, apparut
chez les studios Universal le scénario de Cape Fear,
reprise du célèbre thriller de 1962 mettant en vedette
Gregory Peck. Longtemps associé à Steven Spielberg, le
projet se retrouva finalement entre les mains de Martin Scorsese, le
réunissant une fois de plus avec son collègue de longue
date, Robert De Niro. Un heureux destin! Scorsese se sentait alors redevable
envers les studios Universal pour le soutient financier qu'ils avaient
apporté à The Last Temptaion of the Christ. Ne
vous laissez pas berner par sa pochette affreuse, Cape Fear
offre plus qu'il ne laisse croire.
Après 14 ans d'emprisonnement, Max Cady (Robert De Niro) n'a
qu'un seul but : se venger de son avocat (Nick Nolte). Ce dernier devra
donc subir un long procès de la part du bagnard qui mènera
éventuellement à des conflits familiaux (Jessica Lange,
Juliette Lewis) et à un affrontement inévitable.
Ce qui se trouve tout d'abord en Cape Fear, c'est le parfait
amalgame entre Scorsese et Hitchcock. Comme un véritable pastiche,
toute référence est faite avec le plus grand respect et
parfaitement incorporée dans la logique narrative. Les amateurs
du maître du suspense s'y retrouveront sans aucun dépaysement.
De Vertigo à Psycho, tous les ingrédients
s'y trouvent, même la superbe musique de Hermann et l'introduction
quasi psychédélique. Toutefois, Scorsese se permet d'y
ajouter sa sauce avec un véritable exercice de style. Le rythme
est vif, les images sont fascinantes et il explore en profondeur des
techniques abordées dans Taxi Driver. Une grande réussite
qui ne peut décevoir les amateurs du cinéaste. Qui dit
Scorsese implique aussi nécessairement une certaine dose de violence,
donc avis aux âmes sensibles, car bien qu'elle ne soit pas aussi
visible que dans les films gore, elle est indéniablement
un élément clef dans ce thriller.
Bien sur, comme pour chaque film de Scorsese, De Niro s'y investit littéralement
de corps et d'âme, se transformant en une véritable machine
à tuer. Un croisement entre le Terminator et Travis Bickle, rien
de moins. On y trouve pas une performance à tout casser comme
pour Raging Bull, mais De Niro reste particulièrement
convaincant, en particulier lorsqu'il partage l'écran avec Juliette
Lewis. Il existe une chimie entre les deux acteurs qui transforme une
simple rencontre entre personnages en un moment d'érotisme subtil.
Une scène purement magique qui, selon Scorsese, est une improvisation.
Nolte et Lange sont aussi particulièrement habiles lors des scènes
de dispute familiale, quoi qu'un peu prisonniers de leur propre jeu.
Cependant, les habitués du genre devineront la fin dès
le début. C'est probablement la principale faiblesse du film,
le cours des événements est un peu trop clair. Vous y
trouverez quand même votre lot de surprises, aussi invraisemblables
et amusantes les unes que les autres. Se déroulant aux environs
du 4 juillet, le film fait aussi subtilement le portrait des américains,
ce qui n'est pas désagréable non plus.
Donc, Cape Fear est un incontournable, que vous soyez fan d'Hitchcock
ou de Scorsese. Bien sur, on ne s'y casse pas la tête comme avec
Vertigo et le sang gicle un peu moins que dans Casino,
mais ce film se classe haut parmi ses compétiteurs des dernières
années. Il est fort probable qu'une adaptation par Spielberg
n'aurait pas été de cette trempe, malgré tout le
respect qu'on peut porter à son oeuvre. Scorsese a pondu un film
mémorable, rien de moins. Du grand remake digne d'Hitchcock!
Version française :
Les Nerfs à vif
Scénario :
Wesley Strick, John D. MacDonald (roman)
Distribution :
Robert De Niro, Nick Nolte, Jessica Lange, Juliette
Lewis
Durée :
128 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
23 Février 2004