BLADES OF GLORY (2007)
Josh Gordon
Will Speck
Par Jean-François Vandeuren
Alors qu’elle donna au cinéma américain certains
de ses comiques les plus populaires durant les années 70 et 80,
l’émission Saturday Night Live semble être
sur le déclin depuis déjà une bonne dizaine d’années.
Ainsi, la plupart des productions ayant pour tête d’affiche
l’un des derniers gradués du célèbre hebdomadaire
se sont presque toutes avérées des flops commerciaux et
critiques. Une marre d’échecs dans laquelle Will Ferrell
devint progressivement l’exception à la règle avant
de finalement s’emparer du titre de comédien le plus en
vue d’Hollywood. Ferrell prit d’ailleurs les bouchés
doubles dès son arrivée au grand écran en effectuant
un pont fort consistant entre ses rôles comiques et dramatiques,
collaborant notamment avec Woody Allen et Marc Foster tout en trouvant
le temps de faire une apparition délirante dans pratiquement
tous les films mettant en vedette ses comparses Ben Stiller, Owen Wilson
et Vince Vaughn. Preuve que la versatilité peut permettre à
un acteur de garder une certaine constance et d’éviter
que son public ne finisse par l’associer qu’à un
seul et même rôle. Mais qu’on le veuille ou non, c’est
dans des projets absurdes frôlant le ridicule de très près
que Ferrell est à son meilleur. En ce sens, Blades of Glory
apparaît comme le digne successeur de la trilogie en devenir du
comédien sur l’égocentrisme masculin aux États-Unis,
laquelle a déjà mis au monde les célèbres
Ricky Bobby et Ron Burgundy.
En soi, la prémisse de ce premier long-métrage de Josh
Gordon et Will Speck pouvait autant nous apparaître comme une
idée comique au potentiel énorme qu’un concept qui
aurait eu davantage sa place dans un numéro de quelques minutes
à la télévision. Le duo s’infiltre ainsi
dans le monde extrêmement viril du patinage artistique masculin
où une rivalité sans précédent fait rage
entre deux de ses plus grands ambassadeurs : Chazz Michael Michaels
(Farrell) et Jimmy MacElroy (Jon Heder). Les deux patineurs seront toutefois
bannis des compétitions individuelles suite à une escarmouche
survenue lors d’une remise de médailles qui aura plongé
le sport dans l’indignation. Quelques années plus tard,
un adorateur maniaque de MacElroy informera son héros qu’il
n’y a rien dans le règlement qui l’empêche
de participer aux championnats en double. Alors que la date butoir pour
les inscriptions approche à grand pas, un coach à la retraite
entretenant le vieux rêve de voir un duo réussir une figure
révolutionnaire de son cru convaincra les deux anciens rivaux
de faire équipe. Envers et contre tous, le trio bravera les critiques
et autres langues sales pour donner à un sport ordinairement
synonyme de grâce son tout premier tandem entièrement masculin.
Dans le pire des cas, Blades of Glory n’aurait pu être
qu’un autre exemple navrant d’une comédie ayant complètement
épuisée ses ressources après seulement vingt minutes
pour ensuite étirer la sauce de façon gênante par
le biais d’une série de gags de piètre qualité
qui n'auraient amusé que leurs auteurs. Fort heureusement, l’équipe
de scénaristes derrière le présent effort parvint
à reprendre l’une des formules les plus surexploités
du genre et à l’apprêter avec enthousiasme et juste
assez de matériel comique pour garder leur prémisse en
vie jusqu’à la toute fin sans que celle-ci ne perde jamais
de sa vigueur. L’équipe technique derrière Blades
of Glory fait d’ailleurs preuve d’une belle créativité
sur le plan humoristique en combinant de manière naturelle humour
absurde, burlesque et tout simplement stupide dans un ensemble qui ne
se prétend jamais plus drôle qui ne l’est vraiment,
mais qui rate rarement la cible également. Si les gags physiques
et de nature sexuelle sont évidemment à l’honneur,
ceux-ci sont également traités avec une certaine candeur
afin qu’ils ne dépassent jamais la limite permise en terme
de vulgarité. La clé du succès de cet entreprise
demeure par contre un Will Ferrell en très grande forme jouant
de façon toujours aussi juste et hilarante un personnage irrévérencieux
dont l’ego démesuré n’a d’égal
que son manque total de maturité et de jugement.
Les inconditionnels de Will Ferrell sauront évidemment à
quoi s’en tenir avec Blades of Glory. L’acteur
évite toutefois la redondance en ayant déjà assuré
une certaine diversité à sa filmographie, marquant ainsi
quelques pauses bien méritées pour un public qui ne pourra
alors qu’espérer un retour à ce type de comédies
on ne peut plus légères plutôt que de les appréhender
dans l’indifférence la plus totale. Josh Gordon et Will
Speck signent pour leur part une mise en scène aussi compétente
qu’anonyme à laquelle se greffent quelques artifices visuels
parfaitement risibles. De son côté, Jon Heder s’illustre
enfin dans un rôle d’envergure, lui qui accumule les navets
de façon déconcertante depuis son arrivée à
Hollywood. Ferrell et la vedette de Napoleon Dynamite forme
d’ailleurs un duo comique à la hauteur des espérances,
voire même l’un des plus efficaces que nous ait offert ce
genre de divertissement depuis longtemps. Cette nouvelle incarnation
de la comédie sportive n’est évidemment pas la première
et ne sera certainement pas la dernière, mais l’enjouement
et la constance avec lesquelles cette connerie nous est déblatérée
la renden néanmoins désopilante pour les bonnes raisons
l’espace d’un visionnement qui ne nous aura jamais donné
l’impression de perdre notre temps.
Version française : Les Rois du patin
Scénario : John Altschuler, Dave Krinsky, Jeff Cox
Distribution : Will Ferrell, Jon Heder, Will Arnett, Amy Poehler
Durée : 93 minutes
Origine : États-Unis
Publiée le : 11 Mai 2007
|