BATMAN BEGINS (2005)
Christopher Nolan
Par Jean-François Vandeuren
Après que Tim Burton ait placé le célèbre
justicier de Bob Kane dans un contexte fantastique surprenant, et que
Joel Schumacher ait grotesquement détruit en deux films une franchise
jusque là partie dans une direction fort enviable, voilà
que Warner Bros. tente de faire revivre en plein cœur de l’engouement
pour les adaptations de bandes dessinées les jours glorieux de
Batman, s’intéressant cette fois-ci à ses origines.
Un sujet qui n’avait jusque là pas vraiment été
abordé par la série, si ce n’est l’assassinat
des parents de Bruce Wayne alors qu’il était enfant. Batman
Begins s’annonçait au départ comme un des projets
les plus prometteurs d’Hollywood depuis fort longtemps. Voir Christopher
Nolan agir à titre de réalisateur et une liste aussi impressionnante
d’acteurs figurer au générique avait tout de réjouissant.
Fort heureusement, Batman Begins ne déçoit pas,
même qu’à plusieurs égards, il surprend énormément
par la richesse avec laquelle il traite le personnage de Bruce Wayne
et son mythique alter ego. Un film qui vaut aussi son pesant d’or
techniquement malgré certaines fautes, mais qui se définit
avant tout par ses notions psychologiques qui repoussent des limites
rarement aussi approfondies dans ce genre de film, mis à part
peut-être dans le Hulk d’Ang Lee.
Batman Begins se veut évidemment plus réaliste
et sombre que les opus précédents. Le scénario
signé Christopher Nolan et étonnamment Davis S. Goyer,
qui nous avait offert une assez faible clôture de la série
Blade l’an dernier, nous proposent une étoffe
extrêmement consistante qui aborde les notions de peur et de justice,
un sujet toujours bien d’actualité chez nos voisins du
Sud. Nous sommes donc plongés à une des époques
les plus sombres de Gotham City qui prend désormais les attraits
bien réelle d’une mégapole où règne
la corruption et le crime. Nous renouons avec Bruce Wayne alors qu’il
parcourt les bas fonds de la planète pour y étudier l’esprit
des criminels. Il sera invité à joindre les rangs d’une
organisation secrète dirigée par le mystérieux
Ra’s Al-Ghul qui croit pouvoir rétablir l’équilibre
mondial en éliminant le point sur la carte qui fait défaut.
Wayne sera alors entrainer par Henri Ducard qui lui apprendra à
contrôler sa peur et à l'exploiter afin de devenir plus
qu’un seul homme. Il sera par contre repousser par le concept
d’une justice barbare sans institution. Il retournera alors à
Gotham afin d’édifier un symbole valsant entre les deux
pensées. Ce qui épate à partir de ce moment, c’est
le souci du détail avec lequel Nolan est Goyer ont traité
l’entrainement et l’élaboration du personnage de
Batman, ses méthodes, son costume et son équipement, gardant
bien en tête que sous cette technologie se terre toujours la vulnérabilité
d’un être humain.
Christopher Nolan a aussi pu compter sur une distribution au talent
inimaginable où tous ici impressionnent sans exception. Si se
démarquent du lot les interprétations phénoménales
de Liam Neeson, Gary Oldman et Michael Caine, qui reprend avec tact
le rôle d’Alfred, c’est évidemment Christian
Bale qui vole la vedette grâce à un jeu extrêmement
solide, parvenant à transmettre avec une énergie remarquable
et toujours nuancée, autant le tourment que la détermination
de son personnage tout en excellant lorsqu’il revêt le légendaire
costume noir. Nolan fera également plaisir aux fans de son excellent
Memento grâce à une introduction remarquablement
non-linéaire dont le montage rappellera le désormais film
culte du réalisateur britannique. Ce dernier se montre par contre
sous un jour un peu plus confus dans le traitement de ses scènes
d’action qui ne sont pas toujours claires, un peu bernées
par le ton général du film à l’image d’une
très belle photographie, mais souvent très sombre. Une
mention honorable revient toutefois au cinéaste qui a tenu à
tourner son effort en faisant appel autant que possible aux bonnes vieilles
méthodes et non à une avalanche d’effets numériques.
Une incursion donc à couper le souffle dans l’esprit de
Bruce Wayne, traitant son alter ego avec un raffinement étonnant
qui parvient à exposer habilement cette hypothèse comme
quoi il s’agirait désormais de Batman qui doit se déguiser
en un richissime héritier pour accomplir son œuvre. L’effort
de Nolan nous offre en bout de ligne une série de réflexions
approfondies sur la peur, la justice et le lien se formant entre les
deux, tout en livrant sous cette abondante substance un divertissement
extrêmement efficace figurant parmi les meilleures adaptations
de bandes dessinées à ce jour, sinon la plus accomplie.
Espérons que les prochaines étapes de la série
de Nolan se révèleront aussi solide que cette résurrection
phénoménale d’un héros dont on croyait l’avenir
au cinéma terni à tout jamais il y a huit ans. L’endroit
où fut placé le titre du film n’est en ce sens aucunement
un hasard, nous rappelant que ce premier volet est réellement
une introduction à un univers aux possibilités réjouissantes.
Version française :
Batman : Le Commencement
Scénario :
David S. Goyer, Christopher Nolan
Distribution :
Christian Bale, Michael Caine, Liam Neeson, Gary
Oldman
Durée :
141 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
26 Juin 2005