ALIENS VS PREDATOR - REQUIEM (2007)
Colin Strause
Greg Strause
Par Jean-François Vandeuren
Nous n’avions aucunement besoin d’un Alien vs Predator,
et encore moins d’un deuxième. Mais même si le premier
épisode signé de la main peu habile de Paul W.S. Anderson
ne fut pas le lamentable échec tant escompté, il était
tout de même assez difficile d’imaginer qu’un produit
plus vide et superficiel ressortirait de ce second tour de piste que
plus personne n’espérait, ni ne souhaitait d’ailleurs.
Et bien il semblerait que proposer mieux que le réalisateur de
Soldier et Resident Evil soit une tâche absolument
colossale, du moins pour les nouveaux venus Colin et Greg Strause qui
réussirent à faire encore plus ridicule et méprisable
que leur prédécesseur. Ce modeste déchet ayant
pour titre Aliens vs Predator - Requiem (?) débute en
soi exactement là où le premier film se terminait. Suite
à la naissance de la vile créature qui officialisa une
bonne fois pour toute cette monstrueuse union entre deux des figures
les plus connues du cinéma fantastique américain, le vaisseau
de nos chasseurs intergalactiques favoris s’écrasa de nouveau
sur Terre près d’un petit village du Colorado. Ce qui devait
arriver arrivera et la propagation des « étrangers »
dans la région prendra vite des proportions alarmantes. (Mal)Heureusement
pour nous, un signal de détresse envoyé en désespoir
de cause par l’un des survivants de l’appareil forcera l’un
des confrères de chasse de ce dernier à sortir de sa torpeur
et à venir faire une courte escapade sur la planète bleue
pour enrayer la menace, et écorcher quelques humains au passage
pour le simple plaisir de la chose.
La question que plusieurs se posaient lors de l’annonce du premier
volet de la série était évidemment pourquoi les
cinéastes aux commandes du projet n’envoyèrent pas
directement leurs deux bestioles au beau milieu d’une localité
quelconque pour y semer la pagaille, plutôt que de les isoler
en Antarctique dans une étrange pyramide ensevelie sous une épaisse
couche de glace? Et bien nous avons maintenant notre réponse,
car en somme, cette prémisse aux possibilités plutôt
limitées telle que mise en scène par les frères
Strause ne vole pas plus haut que celle d’une production de bas
étage que l’on catapulte habituellement sans escale sur
les tablettes des clubs vidéo. En fait, l’échec
des deux réalisateurs est si aberrant qu’il nous fait même
prendre conscience des « bons » coups de leur prédécesseur
qui, au fond, avait su faire preuve d’un peu d’ingéniosité
durant son court séjour à la barre de la franchise. À
défaut d’avoir une bonne histoire sous la main, Anderson
réussit néanmoins à présenter ses respects
de façon subtile aux films originaux tout en mélangeant
d’une manière qui n’était pas nécessairement
bête les bases du film fantastique à celles du film d’aventure.
Même si le scénario de Shane Salerno enchaîne ici
affrontements musclés et scènes chocs dans lesquelles
il tue avec une aisance pour le moins inhabituelle, et d’une manière
particulièrement grotesque, jeunes bambins et femmes enceintes,
ce dernier n’arrive tout simplement pas à orchestrer la
moindre montée dramatique ou à générer ne
serait-ce qu’un minimum de suspense.
Les choses ne s’améliorent guère sur le plan visuel
alors que ces étranges louanges pour le travail de Paul W.S.
Anderson se forment à nouveau dans notre esprit. Certes, la réalisation
tape-à-l’oeil de ce dernier n’avait en soi rien d’exceptionnel.
Mais contrairement à ses substitues, Anderson semblait tout de
même avoir un certain contrôle sur ce qui se passait devant
et derrière la caméra. À l’opposée,
la réalisation fade et peu compétente des frères
Strause aurait mieux servi les intérêts d’une série
télévisée à petit budget que ceux d’un
projet destiné au grand écran. Cette mascarade d’une
médiocrité pour le moins déconcertante se rapprochera
toujours un peu plus du fond du baril à mesure que défileront
chacune de ses pitoyables séquences d’action, au cours
desquelles les deux cinéastes nous lanceront au visage une quantité
invraisemblable d’images sans jamais se soucier de la qualité
ou de la pertinence de celles-ci. Comme pour tant d’autres productions
du genre ayant vu le jour ces dernières années, le tout
se traduira par de nombreux abus au niveau du montage et par une utilisation
exagérée du gros plan. Et pour tourner un peu plus le
fer dans la plaie, le travail absolument nullissime au niveau de l’éclairage
nous fera passer la moitié du film dans la noirceur presque totale.
Si bien que nous ne retiendrons au final de cette suite de plans flous
assemblés de façon déficiente que les effets sonores
et les quelques pistes musicales soutirés aux efforts originaux
qui servent ici un spectacle odieux qui fait vraiment peine à
voir, même si nous ne distinguons bien souvent rien de ce qui
se passe à l’écran.
Même si les deux cinéastes semblaient vouloir interpeler
directement les fans du Aliens de James Cameron et du Predator
de John McTiernan en élaborant un divertissement tout ce qu’il
y a de plus sinistre et brutal, l’amas de violence présenté
ici s’avère au final aussi gratuit qu’inefficace
et ne fait qu’ajouter à la piètre qualité
d’un produit fabriqué en quatrième vitesse par une
équipe qui n’était visiblement pas intéressé
par le projet qu’elle avait sur les bras. Aliens vs Predator
- Requiem se veut ainsi un nouvel exemple du manque total de jugeote
de certains producteurs hollywoodiens qui n’hésitent plus
désormais à sacrifier la renommée de certaines
propriétés intellectuelles pour générer
un minimum de profit. La présente initiative est d’autant
plus désolante lorsqu’on pense que l’argent qui a
été injecté jusqu’à maintenant dans
cette franchise tout ce qu’il y a de plus futile aurait pu servir
à la mise en chantier d’un cinquième chapitre beaucoup
plus substantiel de la série Alien. Les frères
Strause ne firent guère mieux au niveau de la direction d’acteur
et du développement des personnages, en particulier celui de
la pseudo-Helen Ripley de service fraichement rentrée d’Irak
que nous n’aurions pu imaginer moins charismatiques. Ce spectacle
insipide, ennuyant à mourir et de très mauvais goût
prendra fin sur une note tout aussi abominable alors que la traditionnelle
célébration du devoir accompli effacera subitement toutes
les peines engendrées par la mort tragique des proches des principaux
protagonistes. Et dire qu’un troisième épisode est
déjà en préparation…
Version française :
Aliens Vs Prédateur - Requiem
Scénario :
Shane Salerno
Distribution :
Steven Pasquale, Reiko Aylesworth, John Ortiz,
Johnny Lewis
Durée :
86 minutes
Origine :
États-Unis
Publiée le :
15 Janvier 2007