LES AIMANTS (2004)
Yves Pelletier
Par Louis-Jérôme Cloutier
Qui aurait cru qu’Yves Pelletier écrirait et réaliserait
un jour une comédie romantique? Loin de l’humour mordant,
baveux et satirique de RBO, il nous présente un côté
jusqu’à maintenant inexploré de sa personnalité.
En effet, Les Aimants est un film d’une grande sensibilité
qui propose une histoire d’amour des plus romantiques, à
des centaines de lieux de Karmina. Parsemé de références
littéraires et artistiques, le scénario d’Yves Pelletier
utilise le phénomène du magnétisme et le transforme
avec ingéniosité en une métaphore de l’attirance
entre les personnes. De retour chez sa sœur Jeanne après
une longue absence, Julie découvre que celle-ci vit une dynamique
plutôt inhabituelle avec son fiancé. Ne se voyant presque
jamais, ils s’échangent des mots sur le réfrigérateur.
Devant s’occuper des notes pendant l’absence de sa soeur,
Julie décide de faire le ménage dans la vie sentimentale
de Jeanne en ajoutant un peu de romantisme aux messages.
Le scénario des Aimants se veut un chassé-croisé
anecdotique et franchement improbable des divers protagonistes en se
nourrissant de quiproquo, de hasard et d’amusante coïncidence.
Tout cela amène des situations à l’humour vif et
cocasse même si les gags ne font pas toujours mouche. Cependant,
Les Aimants ne cherche pas à être une énième
comédie d’amour typique de nos voisins du sud à
l’humour prévisible et à l’originalité
bien basse. Yves Pelletier a plutôt écrit une histoire
franchement touchante sur la dynamique amoureuse et qui bénéficie
de la qualité des interprètes qui, parfaitement dirigés,
parviennent à donner au récit une touche de sincérité
franchement sympathique. Toutefois, le traitement est parfois inutilement
laborieux. D’abord parce qu’il y a trop de personnages qui
viennent alourdir inutilement le récit, mais aussi parce que
la dynamique du film devient quelque peu répétitive, trainant
parfois même en longueur.
Les interprètes des Aimants, habillement dirigé,
offrent des interprétations attachantes et dans le ton. Notamment,
Isabelle Blais joue avec conviction et finesse face à Stéphane
Gagnon qui lui donne la réplique à merveille. Dans des
rôles plus secondaires, Emmanuel Bilodeau et Sylvie Moreau s’illustrent
grâce à la jovialité parfois sérieuse de
leur interprétation. Yves Pelletier, qui porte la majeure partie
du poids du film sur les épaules, parvient honorablement à
s’en tirer au niveau de la réalisation. Cependant, Les
Aimants aurait mérité davantage de piquant et d’énergie.
Les plans manquent d’inspiration et plusieurs scènes sont
filmées de bien trop près. Les qualités de metteur
en scène d’Yves Pelletier ne sont nettement pas encore
à leur optimum et on ne peut qu’espérer le voir
apprendre de ses erreurs. Baignant dans l’excellente trame sonore
concoctée par Carl Bastien et Dumas, on peut tout de même
regretter l’absence quasi totale de certaines pièces qui
aurait sans doute haussé l’impact dramatique et romantique
des divers évènements. En fait, Yves Pelletier n’a
pas vraiment fait un usage très judicieux du matériel
sonore en choisissant de se concentrer sur quelques pièces en
y retirant les paroles, ne gardant que la mélodie. Franchement
décevant quand on connait tout le potentiel du matériel.
Somme toute, Les Aimants est un film inégal qui malgré
ses quelques défauts apparait éminemment sympathique.
Le scénario nourri de différentes références
amène un chassé-croisé amusant et touchant entre
les divers personnages. Les interprètes jouent avec conviction
et sincérité, renforçant la qualité des
scènes dramatiques. À travers un marché saturé
de film pseudo-romantique qui verse davantage dans le rose bonbon et
le niais, Yves Pelletier confronte un film amusant et plaisant dont
la sincérité du récit devient rapidement touchante.
L’une des bonnes productions québécoises de l’année.
Version française : -
Scénario :
Yves Pelletier
Distribution :
Isabelle Blais, Stéphane Gagnon, Sylvie
Moreau
Durée :
91 minutes
Origine :
Québec
Publiée le :
12 Octobre 2004